Eric Rohmer met en scène Catherine de Heilbronn de Kleist

08 novembre 1979
02m 44s
Réf. 00061

Notice

Résumé :

En 1979, Eric Rohmer présente sa première mise en scène à la Maison de la Culture de Nanterre. Il s'agit de Catherine de Heilbronn, adapté de la pièce de Heinrich von Kleist. D'influence romantique, le drame représente l'amour absolu entre deux êtres qui ignorent tout l'un de l'autre. Reportage pendant les répétitions et interview du metteur en scène.

Date de diffusion :
08 novembre 1979
Fiche CNT :

Éclairage

Né en 1777 et mort en 1811, Heinrich von Kleist était un romancier, un essayiste et un dramaturge allemand. Il est l'auteur de huit pièces de théâtre. Son œuvre est à rattacher au mouvement du Romantisme allemand. Publié en 1810, La Petite Catherine de Heilbronn est un drame en vers et en prose constitué de cinq actes. Il représente la rencontre, la reconnaissance et l'amour entre Frédéric Wetter, Comte de Strahl, et la jeune Catherine. Le principal acteur de la pièce se révèle être la vision transcendantale propre au rêve.

En 1979, Eric Rohmer traduit, adapte et met en scène le texte sous le titre Catherine de Heilbronn. Le journal régional d'Ile de France (FR3) du 8 novembre 1979 présente un reportage sur les répétitions de la pièce dont la première représentation aura lieu le lendemain à la Maison de la Culture de Nanterre, dans le cadre du Festival d'Automne. Le metteur en scène retrouve Heinrich von Kleist après avoir adapté, pour le cinéma, La Marquise d'O... en 1976. Il a choisi de traduire le texte en vers libre et de n'en privilégier que la partie « romantique » qui met en jeu les trois personnages principaux : Frédéric, Catherine et Cunégonde de Thurneck, l'autre prétendante de Frédéric. Le Moyen Age selon Kleist est très différent de celui de Chrétien de Troyes. L'iconographie du spectacle s'éloigne considérablement de celle du film Perceval le Gallois réalisé par Rohmer en 1978. Elle se rapproche davantage de celle des contes de fées. De cet imaginaire, Yannis Kokkos s'est inspiré pour concevoir la scénographie. Il a également dessiné, avec Nicole Geraud, les costumes. La distribution de la pièce reprend en grande partie celle de Perceval. Seul Pascal Greggory, qui interprète Frédéric, n'avait pas participé au tournage du film. Pascale Ogier joue, quant à elle, le rôle de Catherine et Arielle Dombasle celui de Cunégonde.

Après avoir été professeur de lettres, écrivain, critique de cinéma puis réalisateur, Eric Rohmer présente sa première mise en scène de théâtre. Son travail au cinéma avait cependant déjà croisé celui de la scène au moment, notamment, des répétitions de Perceval. Le réalisateur semble en apparence aborder avec facilité le travail sur un spectacle qu'il souhaite avant tout visuel et plastique. Il revendique la réconciliation entre théâtre et cinéma, les deux arts pouvant contribuer mutuellement à leur réinvention respective.

Marie-Isabelle Boula de Mareuil

Transcription

Présentateur
Eric Rohmer. Eric Rohmer, quinze ans de cinéma derrière lui, il a signé Ma Nuit chez Maud, La Marquise d’O... Maintenant, Eric Rohmer s’aventure sur les planches, il a décidé de monter une pièce à la maison de la culture de Nanterre. C’est Catherine de Heilbronn, le titre de cette pièce de Heinrich Von Kleist. Première représentation demain.
Eric Rohmer
Bon, alors, mettez-vous à vos places.
Marie-Claire Gauthier
Pour Eric Rohmer, Heinrich Von Kleist n’est pas un inconnu, il avait en 1973 adapté et tourné La Marquise d’O... du même auteur allemand. Avec Catherine de Heilbronn écrit en 1810, Eric Rohmer retrouve sa vieille passion du verbe, il fut professeur de Lettres avant d’aborder le cinéma et découvre un monde inconnu, le théâtre.
Eric Rohmer
Je voudrais qu’il y ait de la musique ici. On pourrait peut-être demander d’arrêter la musique. Je ne prétends pas révolutionner le théâtre. Pour moi, c’est un exercice, j’ai pris une pièce qui me paraissait facile. Ça m’est plus facile pour moi de mettre en scène Catherine de Heilbronn, qui par certains cotés peut ressembler au cinéma, parce que c’est un spectacle dans lequel il y a beaucoup d’éléments plastiques, d’éléments… il y a beaucoup d’images et en même temps, il y a une description des personnages, des caractères qui n’est pas théâtrale, qui est attentive aux petits faits, qui est très quotidienne. Alors c’est plus facile pour moi de m’attaquer à une pièce comme cela et qui d’ailleurs ,d’autre part a le privilège de n’être pas connue, qu’à des grands chefs d’œuvre du théâtre classique comme Shakespeare, comme Molière, etc. Là, effectivement, j’hésiterais.
Comédienne
Et puis, que croyez-vous, en dépit de la flamme, le château, comme un roc…
Eric Rohmer
Le théâtre paraît pour quelqu'un qui a fait du cinéma quelque chose tout d’abord assez facile, il n’y a pas de véritables problèmes spécifiques semble-t-il, les véritables problèmes sont ailleurs, ils sont sincèrement plus secrets et je ne les ai pas encore affrontés.
Marie-Claire Gauthier
Mais est-ce que vous pensez que votre théâtre ressemble à votre cinéma ?
Eric Rohmer
Je n’en sais rien, enfin, c'est très difficile de, c’est très difficile de définir ces choses là, je ne sais pas. En fin de compte tout ce que je peux dire c’est qu’il est étonnant qu’en France, les metteurs en scène de cinéma ne fassent pas du théâtre, alors qu’ils le font dans tous les pays. Ce sont deux activités qui en fin de compte, se ressemblent beaucoup, c’est toujours de la mise en scène. Bon, et bien allez-y, vous pouvez partir.
Comédien
Ma Cunégonde !
Comédienne
Le portrait que vous m’avez donné, Frédéric, le beau portrait de vous, glissé dans un étui, est resté là-bas dans le feu, sauvez-le !
Comédien
Laissez-le, laissez-le, ne m’avez-vous pas, moi ?
Comédienne
Le portrait dans l’étui, le vôtre Frédéric, vite, envoyez quelqu’un.