La Femme sans ombre de Richard Strauss programmée par Bernard Lefort
Notice
L'inauguration du second mandat de Bernard Lefort à la direction de l'Opéra de Paris en 1980 est une reprise d'un spectacle glorieux, La femme sans ombre de Richard Strauss. Bernard Lefort s'en explique en annonçant ses projets pour l'opéra, tandis que des extraits de la répétition générale permettent d'entendre Gwyneth Jones dans le rôle de la Teinturière.
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Éclairage
Bernard Lefort est par deux fois administrateur de l'Opéra de Paris. Une première fois, associé à Daniel Lesur, en 1971-1972, saison d'intérim pendant laquelle ils reprennent plusieurs spectacles emblématiques de l'ère Georges Auric, notamment les mises en scènes de Wieland Wagner ou le Don Carlos de Margarita Wallmann. Mais ils créent véritablement l'évènement le plus retentissant de l'époque pré-Liebermann au printemps 1972, avec la création parisienne de Die Frau ohne Schatten (La femme sans ombre) de Richard Strauss, sous la direction de Karl Böhm, et dans la mise en scène d'un jeune assistant inconnu de Wieland Wagner, Nikolaus Lehnhoff, avec une distribution d'exception (Leonye Rysanek, Christa Ludwig, James King, Walter Berry, Ruth Hesse).
Sixième opéra de Richard Strauss, et troisième de sa fameuse collaboration avec Hugo von Hofmannsthal comme librettiste, La femme sans ombre reste longtemps un ouvrage peu joué hors de la sphère culturelle germanique. C'est avec les représentations dirigées par Karl Böhm lors de la réouverture de l'Opéra de Vienne en 1955, et avec l'enregistrement audio qui suivit, qu'elle parvient à une notoriété internationale qui ne s'est pas démentie depuis. La production parisienne de 1972 s'inscrit dans un ensemble de productions dirigées par Böhm entre New York, Salzbourg et Vienne, qui achèvent de lui assurer son statut de chef-d'œuvre.
Bernard Lefort, appelé à diriger le Festival d'Aix-en-Provence pendant le mandat de Rolf Liebermann à l'Opéra de Paris, lui succède à l'automne 1980, et inaugure ce second mandat avec une reprise de cette production emblématique. Cette fois, la direction musicale est assurée par Christoph von Dohnanyi, alors Intendant de l'Opéra de Hambourg, et la distribution aligne les noms très prestigieux de Gwyneth Jones en Teinturière, d'Hildegard Behrens en Impératrice, de René Kollo en Empereur, de Walter Berry en Barak, et de Mignon Dunn en Nourrice. La production retrouve le même immense succès, et est heureusement captée intégralement pour la télévision, mais ne sera plus jamais reprise ensuite. L'œuvre n'est rejouée à Paris qu'en 1992, au Châtelet, dans une production d'Andreas Homoki, puis en 2002 à l'Opéra Bastille dans une production signée Robert Wilson.
La Femme sans ombre est assurément l'une des grandes réussites de l'administration de Bernard Lefort, qui rencontre de nombreuses oppositions internes et externes et connaît peu de triomphes, malgré son ouverture à de nouveaux répertoires, notamment le bel canto (il en avait été le chantre au Festival d'Aix-en-Provence), et ses tentatives de toucher un nouveau public en transportant l'Opéra au Théâtre des Champs-Elysées et au Palais des Sports. Sa démission en 1982 au bout de deux ans de mandat ouvre une nouvelle période d'instabilité à la tête de l'Opéra de Paris.
Dame Gwyneth Jones, la célèbre soprano galloise, qui devait marquer le rôle de Brünnhilde à Bayreuth pour le Ring du centenaire, et qu'on voit ici interpréter le rôle de la Teinturière aux côtés de la Nourrice de Mignon Dunn, a débuté à l'Opéra de Paris sous la direction de Rolf Liebermann en Leonora du Trouvère en 1973, et interprété ensuite Brünnhilde en 1976, et une mémorable Poppée en 1979. Elle reviendra encore à l'Opéra en 1985 pour chanter Isolde et, de 1987 à 1993, Elektra.