Dans les Alpes, les refuges font peau neuve
Notice
Reportage consacré à la rénovation de refuges dans les Alpes. Les alpinistes craignent que l'esprit des lieux ne change avec l'introduction de plus de confort, et qu'ils deviennent des hôtels. Mais le responsable du Parc de la Vanoise assure que les refuges garderont leurs caractéristiques traditionnelles, comme le repas collectif et les chambres communes. Tour à tour, tous les refuges du parc sont rénovés, comme le refuge de l'Aigle, de l'Arpont et du Goûter.
Éclairage
Météo à la carte, diffusé sur France 3 après le Journal (12h 55), est une nouvelle émission (depuis septembre 2012) pensée et présentée par Laurent Romejko et Marie Vigne. Selon le site, elle « propose quotidiennement aux téléspectateurs un contenu varié, pour comprendre l'impact de la météo sur la santé, la nature, l'histoire ..... L'émission présente des points météo détaillés accompagnés de reportages dans les régions et des rubriques en plateau ». C'est l'un de ces reportages qui est proposé le 16 novembre 2012. Intitulé Les refuges font peau neuve, il accompagne l'actualité des opérations de réhabilitation des refuges alpins, engagées depuis les années 2010 par les sociétés d'alpinisme (CAF : Club Alpin Français) mais aussi d'autres associations comme la Via Alpina, la GTRA (Grande Traversée des Alpes) ou encore les parcs naturels puisqu'un certain nombre de ces refuges sont implantés dans leur « zone cœur ». C'est d'ailleurs un responsable du parc de la Vanoise, Dominique Giard, qui intervient pour expliquer la nécessité de ces opérations dans le respect de l'esprit des refuges.
Le reportage cible les deux Savoie qui comprennent les plus célèbres d'entre eux dont le fameux refuge du Goûter, plus haut refuge gardé des Alpes de l'ouest mais surtout un des plus anciens du Massif du Mont Blanc. Une nouvelle construction est alors en voie d'achèvement et son ouverture au public des 120 alpinistes qui pourront désormais y stationner, est prévue pour juin 2013.
Cet extrait du reportage rappelle dans un temps bref la fonction des refuges, abris temporaires dont l'édification accompagne le développement de l'alpinisme à partir du milieu du 19ème siècle. Ils restent dans la réalité comme dans l'esprit des usagers, des lieux à part, étroitement associés à une pratique élitaire et qui se méritent. Les premières images renvoient à ces espaces particuliers de la très haute montagne, avec des vues sublimes en même temps que les bourrasques et les tempêtes de neige rappellent la nécessaire existence de ces havres pour accéder à ces territoires (le symbole de la cheminée qui fume comme repère dans le désert blanc).
Simples abris sous roche qui existaient pour les chasseurs ou les passeurs « marrons » (1), ils ne suffisent plus dès lors que la conquête des sommets et la multiplication des parcours génèrent la venue d'alpinistes urbains. Les sociétés d'alpinisme comme le CAF ou la Société des Touristes du Dauphiné (STD) - autre association pour la pratique de la montagne créée au même moment que le CAF en 1875-, voire certains guides privés, édifient progressivement des cabanes, au confort spartiate qui servent de relais dans les ascensions vers les sommets. Ces premiers refuges des dernières décennies du 19ème siècle façonnent l'esprit dans lequel ils sont utilisés, qu'ils soient accrochés en haute altitude pour l'accès à des courses majeures ou installés dans des alpages pour des randonnées plus accessibles. Les rénovations déjà réalisées dans les années 1930 ou 50 ont souvent été de simples agrandissements, insérant cependant un accueil durant les saisons des courses et des randonnées et générant un nouveau métier, celui de gardien de refuge. A partir des années 1990 et surtout 2000, un programme majeur de rénovation est lancé, suscitant des réactions opposées que le reportage pointe dès le lancement du sujet.
Si le programme prévoit agrandissement et usage des nouvelles technologies écologiques (panneaux solaires) tout en restant dans la tradition des matériaux (pierre, bois ou fer), les réhabilitations, comme le montrent les images des refuges en rénovation, cherchent à procurer plus de confort. Certains usagers très attachés au caractère spartiate et traditionnel des refuges regrettent cette évolution hôtelière, craignant également un renchérissement des tarifs. Un des témoins interviewés conscient de cette critique rappelle le caractère collectif des hébergements. Mais c'est parfois l'allure de ces nouveaux refuges qui fait débat comme leur gestion. Ainsi le refuge du Goûter édifié à quelques centaines de mètres de l'ancien présente une architecture avant-gardiste de métal et une forme boule qui contraste avec l'ancien. Il rejoint le groupe de quelques grands refuges alpins, support d'innovation architecturale et fonctionnelle : un pari pris qui renvoie à une montagne, lieu d'expérimentation.
Ce programme de rénovation à grande échelle nécessite des moyens financiers et techniques importants qui obligent à l'étalement des travaux (ils doivent aussi tenir compte de la brièveté de la saison des travaux) comme la participation de différents financeurs (Etat, région, associations mais aussi de plus en plus privés). A terme, c'est l'ensemble du parc des refuges qui doit être rénové au cours de la décennie 2010.
(1) Considérés comme les ancêtres des guides, ce nom de « marrons » était donné jusqu'au 19ème siècle aux passeurs qui permettaient aux voyageurs et aux commerçants d'emprunter les sentiers muletiers et les cols, surtout entre la France et l'Italie, bénéficiant de leur bonne connaissance des territoires. Le terme de « marron » renvoie à une pratique redoutée plus que généralisée de « détroussage » des voyageurs durant le passage, au-delà de la somme prévue pour ce pilotage risqué.