Le régime minier
Notice
Les employés des Charbonnages bénéficiaient du régime minier crée en 1946. Ce régime de retraite est une spécificité régionale qui permet aux mineurs retraités de disposaient du logement, du chauffage et des soins médicaux gratuits. Aujourd'hui, le régime de retraite est largement déficitaire faute de cotisants. Ses gestionnaires attendent qu'il disparaisse, lorsqu'il n'y aura plus d'ayants-droits. Reportage chez Claude Bouin, mineur retraité. Au syndicat des mineurs CGT à Grenay, Raymond Frackowiak fait remarquer que sans la corporation minière à la Libération, la France aurait eu du mal à se redresser. On estime que la dernière veuve de mineur recevra la dernière pension en 2045.
Éclairage
Lorsqu'à la Libération, les mineurs se retrouvent en situation de force, étant donnés les besoins en charbon du pays, leurs organisations syndicales obtiennent plusieurs choses. Il s'agit d'une part de la grande convention collective nationale que constitue le Statut du mineur, décrété le 14 juin 1946 et qui comprend, entre autres, certains avantages en nature (logement et chauffage gratuits). D'autre part, dans la lignée de la particularité affirmée par le Statut, ces organisations obtiennent la pérennisation d'un régime spécial au sein de la nouvelle Sécurité sociale (octobre 1945). Ce régime, qui naît avec le décret du 27 novembre 1946, est adossé à un certain nombre de dispositions antérieures (1) : la loi de 1894 qui organise la prise en charge de la vieillesse et de la maladie au sein de la corporation minière, la loi de 1914 qui crée une Caisse de retraite autonome pour les ouvriers mineurs. Le décret de 1946 reprend ce modèle et donne naissance à une Caisse autonome de Sécurité sociale dans les mines (CANSSM). Celle-ci gère les retraites : l'âge de départ et le calcul des pensions tiennent compte des spécificités de la profession ; les retraités continuent de surcroît à bénéficier, comme les actifs, des avantages prévus par le Statut du mineur. La CANSSM supervise par ailleurs le réseau des sociétés de secours minières, dont la genèse remonte au XIXe siècle. Ce sont ces sociétés de secours qui, au niveau local et régional, couvrent le risque maladie, gèrent les médecins salariés par elles et toute une série d'infrastructures sanitaires (pharmacies, centres de soin). Le régime de la Sécurité sociale minière et le Statut du mineur sont en théorie deux éléments différents. Cependant ils se confondent la plupart du temps aux yeux de la population minière et de l'extérieur : tous deux symbolisent la reconnaissance par la collectivité de la singularité des mineurs et de leur rôle dans la prospérité du pays.
Mais la disparition progressive de la profession fragilise peu à peu cet ensemble. Le principal problème rencontré par le régime minier est la dégradation constante du rapport entre actifs, c'est-à-dire cotisants, et bénéficiaires des prestations. En 2011, le régime compte 330 000 retraités et plus de 172 000 affiliés maladie pour seulement 10 000 cotisants, un nombre qui se réduit sans cesse (2). Dans ces conditions, les 1,7 milliards d'euros versés au titre des retraites (1,6 milliards pour la maladie) sont essentiellement financés par l'État et le régime général de la Sécurité sociale (3). A ce déséquilibre irréversible s'ajoutent d'autres questionnements touchant à l'avenir de l'offre de soin dispensé auparavant par les sociétés de secours ou encore à la pérennité des avantages en nature que le Statut du mineur prévoit pour les retraités. Les pouvoirs publics tentent autour des années 2000 de trouver des solutions de transition, ainsi avec la création en 2004 de l'ANGDM (Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs), qui reprend les anciennes obligations de l'employeur. Mais la tendance plus générale est à l'effacement de la particularité du régime social minier et à la prise en charge des missions qui lui sont encore dévolues pour quelques décennies par d'autres institutions : la Caisse des dépôts et consignations pour les retraites, le régime général de la Sécurité sociale pour la maladie.
(1) Diana Cooper-Richet, Santé et retraite des mineurs, Montreuil, VO Éditions, 1995.
(2) Le Monde, 19 octobre 2011.
(3) Cour des Comptes, La fin des activités minières : rapport au président de la République, Paris, Direction des Journaux officiels, décembre 2000, p. 73-76.