Le barrage du Mont-Cenis

28 juin 1971
04m 08s
Réf. 00367

Notice

Résumé :

Le barrage du Mont-Cenis fait parti des grandes actions françaises en matière d'hydroélectricité. Les ministres de l'Industrie français et italien, François- Xavier Ortoli et Silvio Gava, sont venus le visiter. Cet ouvrage est dû à la collaboration des deux pays.

Date de diffusion :
28 juin 1971
Source :
Lieux :

Éclairage

L'inauguration du barrage du Mont-Cenis, en 1978, témoigne de la poursuite de l'équipement de la partie alpine de la région Rhône-Alpes en grands barrages hydroélectriques, lancé depuis les années 1930, et des évolutions de celui-ci. En effet, si les barrages alpins sont forts anciens, les grands barrages ne datent que de l'entre deux guerres, lorsque les techniques de construction les rendent possibles et que l'interconnexion des réseaux de transport d'électricité autorise l'évacuation de leur énergie vers les zones de consommations urbaines. Une seconde vague de construction se déroule après la guerre dans le cadre du plan Monnet et de la naissance d'EDF qui vise à accroître la production globale d'énergie dans une période de forte pénurie énergétique. Les chantiers suivants se poursuivent à un rythme plus ralenti et concernent des barrages plus spécifiques, intégrés à un système électrique complexe devenu non seulement national mais international. Le barrage du Mont-Cenis s'inscrit dans cette logique. Prenant la suite d'un barrage italien plus petit, l'ouvrage est formé d'une énorme digue de 15 millions de m3 de terre et d'enrochement (un record à l'époque) qui donne naissance à un lac de 660 hectares, alimenté par plusieurs bassins versants grâce à un vaste réseau de galeries. Il présente la particularité d'être situé sur un plateau transfrontalier (une rectification de frontière à d'ailleurs été nécessaire pour que le barrage soit intégralement situé en France) et de recueillir des eaux en provenance de France et d'Italie. Il alimente de même des centrales situées de part et d'autre de la frontière, la centrale de Villarodin côté français et de Venaus côté italien.

Ceci explique la présence lors de l'inauguration des ministres de l'industrie français et italiens. La tonalité du reportage est bien différente de celle des années d'après guerre. Si l'on célèbre toujours la performance technique et la maîtrise de la nature, le temps n'est plus à l'exaltation de la grandeur française retrouvée, comme lors des inaugurations de Génissiat et de Tignes, mais à l'évocation d'un ouvrage complexe alimentant des réseaux électriques interconnectés à échelle européenne. Ces changements dans la logique et l'échelle de ce type de grands aménagements énergétiques (à l'image de celui d'Emosson à la frontière franco suisse) illustrent l'intégration croissante des économies et réaffirment la réalité transfrontalière de la région Rhône-Alpes.

Anne Dalmasso

Transcription

Journaliste
Au cours de ces 25 dernières années, électricité de France a entrepris les exploitations systématiques des ressources hydrauliques de notre pays. Parmi les grands barrages alpins, le plateau du Mont-Cenis est l’un des ouvrages les plus remarquables. C’est ce barrage que monsieur Ortoli, ministre de l’Industrie, en compagnie de son homologue italien, a visité officiellement samedi dernier. Il s’agit, en effet, d’une réalisation franco-italienne, la retenue bénéficiant d’apport des deux pays. Entre la vallée de l’Arc et la frontière italienne, le col du Mont-Cenis débouche sur une large cuvette glaciaire dans laquelle les nouveaux barrages créent un lac à près de 2000 mètres d’altitude. Comme on peut le voir sur cette carte, l’ouvrage a été ainsi conçu d’une hauteur de 120 mètres. Il est fait au centre d’un noyau de terre étanche, l’argile étant en contact avec la roche, d’un arrochement compact de 6 millions de m3 en aval et en amont, d’un mur de terre, d’un arrochement de 4 millions de m3. A son sommet, il fait 12 mètres de large sur 14 000 mètres de long à sa base, 460 mètres d’épaisseur. Monsieur Périen, ingénieur EDF , nous dit quel est le régime franco-italien de ce barrage.
Périen
Les Italiens amènent, dans la retenue du Mont-Cenis, à 2000 mètres d’altitude, 50 millions de m3, pour alimenter une centrale située en Italie, d’une puissance de 240 000 Kilowatts. Et, les Français, de leur côté, amènent 270 millions de m3 dans la retenue du Mont-Cenis, qui au total, représente 320 millions de m3. C’est 270 millions de m3 servent à alimenter l’usine hydro-électrique de Villarodin, d’une puissance de 400 000 kilowatts.
Journaliste
Bien alors, si on fait un petit calcul, vous êtes nettement majoritaire à propos de ce barrage et de la puissance qui en est dégagée. Mais, cette puissance, où va-t-elle ? Est-ce qu’elle sert uniquement la région ?
Périen
L’énergie fournit par l’usine de Villarodin est envoyée sur le réseau français, le réseau 400 kilovolts, qui sert à alimenter le réseau français dans l’ensemble. C’est-à-dire que, aussi bien les kilowatts de Villarodin peuvent aller sur les villes telles que Lyon, Paris, Bordeaux, etc.
Journaliste
La visite d’une telle installation, par deux ministres, ne pouvait qu’en souligner l’importance. C’est pourquoi nous avons demandé à monsieur Ortoli, ministre de l’Industrie, de nous dire quelle était la signification de sa présence au Mont-Cenis.
(Silence)
Ortoli
Je suis venu inaugurer, non seulement le barrage, mais également les deux usines électriques, qui de part et d’autre de la frontière, vont utiliser la retenue d’eau. L’usine italienne et l’usine française.
Journaliste
Et bien, justement, lorsque je parlais de signification, je crois qu’il y en a une toute particulière du fait de cet échange franco-italien d’énergie électrique.
Ortoli
Sans l’ombre d’un doute. D’abord, une signification qui est propre à la France et à l’Italie, puisque nous faisons ensemble, ici, un ouvrage considérable, d’ailleurs dans des conditions de difficulté tout à fait exceptionnelle. Mais également, c’est une forme de coopération qui se développe dans le domaine privilégié de l’électricité. C’est avec tous les mécanismes d’interconnexion, aujourd’hui, devant le fait qu’une centrale, cela n’est plus un centre mais un ensemble destiné à couvrir des zones, par conséquent, avec tous les mécanismes modernes d’interconnexions, nous avons réalisé une œuvre commune en utilisant ce barrage au bénéfice des deux pays.
Journaliste
Aux yeux des visiteurs, il ne reste plus qu’un lac et un immense mur de pierre à la dimension du paysage qui l’entoure. Près de 90 kilomètres de galeries souterraines alimentent la retenue, de là partent des conduites forcées qui font tourner les deux centrales de part et d’autre de la frontière. Entamés 8 années auparavant, les travaux ont pris fin en 1970. Ainsi, par l’Arc, affluant de l’Isère, du côté français, et par la [Senise] du côté italien, se trouvent réunis 2 grands bassins européens, celui du Rhône et celui du Pau. L’homme a une fois de plus domestiqué la nature à son profit, sans que, ici, elle en souffre. La vie poursuivant son rythme montagnard dans l’un des plus grandioses paysages de notre pays.
(Silence)