Les ressources énergétiques de la France

22 octobre 1964
03m 45s
Réf. 00361

Notice

Résumé :

Cet extrait aborde la question des besoins énergétiques en constante augmentation dans le monde. Sur les images d'une mine à la Grand'Combe près d'Alès (Cévennes) est présenté le cas de la France dont la consommation d'électricité double tous les dix ans. Comment pourra-t-on faire face à une telle demande dans le futur, sachant que les réserves de charbon, de gaz et de pétrole ne sont pas inépuisables ?

Type de média :
Date de diffusion :
22 octobre 1964
Source :

Éclairage

Ce document diffusé en 1964 a été réalisé après la grande grève des mineurs en 1963. Il adresse un message contradictoire à propos de l'avenir de l'exploitation charbonnière.

Il montre, chiffres précis à l'appui, la non compétitivité du charbon national, exploité en profondeur, au regard des pays ou l'exploitation se réalise en "découvertes" (en surface et non dans des mines souterraines). Ici, seuls les États-Unis sont cités, mais c'est le cas aussi en Australie par exemple. Ainsi, le charbon américain, livré au port du Havre, coûte un tiers de moins que le charbon français. Cette différence importante, initialement imputable aux conditions d'exploitation plus faciles aux États-Unis est aussi la conséquence de la chute des prix du transport maritime.

Le document montre aussi la non compétitivité du charbon national vis-à-vis des produits pétroliers. Ainsi, la tonne de pétrole d'Irak (allusion au début des années 1920 où la France disposait d'intérêts pétroliers en Irak) livrée à Marseille vaut le même prix que la tonne de charbon mais produit nettement plus d'énergie.

La conséquence de cette concurrence est que le déficit financier des Charbonnages de France s'accroît. Cette question est évoquée en même temps que défile l'image d'une haveuse creusant un trou. De fait, le premier déficit de la jeune entreprise apparaît en 1951 et, selon elle, il s'amplifiera pour atteindre 207 Francs par tonne en 1981.

Le document évoque de façon inattendue "les paysages souvent tristes" en montrant le Bassin de la Grand'Combe à Alès (fermé entre 1968 et 1985). Les débouchés du charbon se rétrécissent, ainsi les locomotives à vapeur cesseront de circuler en 1970. Le coup de chapeau aux efforts de la modernisation et l'évocation respectueuse de la grève de 1963 sonnent comme un discours d'enterrement.

Puis, assez brusquement, le message se veut plus rassurant en affirmant que pour certains débouchés, en particulier ceux des cokeries pour la sidérurgie, l'industrie du gaz et la chimie, "le charbon restera irremplaçable". Il est vrai qu'au-delà de la fermeture des mines, les usines sidérurgiques, les cokeries ou les centrales thermiques continueront d'utiliser du charbon...importé.

En 1964, le plan de récession de l'activité charbonnière est adopté et mis en œuvre par les pouvoirs publics et par l'entreprise nationale. Le document, comme les médias, entreprennent de convaincre les Français de la pertinence de ces choix. Il s'agit aussi de convaincre de la durabilité de certains débouchés comme ceux des cokeries ou de la sidérurgie. Les décisions à propos d'une cessation complète de l'activité des mines viendront plus tard (en 1983), après celles du plan Bettencourt de 1968 qui prévoit une production de 25 millions de tonnes par an en 1975.

Philippe Mioche

Transcription

(Musique)
Journaliste
Avec quoi allons-nous fabriquer les énergies dont nous aurons besoin dans les années qui viennent, c’est le premier point de notre enquête. Nous l’avons menée en France d’abord, parce que nous y vivons bien sûr, et aussi parce que la France est un bon exemple de pays industrialisé mais dont les ressources en énergie sont limitées. La première de ces ressources, c’est le charbon. Il y a cent ans, le charbon c’était le pain de l’industrie, il actionnait les locomotives, les usines, c’était l’unique moyen de chauffage domestique. Aujourd’hui, le charbon fournit la moitié seulement de l’énergie consommée en France. En 1970, il en fournira 30%. Il en reste pourtant des milliards de tonnes à sortir de terre. Mais l’homme moderne vite enserré dans des règles économiques strictes, il lui faut de l’énergie, mais pas à n’importe quel prix. Parce qu’il faut exploiter les mines de plus en plus profondes où l’extraction est difficile, le charbon devient trop cher. Une tonne de charbon américain rendue au Havre revient à un tiers de moins qu’une tonne de charbon extraite d’une mine française. Une tonne de pétrole d’Irak arrivée à Marseille coûte le même prix mais fournit moitié plus d’énergie qu’une tonne de charbon. Le drame des mineurs en grève en mars 1963 a bien illustré cet aspect financier de la production d’énergie. Les Charbonnages de France, malgré un énorme effort de mécanisation et de modernisation, connaissent chaque année un déficit de plusieurs centaines de millions.
(Musique)
Journaliste
Peu à peu la production française de charbon va baisser. En 1970, il n’y aura plus de locomotive à vapeur sur le réseau de la SNCF. En 1970, il y aura moins de mineurs. Déjà, ils sont de plus en plus rares ceux qui rêvent de passer une vie de travail au fond d’une mine. Le charbon donc, ne pourra pas faire face aux demandes croissantes d’énergie, du moins en France. Ces paysages souvent tristes comme celui-ci, que nous avons filmé à La Grand-Combe, près d’Alès, sont si fortement liés à l’atmosphère même d’une province ou d’une ville qu’ils ne disparaîtront pas ; car il faudra toujours du charbon. Pour alimenter les centrales thermiques, bien sûr, qui continueront à fabriquer de l’électricité. Mais surtout pour les utilisations industrielles, là où le charbon est irremplaçable. Comme par exemple, la fabrication de l’acier, la production de gaz de ville ou celle de matière première de l’industrie chimique.
(Musique)
Journaliste
C’est dans les cokeries que le charbon est transformé en coke, matière première indispensable à la fabrication de l’acier tandis que l’on recueille les gaz. Certains de ces gaz sont utilisés directement sous la forme de gaz de ville. D’autres, au lieu d’être brûlés, sont distillés et produisent les précieuses matières premières qui sont à la base d’innombrable substances synthétiques, engrais, colorants, matières plastiques ou tissus artificiels.
(Musique)