Archaos, Cirque de Caractère

19 novembre 1988
02m 13s
Réf. 00542

Notice

Résumé :

Archaos présente Le Chapiteau de cordes. Des extraits du spectacle permettent d'apprécier l'esprit déjanté de la compagnie qui mêlait mécanique et poésie. Ainsi, parmi d'autres, Lolo (Laurent Serre) en virtuose jongleur acceptant la dérision, Franz Clochard, sur sa moto ascensionnelle, Pierrot Bidon et Patou (Patrick Brunet) en clown de tôle posent un regard critique sur la société contemporaine.

Date de diffusion :
19 novembre 1988
Source :
A2 (Collection: MIDI 2 )

Éclairage

En janvier 1986, peu de temps après avoir quitté le Cirque Bidon, Pierrot Bidon et Martine Leroy (alors mariés) décident de réunir sous un même chapiteau des artistes de rue et de cirque. Les créations sont collectives, chacun apportant son univers et ses savoir-faire dans un bouillonnant travail pour donner corps et vie tumultueuse à Archaos, cirque de caractère [1]. Franco Dragonne est le premier metteur en ordre de cette cacophonie collective. Par la suite, Michel Dallaire met en scène Le Chapiteau de cordes (1987) et Le Chapiteau de cordes 2 (1988). En construisant une entité cohérente, par le recours à la fragmentation où les différents éléments se superposent, se juxtaposent, il imprime une poétique du contraste. Les artistes, qui ne sont encore que des caractères, articulent leur proposition autour d'un thème (la solitude, la violence...) et sont plongés dans un univers, où s'exposent des instants de vie quotidienne, gais ou graves, et dans lequel se manifeste déjà la fureur concrète et symbolique des engins motorisés.

L'espace de la piste devient rapidement inadapté à la force du contenu. Il devient carré avant d'adopter une forme rectangulaire, scène de plusieurs dizaines de mètres balayé par les allées et venues de véhicules à moteur (motos, automobiles, poids-lourds), brisant ainsi le cercle considéré par les puristes comme un fondamental indépassable. Progressivement la linéarité discursive s'impose, favorisant le développement d'un processus de théâtralisation qui reste cependant aléatoire. Ainsi, les successions intempestives (et les tensions qu'elles génèrent) des actions, des sons, des lumières et des odeurs multiplient les discontinuités, laissant à la charge du spectateur le soin de recomposer un cheminement signifiant.

Rapidement, Archaos se distingue par une esthétique destroy et s'impose sur d'importantes scènes mondiales rassemblant des millions de spectateurs et obtenant des prix prestigieux. Cette reconnaissance résulte du fait qu'Archaos développe un nouveau cirque, « de nouveaux exploits, une nouvelle poésie des images, une créativité inventive originale, le tout allié à une force de dérision débordante » [2]. Tel est le parti pris qui caractérise The last show on earth (1989), Bouinax (1990), BX-91, Beau comme la guerre et Metal Clown, le choc des cultures (1991), mis en scène par P. Bidon.

Cependant, les aléas de la vie circassienne (destruction d'un chapiteau, interruption d'une tournée) mettent en péril l'économie fragile liée à l'autoproduction et conduit l'entreprise (structuration économique rapidement adoptée) au dépôt de bilan. Guy Carrara, qui avait rejoint le groupe initial en 1987 et participé au développement de celle-ci, parvient malgré tout à proposer et mettre en scène Game Over (1995) ; premier spectacle de cirque à s'emparer des nouvelles technologies de façon complexe.

En 1996, Pierrot Bidon et sa seconde femme Ana Rachel de Andrade s'installent au Brésil [3]. Dès lors, Guy Carrara dirige seul la compagnie (Raquel Rachel de Andrade, son épouse [4], deviendra co directrice en 2001). D'In Vitro ou La Légende des clones (1999) à sa recréation en 2009, In Vitro 09, en passant par Margo (2003) et Parallèle 26 (2006), une évolution significative de l'esthétique de la compagnie se manifeste. Tout en maintenant une adéquation du dispositif scénique au contenu de la création, notamment par la construction de structures plus ou moins autonomes, voire autoportantes, le parti pris se caractérise par un abandon progressif des attributs propres à la théâtralisation, imprimant une épuration du style.

[1] Pour une découverte plus approfondie de l'histoire de la compagnie se reporter à Martine Maleval, Archaos, Arles, Actes Sud/CNAC, 2010.

[2] Pierrot Bidon, « Archaos et le cirque traditionnel », in : Archaos, cirque de caractère, Programme de Métal clown - BX-91, 1991, p. 12.

[3] L'année suivant, Pierrot Bidon crée le Circo Da Madrugada.

[4] Pierrot Bidon et Guy Carrara étaient beaux-frères.

Martine Maleval

Transcription

Jeune fille
Si Mickey ne vieillit pas, le cirque n’a pas cette chance, et pour tenter de lui redonner vie, et bien les gens du cirque cherchent d’autres formules. Il y a le cirque à l’ancienne comme celui de la famille Grüss, il faut y ajouter aujourd’hui le cirque Archaos, qui entend vivre dans son époque. Il propose donc des écuyers ou des écuyères à moto et des clowns qui n’ont de traditionnel que le nez rouge. Jean Marc Bramy, Philippe Menut.
Journaliste
Musique stridente et motos folles. Recréation d’une usine trépidante, voici un cirque d’un nouveau style, Archaos. Tous les ressorts classiques pratiqués sous le chapiteau sont pourtant là. Les acrobates possèdent la grâce, le dresseur, la prestance et l’humour.
(Musique)
Journaliste
Même la moto remplace le cheval, et le motard l’écuyère. Les artistes étrangers au monde du cirque pour la plupart, ont voulu ainsi renouveler la tradition avec trois maîtres mots : « tendresse, violence, » mais aussi « dérision ». Voici les clowns justement. Tôles ondulées, moitié guignol, moitié gladiateur, et avec eux tout bascule. La piste devient prétexte à la mise en scène d’un tableau sans concession de notre époque. A des années lumières de la féérie traditionnelle, Archaos nous revoie donc, brutalement l’image de notre civilisation urbaine et de ses tensions. Caricature ou fable à prétention philosophique ? A chacun de juger. En tout cas ça marche, impossible de rester indifférent face à un cirque, qui après avoir tourné en Grande Bretagne, en Belgique et en Allemagne, revient poser son chapiteau chez lui, à Paris, jusqu’à la fin de l’année.
(Musique)