La réforme du régime social minier
Notice
Un député UMP d'Alsace, Yves Bur, préconise l'alignement du régime spécial de la sécurité sociale des mineurs avec le régime général. Les ayants-droits retraités protestent comme Georges, interrogé chez lui. Pour lui, c'est une attaque au statut des mineurs et au régime de sécurité sociale créés en 1946. D'autant que celui-ci a déjà été revu en 1992 avec la suppression de dispensaires et en janvier 2010 avec la fin de la prise en charge de transports médicaux. Raymond Frackowiak de la confédération des syndicats de mineurs CGT, rappelle que les cotisations des mineurs étaient supérieures à celles du régime général.
Éclairage
En octobre 2010, le député UMP du Bas-Rhin Yves Bur présente son rapport parlementaire sur l'avenir du régime social minier. L'analyse et les mesures qu'il propose se fondent sur une situation dont nombre d'acteurs sont conscients depuis longtemps. La fin très progressive de l'exploitation minière a laissé le temps de prendre conscience de l'impasse inéluctable à laquelle allait se heurter un régime de retraite privé peu à peu d'actifs, donc de cotisants. Les interrogations sur le devenir d'un régime qui, dans le domaine de la maladie, intègre à la fois la fonction assurantielle et celle d'offreurs de soins, ne sont pas non plus nouvelles. Outre une prise en charge à 100% de ses affiliés, le régime social minier a en effet la particularité d'avoir développé sa propre offre de soins : tout un ensemble de personnels (médecins salariés) et d'infrastructures (centres de santé polyvalents, pharmacies) sont gérés ainsi à partir de 1946 par le réseau des sociétés de secours minières, chapeautées à l'échelle nationale par la Caisse autonome nationale de la Sécurité sociale dans les mines (CANSSM).
Plusieurs réformes tentent, dans le courant des années 2000, de dessiner le devenir de ce système après la mine. Le décret du 2 novembre 2004 réorganise l'ensemble autour de la CANSSM et de 7 Caisses régionales de Sécurité sociale dans les mines (CARMI) qui succèdent au réseau des sociétés de secours minières. En 2005, les services et établissements sanitaires développés par le régime minier sont refondus à l'échelle de chaque ancien bassin et ouverts à l'ensemble de la population, y compris les non affiliés au régime. La même année, la gestion du risque vieillesse est transférée à la Caisse des Dépôts et Consignations. Reste la prise en charge des branches maladies et accidents du travail/maladies professionnelles (la silicose notamment), qui concernent encore en 2012 plus de 172 000 affiliés (des retraités et leurs conjointes essentiellement). C'est dans ce contexte qu'est rédigé le rapport Bur, qui préconise l'ouverture des dernières structures sanitaires (pharmacies) encore réservées aux affiliés du régime minier et surtout le transfert des fonctions assurantielles au régime général. La proposition d'Yves Bur est entérinée par le décret du 31 août 2011, qui prévoit la mise en œuvre de ce transfert au plus tard pour la fin 2013.
Ce rapport, et le décret qui en découle, font l'objet de fortes critiques de la part des représentants politiques et syndicaux des ex-bassins miniers du Nord et de Lorraine. Ces représentants mettent en avant la pénibilité du métier, voire sa dimension sacrificielle et rappellent le rôle joué, par exemple au moment de la Libération, par les mineurs dans la reconstruction du pays. Ils ne se contentent pas cependant d'invoquer seulement le passé mais soulignent également les besoins présents des anciennes régions minières. Dans des zones souvent particulièrement défavorisées et déficitaires en matière d'infrastructures sanitaires, l'offre de haut niveau (médecins, centres de santé polyvalents) permise par le régime social minier constitue à leurs yeux une compensation nécessaire et qui doit être maintenue. Plus largement, ce sont ici deux logiques qui s'affrontent. A l'échelle nationale, les pouvoirs publics cherchent à rationaliser la protection sociale et à maîtriser son coût ; à l'échelle régionale, la particularité du régime est défendue au nom des devoirs de la collectivité à l'égard des anciens mineurs et en arguant des difficultés que connaissent leurs descendants. Si l'extinction du régime social minier paraît à terme inévitable, le débat n'est pas tout à fait clos. Au mois d'août 2012, la ministre socialiste des Affaires sociales Marisol Touraine, a décidé un moratoire sur son transfert, afin de continuer la réflexion sur l'offre de soin qu'il a longtemps structurée.