L'Année des 13 lunes au Festival d'Avignon
Notice
En 1995, le Festival d'Avignon accueille l'adaptation par Jean-Louis Martinelli du film de Rainer Werner Fassbinder, L'Année des treize lunes (1978). Charles Berling y interprète le personnage d'Erwin qui, par amour pour un autre homme, devient Elvira. Reportage dans les loges sur la préparation de Charles Berling, interviews de l'acteur et du metteur en scène et extraits du spectacle.
Éclairage
Rainer Werner Fassbinder est un acteur, auteur, metteur en scène de théâtre et réalisateur allemand né en 1945 et mort en 1982. Il a écrit pour le théâtre entre 1965 et 1976 une vingtaine de pièces. Celles-ci offrent une vive critique politique et une vaste analyse sociale de l'Allemagne avant et après la Seconde Guerre mondiale. Elles mettent en avant les rapports de force entre les individus en faisant appel à des images qui mêlent violence, sexualité et cruauté.
L'Année des treize lunes est un film réalisé par l'artiste allemand en 1978 suite au suicide de son amant Armin Meier. Dans les années 60, Erwin, ancien garçon boucher, marié et père de famille, subit une opération et devient Elvira par amour pour Anton. Rejetée de tous, Elvira erre dans les rue de Francfort.
Le reportage, diffusé lors du journal de France 3 du 20 juillet 1995, présente l'adaptation du film par le metteur en scène Jean-Louis Martinelli, créée pendant le Festival d'Avignon au Gymnase du lycée Saint-Joseph. Ayant choisi de ne pas revoir le film original, l'homme de théâtre part du texte brut qui est interprété ici par seize acteurs. Il suit les cinq derniers jours d'Erwin/Elvira, qu'incarne Charles Berling. Jouant avec les temps et les espaces différents du théâtre et du cinéma, le metteur en scène explore une nouvelle narrativité pour la scène. L'action est régulièrement interrompue par les récits ou l'usage varié du montage. Des images du film sont projetées tandis qu'une télévision diffuse des images d'actualités ou de films contemporains de l'œuvre du cinéaste, qui lui-même avait recours à ces éléments historicisants. La scénographie de René Caussanel oppose à un échafaudage un dispositif bi-frontal qui souligne l'ambivalence du personnage, celle-là même que la séance de maquillage expose ici littéralement. Alternant humour et mélodrame, le spectacle offre un nouveau regard sur l'altérité dans une société où l'amour ne semble plus trouver sa place.
Pendant la même édition du Festival, Jean-Louis Martinelli propose par ailleurs un spectacle intitulé Voyage à l'intérieur de la tristesse, qui s'inspire des œuvres de Fassbinder.
L'Année des treize lunes sera repris au Théâtre National de Strasbourg et à la Grande Halle de la Villette à Paris et recevra en 1996 le « Molière du spectacle en région ».