Reprise de La Perle du Bengale au Cirque d'Hiver
Notice
Sur le fronton du cirque d'hiver est annoncée « L'Opérette féérique et nautique : La Perle du Bengale », reprise d'une féérie de 1936. Des extraits de ce spectacle narratif, mêlant cirque et théâtre, donnent un aperçu du luxe déployé dans la piste du Cirque d'Hiver équipée d'une piscine.
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Éclairage
Sur le fronton du cirque d'hiver est annoncée « L'Opérette féérique et nautique : La Perle du Bengale », avec en vedettes Edouard Kriff (Joseph Edouard Krihiff), ténor d'opéra (1905-1966), Janine Grenet, actrice et chanteuse et Armand Mestral (Armand Serge Zelikson), acteur et chanteur (1917-2000).
En fait, il s'agit de la reprise d'une des fééries que le Cirque d'Hiver a produites entre les deux guerres ; ce genre né au théâtre au XIXe siècle, dont Théophile Gautier disait : « C'est une symphonie de formes, de couleurs et de lumières, dont l'éblouissement suffit à faire une soirée agréable en enlevant aux arides et aux prosaïques soucis de la réalité les âmes fatiguées d'une vie monotone » [1].
La Reine de la Sierra (1935), La Perle du Bengale (1935), La Princesse Saltimbanque (1936), Les Aventures de la Princesse de Saba (1938) marquent un "style" Bouglione utilisant les moyens techniques modernes au service d'une trame simple et souvent la même. En l'occurrence : « l'action se passe en Inde. La Perle est la fille d'un Maharadjah, vendue sur un marché aux esclaves. Le décor reconstitue une partie d'un palais, en carton-pâte imitation marbre. Le premier tableau montre un souk oriental regorgeant de fruits, le suivant présente des numéros de cirque en situation où jongleurs et dompteurs viennent distraire le nabab. Repoussé par la princesse, ce dernier ordonne qu'elle soit jetée aux serpents. La piscine, remplie d'une centaine de boas et de pythons, reçoit la princesse et d'autres condamnées hurlant, se débattant avec les reptiles enserrés autour de leur corps ! Une cavalcade suit et c'est finalement le triomphe du bien sur le mal » [2].
Pour la version de 1954, le livret est des Frères Bouglione et les parties chantées sont de Jean Loysel et Loulou Gasté (Louis Gasté, 1908-1995) dont certaines resteront dans le répertoire d'Armand Mestral ou seront interprétées par Line Renaud, notamment Caravane dans la nuit. Géo Sandry (Gabriel Bleinat) (1897-1975), metteur en scène au Cirque d'Hiver depuis 1933, a confié à Henry Thétard que le projet consistait à « combiner l'opérette avec le mélodrame » mais reconnait que « le mélo s'est révélé difficilement compatible avec la piste. » Une dimension comique est introduite par des clowns de renommée, entre autres, le trio Fratellini (Les Fratellini en Afrique en 1933 et Les Diamants du Radjah en 1934) et, par la suite, Achille Zavatta.
Quant au luxe spectaculaire, il précise que l'indispensable décoration « ne doit pas s'inspirer du clinquant du music-hall mais se rapprocher de l'optique et de la technique théâtrales, sauf pour les scènes de féérie ». L'emploi de nombreux choristes et figurants participent à la reconstitution qui se veut historique, et la présence des animaux contribue « beaucoup à l'originalité de ces spectacles que les auteurs se plaisent à situer sous toutes les latitudes » [3]. En effet et paradoxalement, l'exotisme est recherché dans un contexte marqué par la dernière exposition coloniale de 1931 et alors que se prépare le processus de décolonisation.
Fin 2011, les Bouglione mettent de nouveau à l'affiche La Perle du Bengale et annoncent : « 80 Artistes – 200 Costumes - Le plus grand troupeau d'éléphants d'Europe – 30 Chevaux - Le plus impressionnant groupe de Fauves du moment - Le Grand groupe d'animaux exotiques - Et toutes les attractions du Cirque que le public attend : Clowns, trapézistes, acrobates ,magiciens... Des moyens colossaux mis en œuvre par les Bouglione dans le seul but de faire vivre à toutes les familles un moment inoubliable plein de rêve et d'émerveillement. »
[1] Théophile Gauthier, Histoire de l'art dramatique en France depuis 25 ans, Tome II, Edition Hetzel Librairie Magnin, 1858-1859, p. 109.
[2] Sampion Bouglione et Marjorie Aiolfi, Le Cirque d'Hiver, Paris, Flammarion, 2002, p. 136.
[3] Henry Thétard, La Merveilleuse Histoire du cirque, réédition de l'édition de 1947, augmentée d'un texte de L.-R. Dauven (« Le Cirque depuis la guerre »), Paris, Ed. Julliard, 1978, p. 483.