Ningen, spectacle du cirque Baroque
Notice
Des extraits de Ningen présenté au Parc de la Villette, entrecoupés d'un entretien de Christian Taguet qui aborde le thème du spectacle, l'œuvre de Yukio Mishima dans un Japon tiraillé entre le passé et le présent ; les nouvelles exigences pour l'artiste de cirque liées à la théâtralisation.
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Éclairage
Le Puits aux Images devient Cirque Baroque en 1989. L'évolution du travail de Christian Taguet montre un engagement touchant tant à la forme, en ayant participé activement à la définition du nouveau cirque, qu'au fond, qui n'hésite pas à fouiller des questions qui traversent le monde contemporain.
Dès les premiers spectacles, Christian Taguet fait appel à des metteurs en scène [1] qui marquent de leur empreinte l'esthétique de la compagnie. Baroque I et II (1987-88), puis Noir Baroque (1992) font référence à l'univers du jazz, les productions suivantes puisent leurs inspirations dans la littérature – Trapèze dans l'azur (1990) est une production charnière pour laquelle la collaboration avec Anne Quesemand et Laurent Berman, du Théâtre à Bretelles, apporte une note poétique prétexte à l'évocation de théories scientifiques en modes humoristique et ludique. Les matériaux pris en référence relèvent de l'exploration des écrits, de temps forts de la biographie et de l'époque de leur auteur pour leur capacité à faire écho aux préoccupations sociétales contemporaines.
La rencontre avec Mauricio Celedon et Agustin Letelier rend plus intime la relation du geste et de l'image avec le contexte. Candides (1995) s'inspire de l'œuvre de Voltaire, Ningen (1998) de celle de Yukio Mishima et Frankenstein (1999) de celle de Mary Shelley. Ces spectacles à plusieurs niveaux de lecture offrent un univers complexe, « derrière la composition gestuelle, derrière les situations dramatiques jouées, quelque chose qui soit absolument concret » [2], explique M. Celedon. Christian Taguet précise « nous construisons des tableaux d'une durée variable de cinq à dix minutes, avec une mise en scène propre pour le numéro. Ils peuvent être reliés dans une mise en scène globale, avec une unité qu'on retrouvera au niveau de la musique » [3]. Le cirque Baroque est une compagnie qui accueille de jeunes artistes pour peu que leur spécialité puisse être intégrée au propos. Pour chacun d'eux travailler avec un metteur en scène nécessite de s'en remettre à lui, d'apporter son « numéro », d'être capable de le laisser redéfinir (musique, rythme, intensité, part de prouesse, etc.) afin qu'il puisse s'intégrer dans une « atmosphère radicalement différente » [4] ; d'accepter, au-delà du costume de porter un personnage et de le maintenir présent dans la piste/scène pour l'inscrire dans le récit ; de s'engager à être interprète. A charge pour le metteur en scène de peser avec justesse la durée et l'alternance des moments qui appartiennent à la trame narrative et ceux qui sont consacrés aux numéros et concourent à l'éclairer.
Après Troyes (2001), en 2009, poursuivant le mélange des genres – confrontation agissante du cirque, de la danse, du théâtre et de la musique – Christian Taguet confie chacun des actes de Le Cirque des Gueux, librement inspiré de L'Opéra des gueux de John Gay, à trois metteurs en scène différents Kazuyoshi Kushida, Mauricio Celedon et Karelle Prugnaud. L'approche des bas fonds de Londres au XVIIIe ne peut que faire écho à la violence de notre quotidien qui conduit les dépossédés à reprendre la parole et à agir pour transformer le monde.
[1] Se succèdent, Corinne Lanselle, Noir Baroque, Jean-Marc Montel, Baroque II, Mauricio Celedon, Candides, Agustin Letelier, Ningen, Frankenstein, Troyes (2001).
[2] Mauricio Celedon, « Entretien avec Mauricio Celedon », entretien réalisé par Marc Pauli, Arts de la Piste, n° 1, Paris, HorsLesMurs, janvier 1996, p. 7.
[3] Christian Taguet, « Christian Taguet », entretien réalisé par Yan Ciret, dans Jean-Claude Lallias (dir.) Le Cirque contemporain, La Piste et la Scène, Paris, Théâtre d'aujourd'hui, n° 7, CNDP, 1999, p. 90.
[4] Mauricio Celedon, Op. Cit.