L'Indiade ou l'Inde de leurs rêves
Notice
En 1987, Ariane Mnouchkine met en scène, avec la troupe du Théâtre du Soleil, L'Indiade ou l'Inde de leurs rêves d'Hélène Cixous. La pièce représente l'histoire de l'indépendance de l'Inde et du Pakistan et les conflits qui accompagnèrent la Partition. Extraits du spectacle, interviews de la metteuse en scène et de l'auteur.
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Éclairage
En 1987, Ariane Mnouchkine met en scène, avec la troupe du Théâtre du Soleil, L'Indiade ou l'Inde de leurs rêves d'Hélène Cixous. Cette dernière, née en 1937, professeur, écrivain, auteur dramatique et critique littéraire, avait déjà collaboré avec Ariane Mnouchkine en 1985 en écrivant, pour elle et ses comédiens, L'Histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk, roi du Cambodge. Les deux femmes artistes travailleront ensuite régulièrement ensemble.
Le projet de la pièce naquit en 1984, après l'assassinat d'Indira Gandhi, Première ministre de la République d'Inde et fille de Jawaharlal Nehru, premier Premier ministre du même pays. Le texte relate les événements d'une décennie capitale dans l'histoire de l'Inde. Il s'ouvre après les élections de 1937 aux assemblées provinciales, dont le Parti du Congrès sort vainqueur. Il s'achève après l'assassinat du Mahatma Gandhi le 30 janvier 1948. La pièce représente le cheminement de tout un pays vers son indépendance et sa division. Elle revient particulièrement sur l'histoire de la Partition de l'Inde qui vit le partage en deux nations des territoires des anciennes colonies des Indes britanniques. Cette partition s'accomplit avec l'indépendance, le 14 août 1947, du Dominion du Pakistan et celle, le 15 août 1947, de l'Union indienne. Elle fut précédée de violents affrontements intercommunautaires et suivie d'un exode de dix millions de personnes. L'année de leur indépendance, les deux Etats entrèrent en guerre.
La pièce et la mise en scène donnent une interprétation de l'union et de la division de tout un peuple. Le spectacle fait ainsi dialoguer la joie et le deuil, la paix et la guerre. La figure de Gandhi, qui s'opposa à la Partition, illustre ici une pensée qui prône « l'amour (...) au-delà de la politique et de la religion ». Le spectacle questionne l'idéalisme et l'engagement spirituel des grands hommes aux prises avec les réalités historiques et politiques. En racontant l'histoire d'une passion à l'échelle d'un pays, il propose une réflexion sur les contradictions de l'humain. Le reportage, diffusé lors du « Journal de la nuit » (Antenne 2) du 1er octobre 1987, laisse parler l'auteur et la metteuse en scène qui reviennent toutes deux sur l'universalité de cette histoire.
Transposée à la scène, celle-ci comprend une cinquantaine de personnages. Certains sont des « acteurs historiques » de l'Inde et du Pakistan. Sont ainsi représentés « le Parti du Congrès et ses proches » (dont Nehru interprété par Georges Bigot, Gandhi interprété par Andrés Pérez Araya, Badshah Khan interprété par Simon Abkarian) et « la Ligue Musulmane et ses proches » (dont Mohamed Ali Jinnah interprété par Jean-François Dusigne), mais aussi des figures représentant « les Provinces » ou encore « l'Angleterre ». Nombreuses sont également les figures « populaires », habitants de New Delhi, du Punjab et d'autres régions, qui offrent un point de vue original sur les événements.
Dès l'accueil des spectateurs est affirmée l'ambition pédagogique du projet : chacun peut consulter, en entrant dans le Théâtre du Soleil, une carte des territoires, une présentation chronologique de l'histoire ou une biographie des personnages dont il est question. Cependant, le spectacle ne prétend pas être le fruit d'un travail historiographique. Il donne à voir et à entendre, pendant cinq heures, la traduction théâtrale des événements évoqués plus haut. L'espace (conçu par Guy-Claude François), gigantesque et lumineux, reconstitue une place publique indienne qui se métamorphose régulièrement en divers intérieurs. La musique (composée par Jean-Jacques Lemêtre) est omniprésente. La posture des corps et les modulations des voix ont été spécifiquement travaillées pour représenter ces figures indiennes.