La loi Douste-Blazy

16 juin 2004
01m 43s
Réf. 00057

Notice

Résumé :

La loi Douste-Blazy du 13 août 2004 n'a pas suscité d'hostilité particulière. Elle crée le médecin traitant, le parcours de soins, la franchise de 1 € et le DMP (dossier médical personnel). C'est dans le domaine de la gouvernance qu'elle est la plus importante. Le Conseil d'administration de la Cnam devient simplement le conseil, et l'Uncam est créée.

Date de diffusion :
16 juin 2004
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Éclairage

Pendant la campagne présidentielle de 2002, les deux principaux candidats, Jacques Chirac et Lionel Jospin, focalisent leurs discours sur l'Assurance vieillesse dont les perspectives, si elles s'annoncent catastrophiques, ne prévoient cette catastrophe qu'en 2020.

L'Assurance maladie est quasi absente du débat, alors que son déficit immédiat est colossal et qu'il faut remonter à 1988 pour trouver une année où la Cnam n'a pas été en déficit.

Dès son élection, Jacques Chirac confie à son Ministre en charge de la Sécurité sociale, François Fillon, le soin de préparer une loi de réforme des retraites. Après des manifestations très importantes, allant jusqu'à regrouper un million et demi de personnes, la loi Fillon est promulguée le 21 août 2003.

Pendant ce temps il n'est toujours pas question de l'Assurance maladie. Le Ministre de la Santé Jean-François Mattei chemine sur ce sujet sur la base de commissions, groupes de travail et rapports.

En octobre 2003 est créé le Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance Maladie (HCAAM), pendant du Conseil d'Orientation des Retraites (COR). Son premier et fondateur rapport de janvier 2004, publié par son Président, Bertrand Fragonard, fait apparaître une situation plus grave que celle de l'Assurance vieillesse. Ces conclusions montrent qu'à horizon de 15 années, la croissance des dépenses de santé seront telles, qu'à niveau de remboursement inchangé, il faudra augmenter la CSG de 5,5 points, ou bien qu'à recette inchangée la prise en charge des dépenses de santé par la Sécurité sociale tombera de 76 % à 55 %.

Le 31 mars 2004, Jean-François Mattei, que les médias ont pu appeler la "dernière victime de la canicule" de l'été 2003 [1], est remplacé par Philippe Douste-Blazy. Quatre mois et demi plus tard, la loi du 13 août 2004 est publiée. Elle n'a provoqué aucune manifestation et est accueillie paisiblement par les Français dans un sentiment de tranquillité.

La loi du 13 août 2004 suscite surtout un grand scepticisme.

Il faut dire que la loi Fillon de 2003 avait pour titre : « loi portant réforme des retraites », alors que la loi Douste-Blazy de 2004 s'appelle « loi relative à l'Assurance maladie ».

Le principe de base de la loi est la responsabilisation, mais la loi ne s'occupe que de la responsabilisation des assurés et ignore celle des professionnels de santé. Il est vrai que la consigne absolue était de se réconcilier avec les médecins, toujours « traumatisés » par le plan Juppé de 1996.

La loi de 2004 crée « les parcours de soins », coordonnés autour d'un médecin traitant. La généralisation des démarches de qualité est renforcée, sous la houlette de la Haute Autorité de Santé qui définit des protocoles de soins. Pour faciliter ces démarches, la loi décide de créer un dossier médical personnel (DMP) dont le ministre attend 7 milliards d'économies.

Il est également mis en place la franchise de 1 € sur les consultations des médecins, franchise ni remboursable par la Sécurité sociale ni par les complémentaires santé. Cette franchise ressuscite le TMOP (Ticket modérateur d'ordre public, voir Le plan Barrot de 1979) créé par les ordonnances de 1967, que Jacques Barrot tenta sans succès de mettre en œuvre en 1979.

Toutes les mesures de cette « maîtrise médicalisée des soins » seront détaillées et précisées dans la convention médicale de janvier 2005.

L'autre titre de la loi, et peut-être le plus important, est la nouvelle gouvernance de l'Assurance maladie. Le Conseil d'administration de la Cnam devient le Conseil de la Cnam. Ce qui permet le retour du Medef, qui avait quitté les caisses le 1er octobre 2001, provoquant pendant 3 années une grave crise du paritarisme.

Les régimes d'Assurance maladie sont coordonnés par l'Union Nationale des Caisses d'Assurance Maladie (Uncam) qui regroupe la Cnam, la MSA et la Canam. Un Directeur Général assume la quasi-totalité des prérogatives de décisions et de gestion. Il est créé également l'Unocam pour les organismes complémentaires d'Assurance maladie et l'UNPS pour les professionnels de santé.

[1] « Mattei, dernière victime de la canicule », Libération, 31 mars 2004.

Jean-François Chadelat

Transcription

Présentatrice
A présent, la réforme de l’Assurance maladie, le coup d’envoi a été donné ce matin au Conseil des ministres par Philippe Douste-Blazy qui a présenté sa copie. Un projet qui divise les syndicats, mais qui selon le Président de la République, je le cite, "garantit notre système de santé". Ce projet de loi validé la semaine dernière par le conseil d’État a pour objectif de parvenir l’équilibre financier en 2007. Carine Azzopardi.
Journaliste
15 milliards à trouver pour combler le déficit de la Sécu, c’est l’objectif affiché par le gouvernement. Pour y parvenir, le projet de loi présenté aujourd’hui comporte trois volets. En premier lieu, de nouvelles recettes avec par exemple la mise en place du forfait de 1 euro par consultation médicale, la hausse du forfait hospitalier ; ou bien l’augmentation de la CSG, entre autres, celle des retraités. Les entreprises seront aussi appelées à contribuer, celles en tout cas dont le chiffre d’affaires est très important. Puis, l’État transférera un milliard d’euros de recette fiscale vers l’Assurance maladie. Deuxième volet, les économies, avec une maîtrise médicalisée des dépenses de santé, un contrôle renforcé des arrêts maladie, et l’incitation au développement des médicaments génériques. Une haute autorité de santé publique sera également chargée d’évaluer l’efficacité des médicaments, et donc leur remboursement. Enfin, le plan gouvernemental prévoit une nouvelle organisation des soins. Un dossier médical personnel informatisé sera mis en place pour chaque patient, pour éviter la multiplication des examens. Il faudra aussi passer par son médecin traitant avant de voir un spécialiste si l’on veut être remboursé, puis une aide à l’acquisition d’une complémentaire santé sera mise en place pour les personnes à bas revenu.