La lutte bretonne

21 mai 1979
07m 10s
Réf. 00737

Notice

Résumé :

D'activité de loisir, la lutte bretonne est en passe de devenir un sport à part entière dans la région. Notamment à Berrien, dans le Finistère, où compétition et entraînements rythment l'emploi du temps des athlètes. Et les infrastructures suivent.

Type de média :
Date de diffusion :
21 mai 1979
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Éclairage

Les années 1970 correspondent à une nouvelle étape dans le développement de la lutte bretonne en sport moderne.

Principalement implantée dans le Finistère, la lutte bretonne, ou « gouren », est un sport traditionnel que l'on avait coutume de pratiquer lors des rassemblements populaires, tels que les jours de pardons. D'origine celte, elle est similaire à d'autres luttes pratiquées dans des pays celtiques, comme l'Ecosse ou la Cornouailles britannique. C'est une lutte de corps à corps, l'objectif étant de faire tomber son adversaire sur les deux omoplates.

La lutte bretonne connaît une première forme de rénovation à partir du début du XXe siècle suite aux initiatives du docteur Cotonnec de Quimperlé. Parmi celles-ci, l'organisation du tournoi interceltique de Quimperlé, en août 1928, annonce la résurrection de ce sport traditionnel. En mars 1930, la création de la FALSAB « Fédération des amis des luttes et sports athlétiques bretons » assure également le renouveau de la pratique.

A l'heure du développement des loisirs et de la redécouverte des sports, cette pratique traditionnelle rassemble toujours de nouveaux adeptes. En 1979, la nouvelle avancée de ce sport ludique et populaire est incarnée par l'ouverture de la maison des sports bretons à Berrien, dans le Finistère. La lutte bretonne se modernise et se pratique à partir des années 70 dans de nouvelles conditions. C'est tout d'abord un véritable sport qui se pratique en club. A l'image de celui de Berrien, les clubs assurent les entraînements en salle, sur des tapis, incluant des échauffements et du travail technique. La lutte bretonne devient une activité extrascolaire dont l'encadrement est effectué par des éducateurs sportifs. Le maintien de la pratique permet alors des évolutions techniques et la diversification des prises. Des championnats départementaux sont organisés pour sélectionner les participants du championnat de Bretagne. Jean-Pierre Jaouen est d'ailleurs l'un des principaux champions de France des années 1970 qui incarnent le nouvel élan de la lutte bretonne. En 1985, une fédération internationale des luttes celtiques (FILC) est créée, regroupant les fédérations des pays « celtiques », puis progressivement d'autres fédérations de luttes traditionnelles de l'Ouest européen.

A travers ce sport traditionnel, et malgré l'ensemble des évolutions qu'il a parcourues, on souhaite maintenir un lien avec la culture régionale. Se déroulant en plein air, sur piste de sciure de bois, les compétitions recréent l'ambiance d'autrefois. Les lutteurs sont toujours pieds nus et habillés selon les règles traditionnelles. La pratique demeure axée sur le principe de la loyauté, à travers le serment prononcé avant chaque compétition et l'accolade obligatoire au début et à la fin du combat.

Pauline Jehannin - CERHIO – Université de Rennes 2

Bibliographie :

LE JONCOUR, Paul, et JAOUEN Guy, La lutte bretonne des origines à nos jours, Institut Culturel de Bretagne, 1984

GOURMELEN, Lena, BOURDONNAY, Jean-Daniel et LEGRET, Eric, Gouren, lutte et défis d'un sport breton, Coop Breizh, 2005

Pauline Jehannin

Transcription

(Musique)
Journaliste
Ce n'est plus comme dans le temps, le mégot de travers, l'oeil humide, quelque ancien a bien dû laisser choir la formule usée des vingt ans passés depuis longtemps. La foule n'est plus la même, c'est vrai, mais des sports traditionnels, la lutte bretonne est sûrement la plus populaire et sans trop de mal, elle a traversé l'évolution sportive moderne. Aujourd'hui, elle est structurée comme une autre discipline, elle a ses champions, 5 d'entre eux viennent d'ici, Berrien, une commune sportive, au coeur du Finistère, au coeur de la lutte bretonne et c'est là que l'on construira bientôt la Maison des sports bretons qui pourra accueillir des stagiaires, en offrant aux lutteurs un véritable outil de travail digne de ce nom. Car aujourd'hui le lutteur n'est plus isolé, il s'entraîne plusieurs fois par semaine dans des salles équipées.
(Musique)
Jean-Pierre Jaouen
Actuellement il y a des clubs dans le coin, Scrignac, Ploeven, Carhaix, Morlaix, on ne peut même pas travailler ensemble, disons, puisque aucune de nos salles ne nous permet de nous rencontrer.
Journaliste
Et pourtant j'ai l'impression que la lutte bretonne évolue actuellement, il y a une reprise.
Jean-Pierre Jaouen
Disons oui depuis 5 ou 10 ans peut-être au grand maximum, il y a une sérieuse reprise. Au niveau du Finistère, il y a quand même de nombreux clubs ici dans le coin, sur le Finistère il y en a quelques-uns, dans la région de Brest il y en a beaucoup et il y a encore de grandes possibilités si on sait les exploiter.
(Bruits)
Journaliste
Discipline bien particulière, la lutte est appréciée par les enfants, filles et garçons, les filles étant venues à ce genre exercice depuis peu, elles la pratiquent sans danger, c'est vrai, mais avec force. Aujourd'hui, c'est évident, on est loin de la lutte bretonne d'autrefois, où les lutteurs isolés ne se retrouvaient que lors des championnats, voire des fêtes. Pour réussir, il faut désormais s'entraîner fermement plusieurs fois par semaine. A Berrien, si l'on est fier de ses 5 champions de Bretagne, on n'est pas pour autant fanatisé par la compétition.
(Bruits)
Jean-Pierre Jaouen
Ce n'est pas notre premier but quoi, notre premier but c'est de faire faire du sport aux jeunes, de les faire s'amuser à travers le sport. Si au bout de ce travail-là, il y a des résultats en compétition eh bien, tant mieux, et ça prouve d'ailleurs qu'on n'est pas obligé d'axer le travail sur la compétition pour avoir des résultats.
(Bruits)
Journaliste
J'ai une impression qu'on retrouve en lutte bretonne certaines entrées du judo, c'est exact ?
Jean-Pierre Jaouen
Disons qu'on retrouve les techniques de hanche, les techniques d'épaule essentiellement, en dehors de ça, les ceintures, les prises de force sont particulières à la lutte bretonne.
Journaliste
Mais est-ce qu'il y a des petits trucs comme au judo, par exemple, les prises de main sur le kimono en judo, est-ce qu'on retrouve ça en lutte bretonne ?
Jean-Pierre Jaouen
On a plus de types de prises, on a hanche et épaule, en plus on a les fauchages et les barrages comme en judo, mais on a toutes les ceintures, les prises de force où on tient bien son adversaire au corps et on le décroche, il y a aussi des enroulés de jambe.
Journaliste
Des prises très spéciales à la lutte bretonne.
Jean-Pierre Jaouen
Typiques oui, la plus typique c'est le kliket arrière, un croc en jambe, une prise où on tient son adversaire au corps et par un déséquilibre arrière on le retourne et l'adversaire chute sur les deux épaules.
Journaliste
On peut en voir une autre tout de suite ?
Jean-Pierre Jaouen
Alors c'est encore un crochet de jambe mais quand même différent ; le déséquilibre de celui qui exécute la prise n'est pas le même. Alors que tout à l'heure, il était face à l'adversaire, ici il est dans le côté.
Journaliste
Mais on peut provoquer le déséquilibre également comme au judo ?
Jean-Pierre Jaouen
Ah ben il faut le provoquer le déséquilibre c'est certain, et disons que celui qui ne travaille pas en cherchant à déséquilibrer son adversaire, il pratique uniquement en force et puis ça devient très difficile quoi.
Journaliste
Voila c'est ce que je voulais savoir, c'est pour ça que je vous ai fait venir, j'ai l'impression que la force compte beaucoup et le poids aussi, c'est exact ?
Lutteur
Pas uniquement, je ne crois pas, il ne faut pas compter seulement sur la force et sur le poids, c'est une erreur.
Journaliste
Il y a des contres ?
Lutteur
Bien sûr.
Journaliste
Alors quand on travaille trop en force, on se fait contrer c'est ça ?
Lutteur
Puis on se fatigue beaucoup, c'est ça un peu l'inconvénient, si on veut faire un bon combat de 10 minutes et qu'on travaille en force, ça va durer une minute, 2 ou 3 c'est le maximum, je crois. La force c'est utile dans la mesure où on sait l'utiliser, mais sinon il ne faut pas trop compter là-dessus.
Journaliste
Il existe des combats où deux lutteurs se trouvent bloqués à un certain moment, c'est-à-dire que ils se contrent mutuellement ?
Lutteur
Oui, enfin ça arrive, si se sont des débutants quoi, sinon il y a toujours une issue, si ce sont des lutteurs chevronnés, ils vont toujours s'en tirer d'une manière quelconque.
Journaliste
On peut mettre en application un contre là ?
Jean-Pierre Jaouen
Un surpassement de prise, plus exactement, alors. Je vais le prendre en kliket arrière comme disait tout à l'heure Dédé là, et puis à partir de cette position, en décrochant, il va effectuer une prise de force.
Lutteur
Alors là, j'ai réussi à décrocher la jambe.
Journaliste
Ah, vous voyez que la force sert tout de même.
Lutteur
Ben, non, parce que finalement je l'ai porté en déséquilibre aussi.
(Musique)