Renata Tebaldi interprète l'Air du Nil d'Aïda de Verdi à l'Opéra Garnier
Notice
La soprano italienne Renata Tebaldi, longtemps considérée - à tort - comme la rivale de Maria Callas, fut l'une de plus belles voix du XXe siècle. Une captation réalisée à l'Opéra de Paris en 1959 permet d'en juger dans « l'Air du Nil » d'Aïda de Giuseppe Verdi.
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Éclairage
Renata Tebaldi (1922-2004) est considérée comme la plus belle voix qu'ait produit l'Italie au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. Après ses débuts à Rovigo en 1944, elle est découverte à Parme par Arturo Toscanini qui l'engage pour le concert de réouverture de La Scala de Milan le 11 mai 1946, où elle participe à la fameuse prière du Mosé in Egitto de Rossini et au Te Deum de Verdi sous la direction du maestro. Elle devient l'une des stars de la scène milanaise, de 1949 à 1954, et de 1958 à 1960, tandis que sa carrière la mène bientôt de Lisbonne au Covent Garden de Londres, de San Francisco à toutes les grandes scènes internationales. Sa voix de lirico-spinto la destine surtout aux oeuvres de Verdi, Puccini et Giordano, où elle excelle particulièrement. Sa prétendue rivalité avec Maria Callas, impulsée quand cette dernière la remplace au pied levé dans Aïda en avril 1950 à La Scala, est avant tout du domaine des côteries et de la presse people, et en rien des domaines personnel ou musical : leur caractère vocal, leur style d'interprétation - l'une éduquée dans le chant vériste, l'autre retrouvant les fondamentaux du bel-canto - leur répertoire même, rarement commun, tout les rend non comparables. Et si Callas règne sur La Scala une décennie durant, c'est au Metropolitan Opera de New York que Tebaldi est reine, de 1955 à 1973.
Elle est rare à Paris, où elle débute en 1951, à l'Opéra et à l'Église de la Madeleine, avec la Giovanna d'Arco de Verdi, en tournée avec le San Carlo de Naples. Elle ne revient comme invitée à l'Opéra qu'en 1959, pour Aïda et l'année suivante pour Tosca, et ne reparaît ensuite à Paris que tardivement pour deux récitals à l'Espace Cardin.
Aïda demeure l'un des opéras les plus célèbres et les plus populaires du XIXe siècle. Commandé par le Khédive Ismaïl Pacha, qui propose à Verdi l'argument signé du fameux égyptologue Auguste Mariette pour la trame du livret, Aïda est créé triomphalement au Caire le 25 décembre 1971, dans l'Opéra inauguré deux ans plus tôt avec le Rigoletto du même Verdi, à 10 jours de l'ouverture du Canal de Suez. Aïda est repris à La Scala un mois et demi plus tard, et créé à Paris au Théâtre italien en 1876, mais n'entre finalement au répertoire de l'Opéra qu'en 1880, après que 48 autres théâtres l'aient déjà programmé de par le monde.
La captation du seul 3e acte réalisée par l'ORTF le 5 juin 1959 fait partie, avec l'acte II de Tosca de 1958 et deux actes de Carmen de 1959, des tous premiers enregistrements vidéo réalisés à l'Opéra de Paris, qui n'a à l'époque aucune politique audio-visuelle, tandis que la Télévision préfère produire ses propres spectacles lyriques en studio. La production filmée ici, signée de Pierre Chéreau et Jean Soubervie, date de 1939. La fameuse scène du Triomphe se fera laminer en 1968, lors des débuts de Leontyne Price à l'Opéra, par les quolibets d'un public criant « Asterix ! Asterix ! » pour marquer son rejet d'un spectacle usé, au kitsch ravageur, qui tend dans cette scène particulière au ridicule absolu. Aïda n'a d'ailleurs plus été remontée à l'Opéra de Paris jusqu'à 2013.
Lors de cette soirée de 1959, dirigée par Georges Sébastian, La Tebaldi, rayonnante de musicalité, malgré quelques aigus un peu tirés, montre toutes les qualités de son art du chant et de son émotion propre. La distribution affiche également l'Amneris de Rita Gorr, impériale, le Radames de Dimitar Ouzounov, et l'Amonasro de René Bianco.