François Mitterrand sur la responsabilité du gouvernement face au parlement

24 avril 1964
01m 25s
Réf. 00132

Notice

Résumé :
Intervention de François Mitterrand, député de la Nièvre, à la tribune de l'Assemblée nationale. Il s'exprime sur la Constitution de 1958, en particulier sur la responsabilité du gouvernement face au parlement.
Date de diffusion :
24 avril 1964
Source :
RTF (Collection: JT 20H )

Éclairage

La chute de la IVe République le 13 mai 1958 marque une rupture institutionnelle et politique : une nouvelle fois, la conception parlementaire de la République est bien mise en cause. Le président de la République dispose d’un pouvoir renforcé et le général de Gaulle fait de son mandat la clef de voûte du régime, renforcé par l’élection au suffrage universel du président de la République (référendum du 28 octobre 1962).

Les socialistes, les radicaux - parmi eux François Mitterrand -, le MRP (Mouvement républicain populaire) et les Indépendants se regroupent dans un «Cartel des non» au référendum. Ce pouvoir personnel est dénoncé à gauche comme à droite par les partis et les parlementaires. François Mitterrand et Édouard Bonnefous pour l’UDSR (Union démocratique et socialiste de la résistance) répondent à l’appel de Maurice Faure après les élections législatives de novembre 1962, avec André Morice (Centre républicain) et d’autres, à se regrouper au Parlement dans le Rassemblement démocratique.

Alors que la première élection présidentielle au suffrage universel doit avoir lieu en décembre 1965, de nouvelles initiatives vont naître. François Mitterrand, dans ce contexte, travaille à prendre la tête de cette contestation, à gauche, du « pouvoir personnel » du président. À l’Assemblée, dans la presse ou dans les clubs de réflexion, il dénonce le pouvoir qu’il qualifie de dictature. Un mois après cette séance à l’assemblée lors de laquelle il conteste la lecture imposée par le général de Gaulle de son rôle de président de la République et de celui du premier ministre, il publie un pamphlet contre le régime : Le Coup d’État permanent.
Léa Pawelski

Transcription

(Silence)
François Mitterrand
Si je constate, Monsieur le Premier Ministre, que par l’article 20 de la Constitution, le Gouvernement, je cite, "détermine et conduit la politique de la Nation", s’il est "responsable devant le Parlement", et si je constate que ces formules sont dans la réalité vides de sens ; j’ai le droit de vous demander, à vous, Premier Ministre qui, selon l’article 21, dirigez l’action du Gouvernement ; non seulement, comment et pourquoi par le transfert continu de ces attributions, de vos attributions au Président de la République qui, lui, est irresponsable devant le Parlement. Oui, comment et pourquoi vous abandonnez l’essentiel de vos prérogatives, mais encore, comment et pourquoi, ce faisant, vous vous autorisez à priver progressivement le Parlement du droit fondamental de contrôle et de décision politique hors duquel ce régime parlementaire ne serait plus que l’alibi d’un pouvoir personnel !