Le dernier teilleur de lin
Notice
Il y a 20 ans encore, la culture de lin était répandue en Bretagne en particulier dans les Côtes-d'Armor. Dans ce département, on en a compté jusqu'à 130 teilleurs de lin. Rares sont maintenant les agriculteurs à le cultiver. Aujourd'hui, il n'en reste qu'un seul, François Moullec, à Saint Laurent de Begard. Tout proche de la retraite, il raconte son histoire et nous montre comment il travaille.
Éclairage
Profondément implantée en Bretagne à partir du XVIème siècle, l'industrie toilière a fait la prospérité économique de la région. L'économie locale vit durant plusieurs siècles au rythme de la production artisanale des toiles de lin par les paysans-tisserands. Sur la bordure littorale, au favorable climat doux et humide, est cultivé un lin apprécié pour sa très bonne qualité. Les toiles de lin produites dans le Trégor sont alors reconnues comme les meilleures de toute la Bretagne. On peut citer notamment les « crées » qui firent la renommée du Léon au XVIIème siècle.
Après cet apogée, la toilerie bretonne traverse une période de mutations à partir du début du XIXème siècle. Le nouveau contexte technique et économique impose une profonde restructuration de l'activité et de nombreuses toileries manuelles bretonnes sont vouées à disparaître. Les producteurs de lin qui se maintiennent, particulièrement en pays Trégor et Goélo, ont recours à la mécanisation.
Le teillage est un savoir-faire à la rencontre de l'activité rurale et la production industrielle qui s'impose entre 1840 et 1860. Les producteurs de lin en combinent la culture avec l'activité mécanique de teillage au sein de véritables entreprises qui font travailler parfois des centaines d'ouvriers. On a recensé 130 entreprises de teillages vers 1860 dans la région. Le teillage hydraulique, alternative à la machine à vapeur, a rendu par ailleurs nécessaire la construction de moulins sur le Trieux ou le Léguer.
L'industrie toilière bretonne disparaît presque entièrement vers 1950. Au lendemain d'un siècle d'activité ancrée sur le territoire, les teilleurs de lin cessent progressivement leur production. François Moulec, le dernier d'entre eux, témoigne en 1978 de ce savoir-faire original, aux marges du secteur industriel, qui illustre la profonde adaptation économique des activités des paysans du Trégor.
Pauline Jehannin - CERHIO – Université de Rennes 2
Bibliographie :
ANDRIEUX, Jean-Yves, GIRAUDON, Daniel, Teilleurs de lin du Trégor, 1850-1950, Skol Vreizh, 1990.