Visites guidées des anciens palaces d'Aix les Bains

26 juillet 2011
02m 13s
Réf. 00076

Notice

Résumé :

Des visites guidées permettent aux touristes de découvrir les splendeurs des anciens hôtels de luxe d'Aix les Bains et de marcher sur les traces de la riche clientèle de l'époque, comme le roi de Grèce ou l'impératrice Sissi. La cité thermale était alors très à la mode, comme Deauville. Après la Seconde Guerre Mondiale, l'âge d'or est fini et laisse place au thermalisme de masse. Les palaces ont été conservés et transformés en co-propriétés. Ils sont inscrits aux monuments historiques.

Date de diffusion :
26 juillet 2011
Source :
Personnalité(s) :

Éclairage

Au pied du Massif des Bauges, dans le département de la Savoie, la ville d'Aix-les-Bains (28 585 habitants en 2011) est située sur la rive orientale du Lac du Bourget. C'est aujourd'hui la principale station thermale de la Région Rhône-Alpes (plus de 25 000 curistes en 2010, environ 46 000 à Dax, première ville thermale de l'Hexagone en termes de fréquentation). L'existence de sources minérales chaudes, aménagées par les Romains pendant la seconde moitié du Ier siècle avant J.-C., est probablement à l'origine du développement de l'actuelle ville haute. Plus ou moins délaissée au Moyen Age, la pratique des thermes renaît au XVIIIe siècle alors que la Savoie appartient au royaume de Sardaigne ; ainsi le roi Victor Amédée III fait-il construire un établissement de bains moderne entre 1779 et 1783, agrandi à plusieurs reprises avant d'être promu « thermes nationaux » en 1860 lors du rattachement de la Savoie à la France, agrandis à nouveau en 1897 et 1934.

L'invention par le docteur Despine, en 1832, de la douche écossaise et de la technique Berthollet (brume thermale pulvérisée sur les mains dans une étuve) assurent la réputation de la cure et l'essor de la station. Les thermes de Marlioz, bâtis en 1860, augmentent la capacité d'accueil : Aix-les-Bains bénéficie largement de la vogue des villégiatures thermales et se développe pendant le Second Empire et outre les malades, attire une clientèle fortunée d'autant plus que l'accès est facilité par la création d'infrastructures ferroviaires : dès 1839 un chemin de fer à traction chevaline reliait Chambéry au Lac du Bourget, la ligne locomotrice lui succéda en 1853. L'agrandissement du Grand Port, vers 1875, permet les croisières, mais aussi une liaison avec Lyon par bateaux à vapeur. Parallèlement, de nombreux équipements pourvoient au confort et à l'agrément des villégiateurs : à la promenade publique paysagée aménagée dès 1783 et au Casino Grand Cercle et son théâtre en 1850 s'ajoutent un hippodrome (1883), un golf (1904), et le corollaire obligé des grandes stations : les magasins de luxe et les salons de thé. A la veille de la Première Guerre mondiale, plus de dix palaces accueillent la clientèle aristocratique et bourgeoise qui fréquente sa saison : au Grand-Hôtel (1858) et son annexe Les Ambassadeurs en 1877, aux Beau-site (1883), Splendide (1884) et Bernascon (1897 à 1900) s'ajoutent l'Astoria (1904), l'Excelsior (1906), le Mirabeau (1910), le Royal (1914). L'ampleur des constructions pendant la Belle Epoque témoigne d'une stratégie d'élargissement de la fréquentation.

Les trois palaces auxquels le reportage est consacré ont été les fleurons d'un complexe hôtelier créé par Gaudens Antoine Rossignoli (1837-1908, gendre de l'hôtelier et conseiller municipal Louis Helme), qui profite des travaux d'urbanisme de la fin du XIXe siècle et du percement d'une nouvelle voie ménageant un vaste point de vue sur la ville et le lac pour fonder son premier palace inauguré en 1884. Elevé sur les plans de l'architecte genevois Antoine Gouy par l'entrepreneur Paul Bonna, d'autre part maire d'Aix-les-Bains, le Splendide est bientôt fréquenté par des têtes couronnées : le Maharadjah de Baroda, l'Empereur Don Pédro II, l'Impératrice Elisabeth d'Autriche... la reine Victoria lui préfèrait, dit-on, le Bernascon. En 1906, une annexe est adjointe au Splendide, l'Excelsior ; plus moderne, elle lui est reliée par une passerelle enjambant la rue, aujourd'hui détruite. C'est cependant la seconde extension, accolée à l'aile nord du Splendide et dénommée le Royal, construite en 1914 par Louis Rossignoli, fils de Gaudens Antoine, grâce à la création d'une société anonyme et à la gestion de la Banque Fatio de Genève, qui est la plus novatrice. Le bâtiment est construit en béton armé, encore peu utilisé, par l'entrepreneur Léon Grosse sur les plans de l'architecte genevois Alfred Olivet en moins d'une année, pour répondre au cahier des charges. La présence de nombreux ouvriers (jusqu'à 239) et la mise en œuvre d'un toit provisoire leur permettant de travailler par tous les temps ont alors été nécessaires. Les décors des parties communes du rez-de-chaussée : entrée, salon et salle de restaurant sont particulièrement luxueux, malheureusement, malgré une protection au titre des Monuments Historiques, cette dernière a été bétonnée et transformée en studios en 1977. Le salon conserve toutefois ses pilastres recouverts de lapis-lazuli, son dôme et son vitrail floral qui apparaissent dans le reportage, et a fait l'objet d'une mesure de classement en 1987. Elément de confort incontournable des palaces, l'ascenseur hydraulique est protégé au titre des Monuments Historiques, comme les façades, toitures et certains éléments de décoration des parties communes de ces trois immeubles. Celui du Royal a conservé non seulement sa cabine d'acajou et sa cage de fer forgé, mais surtout ses mécanismes d'origine et son « parachute » destiné à amortir l'atterrissage en cas de chute de la cabine.

Ces décors, filmés pour le reportage, figurent au vrai les vestiges accessibles et encore lisibles d'une splendeur passée que les touristes qui participent aux visites guidées organisées depuis plusieurs années par l'Office de tourisme d'Aix-les-Bains peuvent ainsi découvrir. L'activité hôtelière des trois palaces Rossignoli, comme de l'ensemble des palaces d'Aix-les-Bains, a en effet cessé définitivement en 1966 et les bâtiments ont alors été vendus et transformés en appartements. Contrairement à Vichy ou Deauville, construits sur des terrains vierges et conçus en fonction des normes de la villégiature, Aix-les-Bains a dû composer avec un habitat préexistant que les vastes travaux d'urbanisme entrepris à la fin du XIXe siècle ont dû prendre en compte, générant un espace peu aisé à mettre en scène. Comme toutes les villes thermales, Aix-les-Bains est sensible à la mutation de la fréquentation touristique qui a vu se substituter à sa clientèle cosmopolite, un curisme médical pris en charge par l'assurance maladie, lui-même en forte régression à la fin du XXe siècle. La ville est donc conduite à développer sa fréquentation touristique, et l'obtention, somme toute assez tardive au regard du partrimoine qu'elle a pu sauvegarder, du label Ville d'art et d'histoire en 2013 devrait le favoriser. Néanmoins, plusieurs de ses bâtiments emblématiques, la Villa Russie, boulevard de la Roche du Roi, ou encore les thermes, peinent à préserver leur statut patrimonial, quant à l'hôtel de Paris, il a été détruit. Grâce à leurs associations de copropriétaires qui veillent à leur protection, et à l'Inventaire du patrimoine architectural et urbain effectué par les services régionaux de l'Inventaire et la ville d'Aix les Bains qui ont recensé et étudié le patrimoine aixois, les palaces Rossignoli peuvent être construits en « produits touristiques ». Ils constituent un espace idéal à la mise en scène nostalgique d'une grandeur passée, autour d'un discours articulé, on le constate, de superlatifs qui s'entendent, dans ces espaces pourtant vides, à faire revivre les « fastes » et la « splendeur » des siècles passés, grâce aussi à des figures mythifiées (Sissi) aptes à donner aux visiteurs le sentiment d'un moment privilégié.

Bibliographie :

- Jamot Christian (1988) Thermalisme et villes thermales en France. Clermont-Ferrand : université de Clermont-Ferrand II, Institut d'études du Massif Central. Collection Publications de l'Institut du Massif central 32, 540 p.

- Inventaire du patrimoine architectural et urbain d'Aix-les-Bains [en ligne]. Disponible sur : http://www.patrimoine-aixlesbains.fr/index.php

Florence Charpigny

Transcription

Valérie Chasteland
Original à Aix-les-Bains en Savoie et parfait en temps de pluie, la visite guidée des anciens palaces de la ville thermale. Tous les samedis de l’été, les touristes peuvent découvrir les halls d’entrée, les salons de ces hôtels de luxe, construits à la belle époque. La plupart sont aujourd’hui des appartements en copropriété, mais ils ont conservé le charme de leur architecture et le souvenir de ces aristocrates et milliardaires qui venaient prendre les eaux. Reportage, Xavier Schmitt et Anne Ployart.
Xavier Schmitt
Ils s’appelaient le Splendide, le Royal ou l’Excelsior. Trois des cinq palaces, construits au tournant du XIXème et du XXème siècle, la belle époque. Les touristes découvrent les splendeurs de ces hôtels de luxe. Et ils marchent sur les traces de la richissime clientèle, les têtes couronnées, comme le roi de Grèce ou l’impératrice Sissi.
(Bruit)
Monique
J’imagine toute cette aristocratie qui devait venir là et qui devait se régaler. C’est toute une, une vie, un mode de vie qui est passé.
Marie Eckly
On est là aussi pour leur montrer cette architecture remarquable, tout à fait pionnière et touchant donc le tourisme. Ces hôtels, ces palaces, avec des décors très singuliers, de type belle époque, ou même art nouveau ; et si ce n’est, après la Première Guerre Mondiale donc, art déco.
Xavier Schmitt
Vue imprenable sur le lac du Bourget. C’est pour elle que les palaces ont été bâtis sur les hauteurs de la ville. Et pour une autre raison, les people de l’époque veulent se démarquer des premiers touristes, moins fortunés, ceux qui séjournent dans les hôtels du centre. La cité thermale est alors une villégiature très à la mode, comme Deauville ou Biarritz.
Serge Sueur
Il était de bon ton d’être à Aix-les-Bains. Au point même que lorsque, à Paris, les opéras fermaient, les grandes maisons de couture fermaient, ces opéras et les grands couturiers étaient ici à Aix-les-Bains.
Xavier Schmitt
Après la Deuxième Guerre Mondiale, fini l’âge d’or, place au thermalisme de masse. Les palaces ont été miraculeusement préservés. Ils ont été transformés en copropriétés, avec un classement ou une inscription aux monuments historiques.