Pierre Soulages face à La Vierge et l'Enfant en majesté entourés de six anges de Cimabue
Notice
Pierre Soulages présente ses œuvres favorites du musée du Louvre. Arrêté au département des peintures italiennes, il se livre à une analyse de La Vierge et l'Enfant en majesté entourés de six anges de Cimabue.
Éclairage
Dans ce documentaire, Pierre Soulages mène une visite de ses lieux et œuvres préférés du musée du Louvre. Il s'arrête au département des peintures italiennes devant La Vierge et l'Enfant entourés de six anges.
Cette œuvre sur bois monumentale du peintre italien Cimabue, très certainement peinte aux alentours de 1280, faisait partie du retable du maître-autel de l'église San Francesco de Pise. La composition, encore dense et massive, dépeint une Maestà : la Vierge et l'Enfant sont portés par les anges en majesté vers les cieux. Cimabue, par l'emploi de dégradés de couleurs sensibles, de drapés réalistes et élégants apporte une nouvelle sensibilité dans les chromatismes, la souplesse et le réalisme des figures et marque avec cette création un tournant dans la peinture du Trecento. Cette œuvre pose les jalons de ce que seront les questionnements perpétuels des artistes du quattrocento tels que Giotto : celles de la représentation du corps et de la lumière dans l'espace.
Dans ce document, Pierre Soulages fait l'analyse de cette œuvre avec les yeux d'un artiste et non ceux d'un historien de l'art qui s'attacherait à décoder le discours sous-jacent à l'œuvre. L'artiste apporte sa vision, frontale, il occulte le sujet de l'œuvre, tout mysticisme ou sentiment religieux, pour placer au premier plan l'analyse de la composition, des rythmes et des chromatismes. L'esthétique et le découpage pur de cette œuvre intéresse Pierre Soulages. Il relève tout ce qui, plastiquement, le touche en tant que spectateur et artiste créateur. En ce sens il relève l'importance du champ mental, ce champ du sensible qui émane de cette œuvre plusieurs fois centenaire. Il apprécie le format monumental de ce cadre original qui par sa forme emmène le rythme et le mouvement vertical ascendant de la composition, en impose les lignes de force. Pierre Soulages souligne aussi l'utilisation qui est faite de la lumière dans ce tableau. Par le biais de fins dégradés de couleur et des dorures des auréoles, Cimabue a inclus la lumière comme un élément immanent du tableau. Cette recherche de lumière immanente semble toucher Pierre Soulages. Il retrouve sans doute dans cette œuvre, pourtant diamétralement opposée à la sienne, cet intérêt commun pour la puissance jaillissante de la lumière. De même qu'avec ses outrenoirs, pour Pierre Soulages le champ mental de cette œuvre ne relève pas du message spirituel mais d'une esthétique universelle du sensible.