Senlis : projet d'extension concernant les habitations avec sauvegarde de la ville ancienne
Notice
Senlis est une ville au caractère moyenâgeux. Une nouvelle zone urbaine va être créée avec une capacité de 20 000 personnes. La municipalité ne souhaite pas créer une ville déshumanisée comme le sont, pour le Dr Pierre Boquet, les villes nouvelles. Il faut tout faire pour éviter une ville-dortoir et que la ville ancienne ne soit pas asphyxiée.
Éclairage
Si, dans la première moitié du XXe siècle, la population de Senlis est restée assez stable (autour de 7 500 habitants), elle a fortement augmenté entre 1954 et 1975 : la population a en effet crû d'un peu plus de 70%, atteignant 11 000 habitants en 1968 et 13 000 en 1975. Cette croissance démographique a induit une croissance urbaine qui s'est accélérée à partir des années 1960. Même s'il est souvent difficile d'identifier les facteurs à l'origine d'un tel développement – alors que les causes sont toujours plurifactorielles et multiscalaires –, l'arrivée de l'autoroute du Nord en 1964 (reliant dans un premier temps Senlis au Bourget), la création de la ZAC de Senlis en 1968 et l'inauguration du très proche aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle en 1974, qui va rapidement devenir un pôle majeur d'emplois, font sans doute partie des éléments qui ont stimulé, si ce n'est engendré cet essor.
Comme le mentionnait déjà en 1899 le Guide Joanne relatif au département de l'Oise, "l'influence de Paris se fait sentir principalement dans l'arrondissement de Senlis". Au-delà des caractéristiques propres à Senlis, la ville connaît, comme d'autres villes du Sud-Oise, un développement urbain en lien étroit avec l'agglomération parisienne. Cette proximité parisienne peut encore être soulignée par le fait que, dans les années 1960, cinq cantons du Sud de l'Oise (dont les cantons de Senlis et de Creil) faisaient partie du District de la région parisienne dont la mission a consisté à élaborer puis à mettre en œuvre le Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région Parisienne (SDAURP), adopté en 1965, qui prévoyait notamment la création de villes nouvelles. L'inclusion du sud de la Picardie dans la région parisienne n'était pas une innovation du SDAURP, puisque son "prédécesseur", le PADOG (Plan d'aménagement et d'organisation de la région parisienne), entériné en 1960, s'inscrivait dans le même périmètre.
Le reportage propose différentes prises de vue qui permettent aux spectateurs actuels de mieux se rendre compte de ce qu'était un quartier ancien au début des années 1970, c'est-à-dire avant la mise en œuvre d'opérations de rénovation urbaine, de réhabilitation urbaine ou de restauration urbaine : une voirie constituée de pavés plus ou moins disjoints, avec une chaussée parfois recouverte de terre, sans trottoir ; des rues vides et peu animées ; de vieilles maisons à l'architecture et aux matériaux traditionnels. Le reportage donne également la parole au docteur Boquet, maire-adjoint de la commune de Senlis, qui a été en charge de la mise en œuvre, en 1965 – soit trois ans seulement après l'adoption de la loi Malraux –, du secteur sauvegardé de la ville, couvrant une quarantaine d'hectares dans le centre-ville historique et devenu, depuis les années 1970, un lieu privilégié de tournages de films et de séries télévisées (environ 200 films ont été tournés à Senlis depuis 1935).
Cependant, hors des murs de la vieille ville, la croissance urbaine que Senlis a connue dans les années 1950 et 1960 conduit à différents projets d'extensions urbaines périphériques, principalement sur le plateau : quartier du Val d'Aunette I, construit à partir de 1957, Val d'Aunette II, bâti au-delà, quartier de La Gatelière plus tard encore, à partir de 1974. A cet égard, il est symptomatique d'entendre la personne interviewée avoir peur des "villes nouvelles", assimilées aux grands ensembles dont les défauts ont déjà été mis en évidence au moment de la réalisation du reportage. Les acteurs des villes nouvelles – décideurs politiques et architectes-urbanistes en charge des différents projets – ont en effet affirmé leur volonté de concevoir un urbanisme à l'opposé de ce qui est perçu comme un repoussoir ou un anti-modèle, celui des grands ensembles. Toutefois, la confusion entre le terme de "grand ensemble" et celui de" ville nouvelle" n'est pas le seul fait du docteur Boquet, car, comme l'a souligné la thèse de Michèle Huguet, elle est très fréquente dans les années 1950 et 1960. Les grands ensembles sont, en effet, souvent qualifiés de "villes nouvelles" ou encore de "nouvelles cités".