La gare de Culoz

04 avril 2009
02m 13s
Réf. 00008

Notice

Résumé :

La petite gare de Culoz , dont le hall d'accueil a été classé monument historique, est au cœur d'une bataille entre amoureux du patrimoine et administration. Le bâtiment situé face à la gare sera prochainement démonté sur décision préfectorale.

Date de diffusion :
04 avril 2009
Source :

Éclairage

Commune du département de l'Ain, Culoz (2 931 habitants en 2008) est situé sur la rive droite du Rhône, au pied du Grand Colombier, sommet méridional du Jura, et aux marges de l'actuel département de la Savoie. Au milieu du XIXe siècle, le développement du chemin de fer transforme ce village agricole en important noeud ferroviaire, jonction de la ligne PLM Paris-Genève achevée en 1858 et de la ligne Victor-Emmanuel (Aix-les-Bains – Culoz), ouverte le 27 juillet 1858 par la Compagnie du Chemin de Fer Victor-Emmanuel, du nom du prince de Savoie et roi de Piémont-Sardaigne (1820-1878) qui, dès 1853, a encouragé sa création. Le site est alors institué gare internationale et poste-frontière entre la France et le royaume de Piémont-Sardaigne. Il est progressivement aménagé à partir de 1857 : construction du bâtiment de contrôle, notamment douanier, des flux de voyageurs et de marchandises ; du bâtiment de la « gare internationale » destinée au service des voyageurs, incluant des locaux pour l'enregistrement des passagers, les bagages, des salles d'attente, un buffet et ses cuisines, les bureaux des douanes françaises et sardes et des employés du PLM et de la Compagnie du Chemin de Fer Victor-Emmanuel ; et enfin des logements de douaniers. Si l'annexion de la Savoie, le 24 mars 1860, la prive de sa vocation douanière, la gare constitue toujours le point de passage obligé vers la Suisse et l'Italie et son développement se poursuit, des bâtiments techniques et de nouvelles voies sont ajoutées en 1872, 1887, 1889 (tramway Culoz-Annecy) et 1925. L'édification de la cité des cheminots, au début du XXe siècle, parachève l'équipement du site alors vaste et complexe.

Le reportage de France 3 relate les positions contradictoires des principaux acteurs de la polémique née lors de la procédure de protection de la gare au titre des monuments historiques. La commission régionale du patrimoine et des sites Rhône-Alpes (CRPS), organe consultatif composé de 30 membres, élus de la région et personnes qualifiées, après examen du dossier de protection instruit par la conservation régionale des Monuments historiques (service décentralisé du ministère de la Culture), a voté l'inscription des deux bâtiments principaux, l'ex-bâtiment de contrôle de 175 m2 abritant désormais les guichets SNCF et la gare internationale de 700 m2 alors désaffectée, considérant leur statut patrimonial de « gare frontière » et la valeur architecturale des bâtiments de style régionaliste sarde, notamment la qualité des boiseries décorant les élévations et des chambranles moulurés et chantournés des baies. Contrairement à l'opinion du propriétaire du bâtiment relayée par le reportage, la conservation régionale des Monuments historiques a estimé que l'état sanitaire du bâtiment n'était pas préoccupant, mais a noté que la mise en œuvre de l'arrêté de péril pris par le maire de la commune en octobre 2008, qui a fait grillager le bâtiment portes et fenêtres ouvertes, pouvait à terme lui porter préjudice. Cependant le préfet, dans son arrêté du 23 janvier 2009, n'a pas suivi l'avis de la CRPS et a inscrit uniquement le bâtiment abritant les guichets, permettant de facto la destruction de la gare internationale intervenue en août de la même année. En effet, le démontage de ce bâtiment, qui sous-entendait son remontage dans un autre lieu, a été suggéré au propriétaire mais n'a donné lieu à aucune prescription officielle et avait donc peu de chances d'être exécuté.

Au-delà du compte-rendu événementiel qui en est proposé par le reportage, la controverse autour de la gare de Culoz témoigne concrètement des enjeux sociaux du patrimoine. Car, pour le collectif « Sauvons la gare de Culoz », à l'origine de la demande de protection, la mobilisation pour la sauvegarde du bâtiment s'inscrit plus largement dans le mouvement d'opposition au déclassement progressif de la gare déjà bien entamé au moment du reportage, qui la qualifie à plusieurs reprises de « petite gare » : fermeture du triage, suppression de l'arrêt de nombreux trains et, postérieurement au reportage, de la desserte TGV (la ligne Paris-Genève est détournée par Bellegarde-sur-Valserine pour relier les deux métropoles en moins de trois heures), en coordination avec le comité de défense des usagers du train en Bugey et Chautagne, les élus et les acteurs économiques préoccupés par l'enclavement progressif du territoire, désormais à l'écart des grandes voies de circulation.

Florence Charpigny

Transcription

Présentateur
Que va devenir la petite gare de Culoz, dans l’Ain. Une partie du bâtiment, classée, sera conservée, le reste du site doit être démonté. Un projet qui ne plaît pas à tout le monde comme ont pu le constater Olivier Martin et Jean Eric Gay.
Journaliste
Un point à la ligne, une nouvelle page d’histoire pour un patrimoine du 19e siècle, la petite gare de Culoz. Si le hall d’accueil a été classé monument historique, le bâtiment qui lui fait face sera prochainement démonté, décision préfectorale. D’architecture sarde, avec ses panneaux en bois, le monument est typique des constructions savoyardes. La gare a été construite deux ans seulement avant le rattachement de la Savoie à la France.
Gisèle Garcin
Ce bâtiment, entre autres, abritait les douanes. C’est sûr qu’elles ont eu une durée de vie très courte puisqu'en 1860, les douanes ont disparu puisque la Savoie était française.
Journaliste
Depuis l’arrêté du préfet de région, un collectif de riverains s’oppose fermement à la déconstruction du site, propriété de la SNCF.
Christophe Berardi
Plus on avance, plus les experts disent : ne démolissez pas, ne démolissez pas, il y a un intérêt historique etc. Et plus la SNCF s’entête à vouloir démolir.
Journaliste
Ancrée dans un territoire, la petite gare est située sur un axe majeur, la ligne Genève-Lyon. Le trafic s’intensifie depuis un an. A la place du bâtiment, la SNCF souhaite construire une halte pour voyageurs.
Pascal Gentil
De toute manière aujourd’hui, le bâtiment du quai 2, vous l’avez vu vous-même, il est dans un tel état que nous n’avons pas nous, de toute manière à la SNCF, les moyens de le rénover, en sachant que de toute manière, on n’en a pas l’utilité non plus.
Journaliste
Le site sera démonté morceau par morceau. Une aberration pour certains membres de la commission du patrimoine et des sites, pourtant consultée par le préfet de région. Aujourd’hui, ils réagissent en adoptant une motion pour protester contre l’arrêté.
Eddie Gilles-di Pierno
C’est un ensemble cohérent. C’est comme si en fin de compte, pour préserver un château, on disait on détruit le château et on garde le pavillon d’angle du château, la maison de gardien du château.
Journaliste
La SNCF souhaite démarrer les travaux rapidement. Elle consulte actuellement l’architecte des monuments pour intégrer à la gare son projet de halte pour voyageur du 21e siècle.