Surproduction d'abricots dans la Drôme

30 juillet 1992
01m 54s
Réf. 00400

Notice

Résumé :

Les producteurs de fruits de la Drôme ont manifesté dans les rues de Nyons, en y déversant des tonnes d'abricots. Ils réclament une augmentation des prix face à leur chute due à l'abondance de la récolte de cette année.

Date de diffusion :
30 juillet 1992
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Éclairage

Tel un leitmotiv, les émissions et reportages estivaux évoquent la question de la surproduction en fruits et légumes avec les images chocs des surplus jetés, aspergés d'essence par les producteurs. Plus que de surproduction, il s'agit de la rétribution des récoltes fixée à un prix non acceptable par les producteurs et surtout du différentiel très important entre le prix payé à la production et celui payé par le consommateur : un sujet qui s'inscrit dans la durée et qui concerne un certain nombre de productions végétales et animales.

Cette question est vive dans la région Rhône Alpes qui présente, en raison de la diversité de ses territoires, une agriculture à la fois spécialisée et variée : élevage bovin et ovin dans les massifs de montagne, élevage intensif (volaille, productions avicole, porcine et bovine) en plaine dans des entreprises agricoles associant à ces élevages la production classique (maïs, céréales, tabac ), au sein d'exploitations qui gagnent en taille au fur et à mesure de la déprise humaine agricole ; production spécialisée en fruits et légumes, favorisée par le climat et une longue tradition ; viticulture de qualité enfin, tirant partie de terroirs reconnus.

La fragilité des productions fruitières, très dépendantes de la météorologie, est une constante. Cette fragilité est renforcée par l'organisation de la production (qui a gagné en intensivité) et celle des marchés. En 1992 pour ces exploitations méridionales, aux concurrences classiques s'ajoute celle liée à l'ouverture de plus en plus large des marchés, spécialement celles des pays européens très actifs (Espagne, Italie notamment).

Le reportage du 30 juillet 1992 choisit un exemple moins attendu tant pour la production (les abricots) que pour le site retenu, Nyons. Cette ville est en effet plus connue pour ses olives et ses produits dérivés que pour les abricots, même si la caméra zoome sur un panneau publicitaire qui veut en signaler l'importance dans cette partie du département drômois. Les images classiques de monceaux de fruits déversés sont le plus souvent celles de pêches ou de pommes. Ici ce sont les abricots qui forment ces dômes d'envergure déposés dans sept espaces autour de la ville ou les masses étalées dans les rues. En même temps que le journaliste explique les raisons de cette manifestation - le différentiel de prix et la diminution constante du prix payé à la production, en raison d'une récolte trop abondante pour les marchés habituels et le blocage dans l'écoulement de la production-, les images classiques d'agriculteurs défilant sur leurs tracteurs alternent avec celles des amas de fruits jetés et écrasés. Toutefois, contrairement aux images d'autres reportages sur ces manifestations de la colère paysanne, le défilé reste ici mesuré. Pour un habitué de la région, il en évoque un autre : un corso qui aurait délaissé les classiques représentations fictionnelles et théâtralisées pour une représentation bien réelle de la société (dans le cadre du corso ce sont aussi des tracteurs qui tirent les chars). Le témoin interviewé, choisi en raison de sa position de représentant du collectif en colère, est filmé de manière peu valorisante, comme souvent pour le monde agricole. En revanche, le commentaire lui semble comprendre les raisons d'une manifestation qui cible le pouvoir (la sous-préfecture) et les intermédiaires (le marché) mais s'allie la population en distribuant gratuitement ce fruit goûteux mais souvent très coûteux pour le consommateur.

Anne-Marie Granet Abisset

Transcription

Présentateur
Des abricots dans les rues de Nyons. Une centaine de producteurs du sud de la Drôme a manifesté ce matin pour exprimer son inquiétude face à l’effondrement du prix des abricots, du prix à la production. Car si le kilo d’abricot atteint 20 francs à Paris, il est payé seulement 1 franc 50 aux agriculteurs, soit deux fois moins que l’an passé.
Journaliste
Depuis hier, les abricots produits dans la région de Nyons prennent une nouvelle destination. Les champs en friche, décharges improvisées des surplus abricotiers. 150 tonnes en 24 heures rien que pour ce stock, il y en a 7 ainsi, répartis tout autour de Nyons. Aujourd’hui, au pays des abricots du soleil comme ils l’ont écrit à l’entrée de la ville, les producteurs dénoncent la chute catastrophique des prix face à l’abondance de la récolte. Pour chaque kilo retiré du marché avant le premier août, la Communauté Européenne assure aux producteurs 1,48 francs du kilo. Trop faible selon la coordination de producteurs de Nyons, le coût de revient est actuellement de 3,50 francs.
Roger Viarsac
Notre première revendication un prix minimum pour l’abricot qui correspond au coût de revient qui représente 3,50 francs le kilo d’abricots. A l’heure actuelle, les ventes ça fait sont autour de 1 franc, 1,20 franc. Donc la première revendication c’est 3,50 francs le kilo impérativement.
Journaliste
Pour tenter de se faire entendre, la centaine d’agriculteurs qui envahit ce matin le marché de hebdomadaire de Nyons, a alterner les gestes. Des cadeaux pour les badauds, des kilos pour la sous-préfecture où une rencontre est prévue en soirée avec le représentant de l’Etat. Quant à l’abricot, il se vendait ce matin au marché de Nyons selon son calibre, 5 ou 6 francs le kilo. Un prix tout théorique pour le commerçant, difficile pour lui de faire des affaires face à l’abondance de la concurrence.
(Bruit)