Jacqueline Auriol

18 juillet 1962
05m 35s
Réf. 00327

Notice

Résumé :
Les derniers tests effectués, Jacqueline Auriol s'envole au dessus d'Istres, dans un Mirage III C, pour battre le record féminin de vitesse en circuit fermé. Avec une machine qui consomme 5 litres par seconde, tout doit être calculé, c'est pourquoi la pilote est guidée par un ingénieur au sol au radar, pour réaliser cet exploit : 1850 km/h.
Type de média :
Date de diffusion :
18 juillet 1962
Source :
Personnalité(s) :
Thèmes :

Éclairage

Après une enfance paisible passée à Challans, Jacqueline Auriol va connaître une destinée exceptionnelle. Belle-fille de Vincent Auriol, président de la IVe République, la Challandaise marquera l'histoire de l'aviation française en multipliant les records du monde de vitesse.
Bien avant Jacqueline Auriol, les pilotes René Guilbaud (1890-1928) et René Couzinet (1904-1956) portèrent haut les couleurs de la Vendée. Le premier, né à Mouchamps, connut son heure de gloire en 1926 en tentant de rallier la France à Madagascar en hydravion. Il décéda précocement deux ans plus tard dans l'Océan Arctique en participant, aux côtés du célèbre explorateur norvégien Roald Amundsen, à une mission de recherche du dirigeable Italia d'Umberto Nobile. Le second, natif de Saint-Martin-des-Noyers, était constructeur d'avions. A ce titre, il réalisa en 1933, à bord du Couzinet 70 Arc-en-Ciel III piloté par Jean Mermoz, la traversée de l'Atlantique Sud. A leur retour au Bourget, 15 000 personnes leur réservèrent un accueil triomphant.

Une jeunesse challandaise empreinte de simplicité

Le flambeau est repris quelques années plus tard par Jacqueline Auriol et de plus belle manière encore, puisqu'en dix ans, celle-ci battra pas moins de six records du monde de vitesse. Rien, dans sa jeunesse, ne semblait pourtant la prédestiner à de tels exploits aériens. Né en 1917, dans la menuiserie que dirigeait son père à Challans, place Briand, la jeune fille se sent, après ses études secondaires, davantage attirée par l'art et la décoration. D'ailleurs, c'est sans véritable conviction que celle qui s'appelle encore Jacqueline Douet effectue son baptême de l'air à 16 ans. Après son mariage, en 1938 avec Paul Auriol, c'est à l'Elysée où son beau-père Vincent Auriol, devenu président de la  IVe République, siègera de 1947 à 1954, qu'elle exerce un temps ses talents de décoratrice.

La découverte de l'aviation

Mais autant par défi que par goût du sport et sans doute aussi parce qu'elle préfère l'aventure aux mondanités, Jacqueline Auriol décide, en 1948, d'apprendre à piloter. Rapidement, l'aviation devient sa nouvelle passion et pour se perfectionner, elle décide de passer à la voltige aérienne. Malgré un grave accident d'hydravion qui la défigure en 1949 et les 22 opérations chirurgicales qui s'ensuivent pour lui redonner un nouveau visage, la belle-fille du Président de la République passe ses diplômes de transport public et d'hélicoptère, avant de devenir en 1951 pilote d'essai.

Un nom associé à jamais à l'histoire de l'aviation

Première femme à réussir dans cette discipline jusque là exclusivement masculine, elle entre dans la légende en battant en 1952 le record du monde féminin de vitesse sur 100 km en avion à réaction à la vitesse moyenne de 855,92 km/h. Après être devenue, en 1953, la première Européenne à franchir le mur du son, Jacqueline Auriol portera finalement en 1963, au terme d'une intense bataille avec sa rivale américaine Jacqueline Cochran, le record du monde à 2030 km/h aux commandes d'un Mirage III R.     
Femme qui incarnait à la fois le charme, l'intelligence et le courage, Jacqueline Auriol trouva dans cette ardente et importante chasse au record tout autant une manière de se dépasser qu'une façon de participer avec son équipe, au redémarrage, après la guerre, de l'aéronautique française. Elle devint ainsi, en mars 1969, la première femme à voler, comme pilote d’essai, sur le Concorde.
Le nom de Jacqueline Auriol, décédée le 11 février 2000 à Paris, demeure à jamais associé à l'histoire héroïque de l'aviation en France.
Philippe Beauvery

Transcription

bruit
(bruit)
Durand
Affirmatif, j’ai l’autorisation de la tour.
Jacqueline Auriol
Zéro, terminé !
Durand
Au cas, vérifier aérofrein ?
Jacqueline Auriol
Aérofrein…
bruit
(bruit)
Durand
[Inaudible] vous êtes autorisée à rouler.
bruit
(bruit)
Jacqueline Auriol
Très bien, [inaudible].
bruit
(bruit)
Durand
Ok, [la boule] ok, vous me donnerez le top au lâché des freins.
bruit
(bruit)
Jacqueline Auriol
8400 tours, 680 T4, top, lâché des freins.
Durand
C’est parti !
bruit
(bruit)
Journaliste
Istres, dans ce Mirage IIIC, le pilote d’essai Jacqueline Auriol, guidé du sol par l’ingénieur Durand, tente de battre le record féminin de vitesse en circuit fermé que détient avec 1250 à l’heure l’américaine Jacqueline Cochran.
Durand
Vous allez monter comme ça jusqu’à 38000 pieds 2 fois 4.
Journaliste
Le circuit est de 100 kilomètres, un losange délimité au sol par des points géodésiques.
Jacqueline Auriol
Ok pour les cerveaux, l’oxygène bien.
Durand
Ok, les Mach, les souris ?
Jacqueline Auriol
5 – 1 bis, c’est…
Journaliste
L’avion peut atteindre Mach 2, à Mach 2, ce sera deux fois la vitesse du son, c’est-à-dire plus de 2000 à l’heure.
Jacqueline Auriol
Pour le pétrole, les souris ont démarré [inaudible].
Durand
Oui, alors je pense que vous ferez le circuit à l’air libre, la verticale s’est dégagée.
Journaliste
Jacqueline Auriol en est à la sixième tentative depuis quelques jours, c’est la sixième fois que s’engage le dialogue entre elle et l’ingénieur Durand, mais cette fois-ci, ça a l’air de se présenter bien. Lui, du sol assure la sécurité de la femme pilote en contrôlant à chaque instant le niveau de carburant, on dit qu’ici, le pétrole qui baisse vertigineusement vite. 300 litres à la minute, 5 litres à la seconde, et plus la vitesse croît, plus la consommation augmente, et s’il n’y avait plus d’essence.... Maintenant, l’avion appartient au monde étrange des radars.
Inconnu 1
Azur 221 Cap 270, 2 7 0.
Journaliste
Le mirage a pris son élan, quitté la base, il est sur le circuit.
Inconnu 1
Cap 272, 2 7 2.
Journaliste
Il va falloir ne pas mordre sur les points géodésiques des virages, 100 mètres d’erreur à cette vitesse-là, c’est juste l’espace d’un instant.
bruit
(bruit)
Journaliste
C’est un travail d’équipe ce record, le pilote d’essai Jacqueline Auriol exécute ce que les metteurs au point ont conçu. Sa sécurité dans le ciel est due à l’ingénieur au sol, et dans le ciel les radaristes la guident.
bruit
(bruit)
Journaliste
La tentative proprement dite a commencé.
Inconnu 1
Azur 21 vous prenez 2 degrés à droite Cap 274, 2 7 4, Azur 21, 2 degrés à gauche Cap 272, 2 7 2.
Jacqueline Auriol
Ok, 272.
Inconnu 1
Azur 21, attention pour le top début de virage.
Journaliste
Dans les virages, il faut vaincre la formidable force centrifuge. Elle peut aller jusqu’à 3G, G est l’accélération de l’apesanteur. Dans un virage, le corps humain doit donc vaincre en plus deux à trois fois son propre poids.
Inconnu 1
Azur 21 diminuez, diminuez franchement.
Journaliste
Quand on vire, la vitesse décroît jusqu’à 1,8 Mach.
Inconnu 1
Azur 21, vous reprenez maintenant taux normal.
Journaliste
Mais dans les lignes droites elle remonte à Mach 2.
Inconnu 1
Azur 21, vous arrivez à 8 kilomètres de la sortie de base.
Journaliste
Derniers instants, les 100 kilomètres sont bouclés. Il va maintenant falloir se poser immédiatement, à vue, car il n’y a plus de pétrole que pour quelques instants.
bruit
(bruit)
Journaliste
Voilà, des années d’effort, quelques minutes de vol, l’exploit est réalisé. L’équipe arrive pour accueillir le pilote d’essai Auriol, oh, ce ne seront pas des acclamations délirantes de la foule. Le record c’est eux tous avec le Commandant Guillaume en tête et on ne s’applaudit pas soi-même. Déjà, ce vol c’est du passé, on se rappelle à peine qu’il avait fallu cinq tentatives que la bonne, celle que vous venez de voir, a été la sixième. Cette jeune femme blonde a battu le record à 1850 à l’heure, 600 de mieux que Jacqueline Cochran. Un nouveau record pour l’aviation française et un bouquet pour le pilote.