Les joutes sétoises
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Résumé
Le tournoi régional de joutes à Sète fête ses 300 ans. A cette occasion, le musée de la ville organise une exposition rassemblant peintures, maquettes, estampes et costumes. Rythmé par le son du hautbois, le reportage alterne des images du tournoi, des vues de l'exposition, et des interviews de jouteurs.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
20 juil. 1966
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Contexte historique
ParDocteur en sociologie
Les joutes languedociennes (dénommées volontiers « joutes sétoises » au pied du mont Saint-Clair) sont l’une des méthodes de joutes nautiques qui existent dans plusieurs régions de France : en Provence, dans le Lyonnais ou encore dans le Nord. Chacune de ces méthodes se distingue par des particularités touchant aux barques et aux instruments utilisés : des lances, comme ici, mais aussi bien des perches flexibles, beaucoup plus longues, dans la vallée du Rhône ou le bassin parisien. Cette diversité est propre aux mécanismes de diffusion des jeux anciens que n’unifie aucune autorité centrale. Elle explique aussi les difficultés des sociétés de joutes, tout au long du XXe siècle, à se rassembler en fédération sportive unique, malgré l’impulsion venue de Lyon. Plusieurs tentatives infructueuses ont précédé la naissance de l’actuelle Fédération française de joutes et de sauvetage nautique qui regroupe une centaine de sociétés en France, réparties entre quatre Ligues régionales [1].
Le reportage de 1966 dresse un portrait des joutes dans leur ancrage historique, ensemble de rituels festifs qui miment les tournois médiévaux [2]. Le défilé des jouteurs, l’ordonnancement du tournoi obéissent plus à la tradition orale qu’à un règlement écrit, réduit au minimum à cette époque. A Sète tout particulièrement, l’aspect spectaculaire des joutes est revendiqué par la ville qui, depuis le milieu du XIXe siècle, y voit l’occasion d’attirer les curieux (puis les touristes). Depuis le début du XXe siècle, selon le modèle des sports naissants, les jouteurs se sont organisés en clubs locaux, les sociétés de joutes, qui sont une vingtaine réparties entre Sète et les villes voisines, de Valras au Grau-du-Roi sur le littoral, et autour de l’étang de Thau. Elles organisent leur tournoi annuel qui s’inscrit dans le calendrier de la saison. Ce sont elles aussi qui font fabriquer leurs deux barques, la bleue et la rouge [3], ainsi que les accessoires indispensables que sont les lances et les pavois (boucliers) en bois. Les barques sont ainsi d’origine et de construction diverses, souvent des bateaux de pêche réaménagés, et menés par un barreur et huit ou dix rameurs, la seule contrainte étant qu’elles forment une paire homogène. Les sociétés embauchent également les joueurs de hautbois et de tambour [4].
L’histoire des joutes languedociennes est scandée par l’événement majeur annuel que constitue depuis près de trois siècles le tournoi de la Saint-Louis, disputé fin août sur le canal royal de Sète. Le lundi est le jour du tournoi des poids lourds, celui des hommes forts. L’histoire a retenu quelques noms, tels Aubenque « Le Terrible » vainqueur en 1740, et qui, dit-on, stoppa sa barque lancée à l’assaut d’un pont, arc-bouté sur sa lance ; Audibert, vainqueur à 8 reprises au milieu du XIXe siècle ; Joseph Martin, vainqueur 9 fois entre 1858 et 1877 ; et le plus célèbre d’entre eux, Louis Vaillé, « Le Mouton » , qui détient le record de 10 victoires entre 1904 et 1923. A partir de là s’imposent souvent les « Italiens » parmi lesquels Vincent Cianni dans les années 30-40, ou de nos jours Aurélien Evangelisti « Le Patron », 7 fois vainqueur au XXIe siècle. Assez significativement, le tournoi de la Saint-Louis n’est pas comptabilisé dans les compétitions officielles de la Fédération : il a son propre règlement et reste en tout point exceptionnel.
Les entretiens avec les jouteurs mettent en évidence les qualités nécessaires pour se maintenir sur la tintaine et faire plonger son adversaire. Si la force et la résistance à l’impact de la lance adverse sont d’évidence des atouts majeurs, d’autres qualités telles que l’adresse et le « coup d’œil », le sens de l’équilibre, sont indispensables au champion. D’autres compétences sont moins visibles au profane, en particulier pour le barreur qui conduit la trajectoire de la barque et doit la placer au mieux pour favoriser son jouteur.
Depuis 1966, la « sportivisation » des joutes s’est poursuivie dans plusieurs directions. Notons la précision croissante des règlements, tant dans l’organisation des compétitions que dans la protection des jouteurs contre les accidents. Il faut aussi mettre en évidence la création des écoles de joutes à Sète, Agde ou Palavas, qui permettent aux enfants de s’initier sur des chariots montés sur rails. Enfin, il est particulièrement significatif d’enregistrer depuis quelques années l’ouverture de la compétition aux femmes : durant la saison 2022, une quinzaine de jouteuses sont inscrites en particulier à la Jeune lance sétoise et à la Jeune lance sportive mézoise, et des tournois leur sont réservés dans le calendrier officiel.
[1] La ligue d’Occitanie accueille aussi une dizaine de sociétés de rame traditionnelle, dans l’Hérault ainsi que dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales.
[2] Les jouteurs sont encore aujourd’hui souvent désignés comme les « chevaliers de la tintaine ».
[3] Les sociétés les plus pauvres se contentent de les louer à l’occasion de leur tournoi.
[4] Le reportage est ainsi rythmé par les airs traditionnels des joutes, interprétés par Léon Larose au hautbois et Paul Vidal au tambour.
Bibliographie
- Jérôme Sagnard, Jean-Claude Caira, Les joutes en France. L’âge d’or, Rennes, éditions Alan Sutton, 2008.
- Ligue d’Occitanie de la FFJSN [en ligne] (Mise à jour 04/2022). Site internet : https://www.ligue-jouteslanguedociennes.com/
Transcription
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