Joëlle Bouvier et Régis Obadia Derrière le mur

En 1986, Joëlle Bouvier et Régis Obadia chorégraphiaient Derrière le mur et affirmaient une danse forte inscrite dans des paysages plastiques puissants. Cette pièce sublimait le fantasme d'une tribu imaginaire en fouillant aux racines d'un geste archaïque. Couple emblématique de la danse contemporaine française, les Bouvier-Obadia ont marqué les plateaux pendant vingt ans. En 1980, ils créent leur compagnie l'Esquisse, qui deviendra en 1986 Centre chorégraphique national du Havre. De 1993 à 2003, sont co-directeurs du Centre national de danse contemporaine d'Angers. En 1999, ils décident de mettre un point final à leur carrière commune. Leur style incandescent, fusionnant les extrêmes dans des éclats de danse vive, a incontestablement marqué la danse contemporaine. D'abord en duo, ils sautent le pas et se confrontent au groupe. Leurs thèmes de travail sont à la hauteur de leur tempérament volcanique : le groupe, la guerre, le désir, la haine, le déchirement intérieur, la mythologie... Les matériaux de leurs travaux aussi : boue, eau, argile.

Excessifs toujours, ces autodidactes revendiqués ont construit leur danse pas à pas. Ils brandissent comme sources d'inspiration des cinéastes comme Andreï Tarkovski – ils réaliseront d'ailleurs une dizaine de films de danse d'une grande beauté -, des plasticiens comme Francis Bacon. Du côté de la danse, ce sont les figures du mime Jacques Lecoq et des chorégraphes Françoise et Dominique Dupuy qui les ont bâtis. Parmi leurs pièces-phares, il faut citer : Derrière le mur (1986), L'effraction du silence (1994)... En 1997, In daten, revient au duo en cognant le couple Jocaste-Œdipe pour une épreuve sans retour.

Lorsqu'ils se séparent un an plus tard – ils dirigeaient le Centre national de danse contemporaine d'Angers depuis 1993 - , ils se jettent chacun un défi : chorégraphier Antigone de Sophocle. Lui a intitulé son spectacle Passion et a endossé le rôle de Créon, oncle d'Antigone ; elle a choisi de baptiser sa pièce Fureurs en s'intéressant aux rapports entre Antigone et ses frères. Depuis leur rupture, chacun poursuit sa route. EN 2004, Joëlle Bouvier était en residence aux Gémeaux de Sceaux. Depuis la création de sa compagnie en 2003, Régis Obadia, qui travaille régulièrement en Russie en complicité avec Lisa Wiergasova, a obtenu un "Masque d'or" en 2004 pour sa version du Sacre du Printemps sur la musique de Stravinsky et "La Mouette" pour sa première mis en scène de L'idiot au festival Tchaïka de Moscou. Il a été programmé au Théâtre Silvia Montfort, à Paris, en 2006. Cinéaste également, il a écrit et réalisé un documentaire Dominique Mercy danse Pina Bausch en 2003.