Les Perses d'Eschyle, film de Jean Prat
Notice
Interviews télévisées du réalisateur, Jean Prat, et du compositeur de la musique, Jean Prodromidès, accompagnées d'images du film. Jean Prat insiste sur l'absence de psychologie dans la tragédie grecque, mais récuse toute idée de reconstitution historique : la musique comme les masques ont cherché à souligner la violence et l'étrangeté de ce théâtre.
Éclairage
Apparue au cours des années 530 av. J.-C. et jouée au cours de la fête des Dionysies, la tragédie est le genre théâtral occidental le plus ancien en Grèce. Ne comportant originellement qu'un chœur et un acteur, elle se voit progressivement augmenter de deux autres acteurs et voit l'importance des parties dialoguées augmenter au cours de la période classique au détriment des chants du chœur. Structurée par leur alternance, la tragédie donne à voir la plupart du temps des personnages de la mythologie, plus rarement de l'histoire grecque, et ses effets spectaculaires sont dominés par la thématique du deuil.
Eschyle est le premier des trois grands auteurs tragiques dont les pièces nous soient parvenues. Les Perses, la plus ancienne tragédie conservée, raconte la victoire grecque de Salamine du point de vue des vaincus, huit années seulement après l'événement, auquel Eschyle lui-même participa. Il s'agit donc d'une pièce à part dans l'œuvre du dramaturge : au lieu de célébrer des personnages grecs, issus d'une mythologie ancienne, le chœur tragique chante le deuil de la puissance perse, principale rivale des cités grecques, et dépeint le roi Xerxès sous les traits funestes d'un héros frappé d'hybris.
Le film réalisé par Jean Prat en 1961 pour la télévision avait pour ambition de rendre l'œuvre d'Eschyle accessible au plus grand nombre en ayant recours à un travail d'adaptation avant-gardiste et exigeant. Le tournage mobilisa d'importants moyens : décors monumentaux et stylisés en polystyrène, éclairages puissants afin de produire des effets de lumière marqués, masques hiératiques inspirés des bas-reliefs persans du Louvre. Scandé par la musique de Jean Prodromidès, le film se présente comme un oratorio méditatif aux accents rituels. La force de l'ensemble fut renforcée par une diffusion à la fois télévisuelle et radiophonique, qui utilisait pour la première fois la technique de la stéréo.