Alwin Nikolais et son œuvre
Notice
Dans cette émission consacrée à Nikolais, le maître lui-même donne quelques clés de son oeuvre.
Éclairage
Quel régal que ce documentaire sur Alwin Nikolais (1910-1993) réalisé par Dirk Sanders en 1977 ! Toute générosité, dans un français délicieux, "Nik l'enchanteur" introduit en quelques phrases choisies son travail. Et quel travail ! Les images multicolores et mouvantes, qui sont ensuite présentées, explosent doucement en tous sens, dessinant des kaleidoscopes et des puzzles jamais vus. Et ce sont des danseurs, glissés dans des tissus et mitraillés par des projections de lumière et d'images, qui font surgir ces incroyables floraisons d'effets. Pas d'histoire au sens basic du terme mais des scénarios impétueux de traits, de bulles, de métamorphoses permanents. Ce "voyage à travers ses visions" proposé par Nikolais fait la preuve, s'il en est encore besoin, de la modernité absolue de ce maître américain. Art optique, jeu vidéo, paysage électronique, les spectacles de ce maître-artisan multimedia avant l'heure rivalisent avec nombre de propositions contemporaines.
Evidemment, au coeur de ces dispositifs, le danseur disparait au profit de l'oeuvre qu'il active avec humilité. "Je cherche, dit Nikolais dans l'introduction de cette émission, les trésors cachés de l'homme et de la vie". Incorporé dans la matière même de la pièce, l'interprète de ce phénoménal "théâtre total" se plie aux contraintes de la rigoureuse partition visuelle mise au point par Nikolais.
La danse alors sert le propos, évite toute gratuité, assure sa mission sur les crépitements musicaux également réglés par le chef.
L'abstraction ludique d'Alwin Nikolais résulte sans doute des multiples apprentissages et expériences que fit cet homme ouvert et généreux. Pianiste, marionnettiste, peintre, danseur, chorégraphe, musicien, il mélange ses pinceaux sur la toile du plateau. Il fabriquait tout lui-même : diapositives, accessories, costumes... Des pièces comme Tensile Involvement (1955), toile d'élastiques tirés à vue par les danseurs, ou Crucible (1985), incroyable rebus visuel reflété par un sol-miroir, sont de purs merveilles.
Chorégraphe et pédagogue de premier plan, Nikolais dirigea le Centre chorégraphique national de la danse d'Angers, de 1978 à 1981. Parmi ses élèves, Philippe Decouflé, Dominique Boivin, Maria Donata d'Urso... Chacun d'entre eux a su métaboliser leurs acquis, convoquant sur le plateau la magie inventive de Nikolais, roi des objets à transformations, des costumes extravagants, créateur d'un théâtre d'ombres, d'images et de couleurs uniques en leur genre. Depuis 2002, c'est la Ririe-Woodbury Dance Company, avec l'appui de Murray Louis (né en 1926), danseur et partenaire de Nikolais depuis 1949, qui conserve et présente ses pièces mythiques.