Cyclisme : les Six jours de Grenoble
Notice
Pour la troisième édition des Six jours de Grenoble, place à l'accordéon qui est à l'honneur cette année. La musique donne un côté festif à cette compétition et accompagne les efforts des cyclistes sur piste.
- Rhône-Alpes > Isère > Grenoble
Éclairage
En 1972, la troisième édition des Six jours cyclistes de Grenoble se déroule dans le Palais des sports achevé cinq ans plus tôt en vue des Jeux olympiques de 1968. L'initiative en revient à la municipalité grenobloise socialiste d'Hubert Dubedout, dont les investissements considérables pour l'accueil de ces Jeux d'hiver ont rendu urgente la nécessité de rentabiliser les équipements construits pour l'occasion. Georges Cazeneuve, premier directeur de publication du Dauphiné Libéré, est sollicité à cet effet : convaincu de l'attractivité du cyclisme, celui à qui l'on doit par ailleurs la création du Critérium du Dauphiné libéré, reprend alors l'idée d'une course sur piste de six jours, opposant des équipes de cyclistes selon un système de relais, sur le modèle que Paris avait inauguré dès avant la Première Guerre mondiale sur le « Vel d'hiv », avant de l'abandonner en 1958.
Après deux essais en 1971, l'épreuve grenobloise prend son rythme de croisière l'année suivante ; c'est le moment choisi par les Actualités régionales pour en offrir un reportage qui, au son de l'accordéon, insiste moins sur les coureurs eux-mêmes que sur le spectacle familial offert par ceux et celles qui le regardent depuis le centre de la piste. Car l'épreuve, qui conjugue performance sportive et numéros de cabarets, tient du show à l'américaine, tout en développant une atmosphère provinciale, populaire et « franchouillarde » manifeste. Anonymes et notabilités locales, voire nationales, s'y croisent. Le reportage s'attarde d'ailleurs sur Lily Fayol, chanteuse à succès des années 1940 et dont l'intérêt pour la course n'est peut-être pas étranger au fait qu'elle soit mariée au champion cycliste Maurice Roux. Par ailleurs, tout comme la manifestation qu'il donne à voir, le reportage n'échappe pas à quelques longueurs. Les coureurs tournent sur la piste dans un relatif anonymat, pendant qu'au milieu, les serveurs vêtus de blanc circulent entre les tables, distribuant des verres de beaujolais ou des tasses de café aux spectateurs qui attendent leur repas dans une ambiance quelque peu enfumée. Pour tous, l'animation est pourtant le maître-mot. Sur la piste, elle consiste à intégrer ponctuellement des éléments destinés à rompre la monotonie de la course : sprints, défis divers, épreuves de sur-place, etc. Au centre, elle repose en 1972 sur le savoir-faire de l'animateur vedette Jean Dongues (Emile Domergue de son vrai nom) et le talent du musicien accordéoniste Marcel Azzola qui, de Barbara à Jacques Brel et de Juliette Gréco à Gilbert Bécaud, avait alors accompagné les plus grands noms de la chanson française.
Le « piano à bretelle », dont l'évocation même par le journaliste confirme l'intention de consacrer les six jours comme un spectacle populaire, a progressivement disparu mais, quarante ans plus tard, cette course annuelle est toujours là, définitivement ancrée dans le patrimoine culturel régional entre épreuve cycliste et cabaret.