La cribleuse
Notice
Inventée en 1985 à Vieux-Boucau par Joël Canicas, la cribleuse est à l'origine destinée au nettoyage des plages. En 1999, quelques réglages suffisent pour qu'elle retienne dans ses mailles les boulettes et les plaques d'hydrocarbure de l'Erika. Depuis 2002 et le naufrage du Prestige, la Canicas s'exporte partout dans le monde.
Éclairage
Le golfe de Gascogne n'avait jamais connu de catastrophe de telle ampleur. La longue litanie des noms des pétroliers auteurs de pollutions n'était pas encore véritablement associée aux côtes aquitaines mais, depuis le 1er janvier 2003, Gironde, Landes et Pyrénées-Atlantiques sont désormais concernées par une catastrophe de grande ampleur, difficilement contrôlable.
Un "bateau-poubelle" transportant du fuel, le Prestige qui a sombré au large de la Galice le 19 novembre 2002, laisse échapper une vaste nappe d'hydrocarbure qui se déplace, au gré des courants et des vents, et atteint, le 1er janvier suivant les côtes gasconnes après avoir défiguré les environs du Cap Finisterre. De petites "boulettes" sont tout d'abord repérées dans les Landes ; la Gironde est touchée le lendemain comptant ses premiers oiseaux morts. La catastrophe écologique est inévitable et la lutte commence. Au large, le long de la coque éventrée qui gît par plus de 3000 mètres de fond, le Nautile [1] tente de colmater les brèches de l'épave ; sur les côtes, 700 agents qualifiés sont à pied d'œuvre auxquels s'ajoutent, le surlendemain, des centaines de bénévoles, du Pays basque à la Pointe de Grave.
Bien que 450 tonnes de fuel aient été récupérées au large de la France, la marée ramène sans cesse d'autres boulettes et, le 21 janvier, 13 000 oiseaux sont déjà recueillis alors que l'Espagne doit débourser 1 milliard d'euros pour faire face au désastre. Les moyens humains ne suffisent plus, la pollution s'accroît, il faut passer à des moyens plus efficaces ; on a dès lors recours à la mécanisation mais les engins disponibles sont peu nombreux d'autant plus que l'Espagne, touchée en premier, a acheté tous ceux qui étaient disponibles.
Inventée en 1985 par un mécanicien landais, Joël Canicas, la seule machine susceptible d'être efficace est une "cribleuse". Conçue initialement pour nettoyer les plages des souillures ordinaires - laisses de mer naturelles mêlées aux rebuts de la société de consommation - elle a été adaptée à une mission plus spécifique après la catastrophe de l'Erika qui pollue toutes les côtes, de la pointe de la Bretagne à la Vendée, en décembre 1999. Désignée par un nom issu du latin cribellum, "tamis", l'énorme machine doit son succès à l'efficacité d'un "tapis vibrant qui retient boulettes et plaques de fuel". Parfaitement adaptée au nettoyage des plages et plutôt respectueuse de l'environnement, la cribleuse inventée par le mécanicien landais nettoie 2 à 3 ha à l'heure, affouillant le sable à 25 cm de profondeur seulement sans bouleverser le milieu de façon irréversible.
On comprend, dès lors, l'optimisme du jeune cadre qui présente les derniers modèles prêts à l'exportation dans un monde qui bouge et qui connaît une croissance exponentielle des flux en matière de navigation commerciale.
Quand le malheur des uns fait le bonheur des autres !
[1] Sous-marin de poche appartenant à l'IFREMER capable de travailler à de grandes profondeurs.