Entrée au répertoire de Valère Novarina à la Comédie-Française

15 février 2006
02m 05s
Réf. 00007

Notice

Résumé :

En 2006, Valère Novarina entre au répertoire de la Comédie-Française en mettant en scène sa pièce L'Espace furieux dans la salle Richelieu. Jouant avec les perspectives du dispositif à l'italienne, le poète explore avec les acteurs la matière des mots à l'œuvre dans l'espace. Extrait du spectacle.

Date de diffusion :
15 février 2006
Source :
Fiche CNT :

Éclairage

A la fin des années 1980, Valère Novarina écrit un roman qui sera publié, en 1991, sous le titre Je suis. La même année l'auteur adapte et met lui-même en scène le texte pour le théâtre. Le spectacle est représenté dans le cadre du Festival d'Automne au Théâtre de la Bastille. Il est alors interprété par six comédiens, trois musiciennes et trois machines sonores. La version scénique de Je suis est publiée en 1997 sous le titre L'Espace furieux.

C'est avec cette pièce que Valère Novarina entre, en 2006, au répertoire de la Comédie-Française. Le dramaturge se saisit du dispositif à l'italienne de la salle Richelieu dont il interprète l'acoustique et l'architecture à travers sa mise en scène et la conception du décor. Ce dernier est conçu par Philippe Marioge, tandis que les peintures ont été réalisées par le poète. Renato Bianchi a quant à lui dessiné les costumes du spectacle. Parmi les sept acteurs de la troupe, notons la présence de Daniel Znyk, qui faisait déjà partie de la distribution de la pièce lors de sa création quinze ans plus tôt et qui interprète le rôle de « Sosie ». Interviennent également en scène Richard Pierre, dans le rôle de « L'Ouvrier du drame », ainsi que le compositeur et musicien Christian Paccoud, qui joue le rôle de « L'Illogicien » et interprète, assisté de Matthieu Dalle, la musique originale qu'il a créée pour le spectacle.

L'auteur-metteur en scène poursuit le travail mené dans ses deux spectacles précédents (L'Origine rouge et La Scène) en cherchant à rendre visible l'efficience du langage au sein de l'espace théâtral. Il emprunte à la liturgie, au théâtre nô et au cirque les motifs mettant en jeu les corps, l'écoute, le regard et la parole. La pièce ne représente rien ; elle convoque la présence de figures autour d'une même assertion, écrite en lettres de lumière au-dessus de la scène : « Je suis ».

Valère Novarina est l'invité de l'émission « Des mots de minuit » (France 2) diffusée le 15 février 2006. Est diffusé un extrait (acte I, scène 2) de L'Espace furieux dans lequel interviennent les personnages de « L'Enfant d'Outrebref » (interprété par Alexandre Pavloff), « L'Enfant Traversant » (interprété par Véronique Vella) et « Jean Singulier » (interprété par François Chattot). A l'avant-scène se trouve, dans le trou du souffleur dirigé vers la salle, « Le Vieillard Carnatif » (interprété par Gérard Giroudon).

Marie-Isabelle Boula de Mareuil

Transcription

Présentateur
Extrait de L’Espace furieux, c’est donc salle Richelieu, c’est jusqu’au 8 mai. Le comédien François Chattot dans le rôle de Jean Singulier, la comédienne Véronique Vella dans l’enfant d’Outrebref et le comédien Alexandre Pavloff dans l’enfant traversant. Acte 1, scène 2 : Entrée brusque d’un homme portant une porte, Jean Singulier, celui-ci déverse sur le plateau quelques fragments de sa vie, extrait.
Comédien 1
La [terre rampait], archange luttait, Jean Singulier.
Comédienne 1
La grammaire !
Comédien 2
La logique !
Comédien 1
Je viens d’assassiner mon père, ma mère, mon beau-frère, son fils et son petit frère, sa tante, leur récipient, mon oncle et leur cousin, mon fils, son père, sa soeur et sa belle-soeur.
Comédienne 1
Rentrez d’où vous sortez.
Comédien 1
Je sors par ma porte d’entrée.
Comédien 2
Retournez d’où vous avez été sorti.
Comédienne 1
Ne respirez plus.
Comédien 2
Chante nous ta devise avant de nous quitter.
Comédien 1
Que faire pendant la matière ? Où se cacher ? Onze ans durant, pendant ma suite, j’ai habité en département D, à l’intérieur de la ville de V, près du boulevard du croisement B. J’ai habité huit ans dans la tour aux trois temps, futur, passé, présent, puis séjourné en habitat chez les durées, puis j’ai marché de N à N’, puis en sens inverse de U à U’ sous l’influence I du facteur S. J’ai rencontré le problème A qui s’aggrava jusqu’à fin O, où je n’ai plus vu que la personne bleue. Je venais d’avoir été mis en naissance, au hasard, par erreur. J’entrais alors par deux sujets, ouvrir un temps qui passe sans moi dont je sortis fautif, d’extrême justesse. J’allais, je vins, je revins et j’allais. Je voulais faire du hors-moi. Voyant ma tête péricliter, je m’étais loué un cerveau prisonnier. Que faire pendant la matière ? Où se cacher ? Ces bras, ces manches sont comme des outils, sont comme nos mains, sont comme sans bras. Mes bras sont posés là, ballants comme des manches, et pour aller faire quoi ? Et ma brouette est là, qui ne roule plus.