Les Aiguilles et l'opium, de Robert Lepage, à la Comédie de Saint-Etienne
Notice
En 1995, la Comédie de Saint-Etienne accueille le spectacle de l'artiste québécois Robert Lepage, Les Aiguilles et l'opium. Pour traduire la fantasmagorie d'un artiste canadien séjournant à Paris, la mise en scène fait dialoguer poésie, acrobatie, jazz et cinéma. Extraits du spectacle et interview de Marc Labrèche, comédien.
Éclairage
Né en 1957, Robert Lepage est un metteur en scène de théâtre et d'opéra, un scénographe, un auteur, un acteur, et un réalisateur québécois. Mondialement reconnu, il invente un théâtre qui s'affranchit des frontières disciplinaires et artistiques et fait appel aux nouvelles technologiques ainsi qu'aux arts de l'image. Proposant une nouvelle approche de l'écriture scénique, il est l'auteur, depuis 1984, de onze spectacles qu'il a lui-même mis en scène. La Trilogie des dragons, créée en 1985, marque son premier succès international.
En 1991, l'artiste canadien crée Les Aiguilles et l'opium qui est accueilli l'année suivante à Paris par le Festival d'Automne (représentations au Centre Georges Pompidou). Dans la version originale, Robert Lepage, qui a également conçu la scénographie, interprète le personnage unique (et autobiographique) du spectacle. En 1994 est reprise la pièce avec Marc Labrèche pour comédien. Le reportage, diffusé lors du Journal Régional de France 3 Rhône-Alpes du 6 novembre 1995, a lieu lors de la tournée européenne du spectacle qui est notamment représenté à la Comédie de Saint-Etienne et au TNP de Villeurbanne.
La pièce traduit les tourments intérieurs d'un artiste québécois séjournant à Paris en 1989. Sa rupture amoureuse vient faire écho aux amours et à la toxicomanie de Miles Davis et de Jean Cocteau qui, quarante ans plus tôt, se croisèrent dans le ciel : l'un allait aux Etats-Unis, l'autre en France, et chacun devait se trouver bouleversé par l'expérience transatlantique qui les attendait. Véritable jeu avec le temps et la géographie, la représentation multiplie les références historiques, qu'il s'agisse d'extraits de la Lettre aux Américains de Cocteau écrite en 1949, ceux d'Ascenseur pour l'échafaud que Louis Malle réalisa en 1958 et dont Miles Davis composa la musique, ou encore les évocations de Jean-Paul Sartre et Juliette Gréco.
Marc Labrèche est seul en scène accompagné par un manipulateur. Il joue alternativement les rôles de Miles Davis, de Jean Cocteau et de Robert, l'artiste québécois. Relié à un dispositif de poulies, il s'élève dans les airs et livre une performance d'acrobate devant un écran. Le spectacle mêle en effets différents arts et médias, qu'il s'agisse du théâtre, de la poésie, du cinéma, de la musique ou de la photographie. La scénographie apparaît ici comme une écriture à part entière. Projecteur et rétroprojecteur font de l'écran un partenaire du comédien. Les images, les effets sonores, les jeux d'ombres et de miroir composent une même fantasmagorie, celle de l'artiste qui toujours rêve d'élévation.