La foire aux livres de Bécherel
Notice
La commune de Bécherel, en Ille et Vilaine, a pour ambition de devenir une Cité du livre. Ce projet culturel est soutenu par l'association Savendouar. Dans ce cadre, l'association organise des foires aux livres.
Éclairage
A l'origine du projet "Bécherel, cité du livre", on trouve une association, Savenn Douar, le tremplin en français. Fondée en 1985 à l'initiative de Colette Trublet et de quelques uns de ses amis, cette association a pour but de créer une dynamique culturelle et économique dans le monde rural. Observant d'une part la concentration urbaine qui entraîne parfois des modes de vie stressants, et d'autre part la désertification des campagnes, ces néo-ruraux décident de mettre en œuvre des projets pour faire vivre de nouveau un village. Pour Colette Trublet, économie et culture ne sont pas antinomiques, mais, bien au contraire, sont complémentaires. L'association souhaite développer le concept d'entreprise culturelle pour créer une activité professionnelle, économiquement viable, ayant pour fondement la culture. En ce sens, Savenn Douar incarne la rencontre de deux tendances fortes de ce début des années 1980. Avec l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand, la culture devient une valeur positive et créatrice de sens. Le ministère de la culture tient une place importante au sein du nouveau gouvernement.
D'autre part, un mouvement de retour à la campagne est amorcé depuis le milieu des années 1970. Concrètement, l'association relie plusieurs personnes désireuses de s'investir dans un projet économique et culturel. Savenn Douar fonctionne comme un laboratoire d'idées et accompagne des individus pour l'élaboration d'une entreprise culturelle. Le concept d'entreprise culturelle s'appuie sur la notion de solidarité mais aussi sur l'autonomie des personnes. Le projet est aussi soutenu par l'envie de "vivre autrement en Bretagne". C'est donc à Bécherel que s'établit l'association en reconnaissant l'intérêt de ce village. Bécherel est en effet à la croisée de plusieurs grandes villes (Rennes, Saint Brieuc, Saint Malo, Dinan). L'attraction touristique de la côte nord est un atout géographique non négligeable. D'autre part, en 1986, la situation du parc immobilier à Bécherel est plus qu'intéressante. Des maisons sont à l'abandon et donc peu onéreuses. Enfin, Bécherel est un site officiellement reconnu touristiquement, puisqu'il fait partie des "petites cités de caractères". En 1986, un premier projet fait figure de coup d'essai. Une des adhérentes de l'association ouvre une crêperie, "An Duchenn Hud". Savenn Douar propose d'animer le lieu. C'est principalement autour de la culture bretonne que se construit la programmation. Pour Colette Trublet, la culture bretonne est une ressource importante. Elle incarne une forme de résistance à un ordre établi. C'est un combat mené dans la créativité, comme celui que souhaite entreprendre Savenn Douar.
C'est autour du livre, objet culturel mais aussi commercial que l'entreprise culturelle émerge à la fin des années 1980. Savenn Douar veut implanter une librairie à Bécherel. Mais très vite, de simple librairie, l'entreprise se transforme en cité du livre. C'est après une visite à Redu, en Belgique, qui mène une expérience similaire, que l'association lance l'idée pour Bécherel. Il ne s'agit pas de juxtaposer plusieurs librairies, mais de réfléchir à la manière dont on peut en faire un réseau et les inscrire dans une forme de solidarité. Le choix se porte sur les livres anciens. Pour attirer les clients, l'association met en place des manifestations culturelles. Elles sont conçues comme des supports de communication. Chaque année, Savenn Douar lance un thème qui accompagne la foire aux livres.
La manifestation est aujourd'hui reconnue, subventionnée et apporte une certaine notoriété à Bécherel. Les retombées économiques sont au rendez-vous, et le concept se diffuse. A quelques kilomètres de Bécherel, Bazouges la Pérouse est devenu en 1994 un site d'expérimentation artistique. La culture est pensée comme une ressource économique pour le monde rural. Ce n'est pas sans poser des questions, notamment sur l'implication des populations résidentes dans ces petites villes. Au-delà de l'animation annuelle du bourg, à qui s'adressent ces entreprises culturelles ?