Gers : l'histoire du Pousse Rapière
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Résumé
Le directeur adjoint de l'UCVA (Union cooperatives vinicoles Aquitaine), M. Canton explique la recette du cocktail " Pousse Rapière " réalisé entre autre à base d'armagnac et de " vin sauvage " pétillant. Monsieur Lassus décrit la fabrication de ce vin efferverscent qu'il a inventé.
Date de publication du document :
01 nov. 2022
Date de diffusion :
18 mars 1969
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Contexte historique
L’histoire du château de Monluc n’est pas anodine. Situé sur le promontoire du petit village gascon de Saint-Puy, dans le Gers, il est le siège historique de la famille Lasseran de Mansencôme depuis le XVe siècle. Donné par Charles d’Albret à Pierre de Lasseran de Mansencôme, il acquiert sa renommée au XVIe siècle, notamment grâce aux faits d’armes de l’héritier de celui-ci. Blaise Lasseran de Mansencôme, dit Blaise de Monluc, né entre 1500 et 1502, mort en 1577, est en effet un maréchal de France et mémorialiste ayant servi cinq rois de France, fervent défenseur de la monarchie lors des guerres d’Italie et des guerres de religions.
Bien des siècles plus tard, la famille Lassus devient propriétaire du château. Le commerce de l’armagnac battait son plein. Loin des rivières par lesquelles on faisait transiter les tonneaux d’eau-de-vie jusqu’aux ports de la façade atlantique, le village de Saint-Puy s’éteint peu à peu. À la fin du XIXe siècle, la famille Lassus rebondit et exporte ses vins blancs vers la célèbre région de Champagne pour finir sa vinification sous la forme de vin effervescent du même nom.
Dans les années soixante, le vignoble gersois cherche à diversifier sa production, tente des innovations et se renouvelle. C’est dans ce courant que René Lassus affine l’idée d’un vin mousseux, qu’il produirait cette fois, en son domaine. Il reprend les méthodes champenoises pour faire d’une partie de son vignoble du vin sauvage : un vin blanc mousseux vinifié à partir des cépages utilisés pour l’armagnac, l’Ugni blanc et le Colombard, auquel s’ajoute le Gros-Manseng. De l’autre partie, il continue à produire de l’armagnac. Et si les deux étaient complémentaires ? René Lassus mélange alors les deux boissons et améliore son cocktail. Il met au point une liqueur d’armagnac aromatisée à l’orange amère dont la recette est tenue secrète et exclusive au château de Monluc.
Il fallait ensuite trouver un nom à ce cocktail qui égayait les soirées du château. En hommage à son précédent propriétaire Blaise de Monluc, René Lassus le baptise le « Pousse Rapière ». Ainsi fait-il référence à son arme, la rapière, première arme d’estoc et ancêtre de l’épée des mousquetaires. Le portrait du maréchal figure aussi sur les premières étiquettes. Les premières bouteilles sont vendues et le succès est immédiat : le Pousse Rapière s’invite dans les maisons et les Gersois trinquent.
À l’apéritif vénitien à base de liqueur d’orange que l’on boit aujourd’hui sur les terrasses des grandes villes, le Pousse Rapière n’a rien à envier. Moins célèbre mais plus ancré dans son terroir, servi avec des glaçons, on pourrait tout aussi bien l’appeler le « Spritz gascon » !
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Jacques Sudan
La commune de Saint-Puy dans le Gers, en plein coeur du vignoble gascon.Dans ces grands bâtiments, des milliers de bouteilles.Quelques gouttes d’une liqueur jusqu’à une certaine limite du verre.On ajoute un mousseux naturellement effervescent élaboré précisément à Saint-Puy, et on déguste un breuvage qui porte un nom bien gascon, le Pouss Rapière.Mais quel Pousse Rapière, c’est ce que va nous dire Monsieur Canton, qui est le directeur général adjoint de l’UCVA.
Monsieur Canton
Et bien, le Pousse Rapière, c’est un cocktail, un mélange qui est constitué de deux composantes :la première qui s’appelle justement le Pousse Rapière et qui a donné son nom à l’ensemble.Alors, le Pousse Rapière, et bien je peux vous en dire certaines choses, et puis il y en a d’autres que je ne peux pas vous dire, parce que bien entendu il y a un secret de fabrication que vous me permettrez de ne pas vous le livrer aujourd’hui.Le Pousse Rapière c’est une liqueur d’armagnac, le constituant essentiel c’est l’armagnac, qui est mélangé à de l’essence d’orange, et puis à certaines herbes et c’est justement là que nous touchons le secret.Alors, ce que je puis par contre vous dire, c’est que d’après un certain nombre d’utilisateurs passionnés de ce produit, le Pousse Rapière a certaines vertus dont je ne dirai pas non plus grand-chose.Mais surtout il a, je crois, l’avantage de créer une excellente ambiance dans les réunions, disons que, sans exagérer, il rompt la glace très facilement et je crois que c’est ce qui en fait son succès.Alors, la deuxième composante de ce Pousse Rapière, c’est le vin sauvage, c’est ce vin effervescent qui a été inventé, je crois, par notre ami Lassus et c’est la raison pour laquelle nous avons passé une association, un contrat d’association avec lui.Nous diffusons le produit parce que nous avons, je crois, des circuits de distribution qui sont assez bien établis.Et en ce qui concerne la fabrication, c’est Monsieur Lassus qui s’occupe de ce vin sauvage.
Jacques Sudan
Et bien Monsieur Lassus, ce vin sauvage, comment le fabrique-t-on, est-ce qu’il y a des secrets aussi ?
Monsieur Lassus
Il y a certainement des secrets, mais ils sont connus de tout le monde ceux-là.Le vin sauvage, c’est un vin effervescent, naturellement effervescent, qui est fermenté en bouteille, qui se fait comme tous les vins fermentés en bouteille pendant de longs mois dans les caves.On le dégorge, ensuite on habille les bouteilles, et on le livre aux clients.
Jacques Sudan
Justement dans le problème de dégorger, je crois que vous avez inventé quelque chose ?
Monsieur Lassus
Euh non, je n’ai pas inventé quelque chose au stade du dégorgement, c’est simplement au stade du remuage.Il existe dans la méthode champenoise que nous utilisons, il existe un poste qui s’appelle le remuage des vins, qui consiste à mettre les bouteilles sur des pupitres, comme vous voyez derrière vous là, pendant des mois et on tourne ces bouteilles tous les jours, quelquefois deux fois par jour.C’est un travail qui est évidemment très long, très coûteux, et nous avons trouvé ici un système qui nous permet d’obtenir exactement le même résultat et même une descente du dépôt beaucoup plus…
Roger Mullet
Complète ?
Monsieur Lassus
Complète, oui, rapide même.Euh, nous avons obtenu cela avec des pupitres rotatifs que nous allons voir maintenant.
Jacques Sudan
Et ces pupitres rotatifs fonctionnent comment ?
Monsieur Lassus
Ces pupitres rotatifs sont simplement des espèces de caissons montés sur un axe, qui leur permet de tourner sur eux-mêmes, d’abord ;et ensuite de s’incliner tous les quinze jours à peu près suivant la descente du dépôt et le processus du remuage des bouteilles classiques.
Jacques Sudan
Que pense de ce Pousse Rapière Monsieur [Ledain], le directeur du BNIA du Bureau national interprofessionnel de l’armagnac ?
Monsieur Ledain
D’abord que du bien, car c’est un produit qui est une composition dans laquelle nous retrouvons au départ des vins qui sont issus des cépages obligatoires pour l’armagnac ;et ensuite nous trouvons dans la composition, sous la forme de Pousse Rapière liqueur, l’armagnac lui-même.C’est donc une heureuse conjonction qui est une preuve de fertilité de l’esprit inventif des Gascons, et mon Dieu, cette fertilité doit pouvoir permettre, je crois, un essor assez puissant pour faire connaître le mot armagnac grâce à l’armagnac qui figure dans le Pousse Rapière.
Jacques Sudan
Une dernière question.Monsieur Canton, quel est l’avenir du Pousse Rapière ?
Monsieur Canton
Pour l’instant, on est un petit peu obligé de freiner la vente, de freiner justement ce succès que connaît le Pousse Rapière.Alors, je crois tout de même que c’est quelque chose de provisoire et que le public sera très rapidement servi aussi vite qu’il le désire et pourra apprécier de plus en plus notre produit.
Jacques Sudan
Objectif chiffré ?
Monsieur Canton
Oui alors, si on veut chiffrer, évidemment c’est toujours difficile, mais disons que les prévisions, la prospective comme on dit maintenant, euh nos espérances pour l’année en cours, 500 000 bouteilles.Nous partons de 150 000 bouteilles l’année dernière, ce qui était une période d’essai et puis maintenant nous pensons pouvoir arriver cette année à 500 000 bouteilles, ce qui encore est très faible et je ne veux pas, je ne veux pas anticiper davantage.Je pense que nous irons beaucoup plus loin.Enfin, pour l’instant, je vous donne les objectifs à court terme