Les hippocampes de l'étang de Thau
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Résumé
Patrick Louisy recense et photographie la population d'hippocampes mouchetés de l’étang de Thau, particulièrement remarquable. Ce « petit cheval de mer », autrefois excessivement pêché et vendu comme souvenir aux touristes, est aujourd’hui protégé, recensé et étudié.
Date de publication du document :
21 déc. 2022
Date de diffusion :
25 sept. 2019
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Contexte historique
ParChercheur CNRS (Centre national de la recherche scientifique) au CEFE (Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive, Montpellier)
Le bassin méditerranéen est un hotspot mondial de la biodiversité [1] marine et côtière. La mer Méditerranée représente seulement 0,7 % de la surface mondiale des océans, mais elle abrite 8 à 9% de la biodiversité marine mondiale. Pollution, activités humaines et surpêche représentent autant de menaces pour cette biodiversité méditerranéenne.
Un des joyaux de nos eaux lagunaires est l’hippocampe. Ce poisson mythique est présent dans l’étang de Thau dont il est devenu l’un des emblèmes. L’hippocampe émerveille par ses comportements remarquables, notamment dans sa façon de nager, et ses particularités anatomiques qui lui confèrent une apparence mi-cheval, mi-dragon. Il est ovovivipare : c’est bien la femelle qui pond les œufs, mais c'est le mâle qui les incube dans sa poche ventrale. L’Hippocampe moucheté Hippocampus guttulatus présente en Méditerranée deux lignées génétiques associées à des habitats contrastés : mer versus lagunes. La population d'hippocampes de l’étang de Thau est la plus grosse population connue de l'écotype [2] lagunaire de Méditerranée, et en ce sens elle est unique et importante à étudier et conserver.
Patrick Louisy, océanologue et président de l’Association Peau Bleue, nous présente, dans ce reportage, le travail d’observation et de recensement des hippocampes, réalisé dans le cadre d’un projet remarquable : Hippo-THAU, projet initié en 2005 par l’association dans le cadre du programme national EnQuête d’Hippocampes afin d’étudier les Syngnathidés [3] de la lagune de Thau. Il s’appuie sur une démarche de sciences participatives impliquant l’ensemble des usagers du territoire (plongeurs, scolaires, habitants, pêcheurs, conchyliculteurs) dans la collecte de connaissances sur cette famille encore peu étudiée en France. C’est la mobilisation de tous ces acteurs, avec jusqu’à 200 bénévoles par an, qui a permis qu’il devienne le plus important programme scientifique français sur ces animaux. Le projet reçoit également le soutien d’une dizaine de scientifiques de plusieurs instituts et laboratoires de recherche [4]. Le CPIE [5] du Bassin de Thau, qui regroupe une vingtaine de structures et gère Hippo-Thau depuis 2008, a aussi obtenu des autorités du port qu’elles aménagent le nettoyage de l'eau en surface, le temps que les bébés hippocampes aient achevé leur développement et rejoint des eaux plus profondes.
Très exploité encore il y a 20 ans, notamment comme porte-bonheur, l’hippocampe est maintenant protégé par la convention CITES [6]. Même si l’on estime à 20 millions le nombre d’hippocampes toujours commercialisés dans le monde, dans le bassin de Thau, chacun est désormais conscient de la valeur patrimoniale de cette espèce emblématique du milieu lagunaire. À travers l’hippocampe, il s’agit également de sensibiliser les publics à la fragile diversité de l’écosystème et à la nécessité de le préserver.
[1] Hotspot ou point chaud de biodiversité : zone biogéographique terrestre ou marine, possédant une grande richesse de biodiversité particulièrement menacée par l'activité humaine.
[2] Écotype : unité écologique distincte à l'intérieur d'une même espèce, produite en réponse aux conditions environnementales particulières à son habitat et qui peut correspondre à une lignée génétique distincte.[3] Syngnathidés : poissons marins de la famille Syngnathidae, au corps filiforme, au museau long et tubiforme, et chez qui l’incubation des œufs pondus par la femelle se fait dans une poche ventrale chez le mâle ; comprend 2 groupes, les hippocampes et les syngnathes.
[4] Université de Perpignan, Université de Montpellier, IRD, Ecoseas, ISEM, CEFE.
[5] Un Centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) est une association labellisée et organisée en réseau qui agit dans deux domaines d’activités en faveur du développement durable : accompagnement des territoires au service de politiques publiques et de projets d’acteurs ; sensibilisation et éducation de tous à l’environnement. CPIE du Bassin de Thau
[6] Convention sur le commerce international des espèces de faune et flore sauvages menacées d’extinction, dite Convention de Washington et connue sous son acronyme anglais CITES. Elle réglemente le passage en frontières de quelque 35 000 espèces animales et végétales, pour veiller à ce que le commerce international des spécimens d'animaux et de plantes sauvages ne menace pas leur survie.
Remerciements à Patrick Louisy pour les images sous-marines
Transcription
(Cliquez sur le texte pour positionner la vidéo)
Anne Domy
C’est un trésor bien caché.Il est là, quelque part au fond de cette lagune de 8 hectares.Rares sont ceux qui ont le privilège de l’observer de si près.Pour le trouver, il faut bien chercher.Voilà 15 ans que ce passionné se mouille pour ce drôle de petit cheval de mer.Des parties de cache-cache souvent corsées car l’hippocampe ne se laisse pas approcher si facilement.
Patrick Louisy
Ce n’est pas très facile à trouver.Quand on le voit dans l’eau en fait ben on le voit pas parce que, il tourne le dos, il est vautré au fond, et il est très, très difficile à distinguer.
Anne Domy
Il ne ressemble à aucun autre.Mi-cheval, mi-dragon, avec de curieux petits yeux de caméléon.Les tête-à-tête avec lui ont toujours quelque chose d’un peu magique.
Patrick Louisy
C’est quand même assez particulier à voir effectivement.Ça fait toujours plaisir d’en rencontrer un.Et ce qui est intéressant c’est de voir comment il se comporte, c’est-à-dire on le voit respirer, on le voit se déplacer en bougeant ses nageoires, là ça ondule comme ça.C’est vraiment un poisson assez extraordinaire et en même temps c’est quand même, ça a tout d’un poisson, on le voit respirer comme un poisson, on le voit nager comme un poisson.
Anne Domy
C’est l’emblème du bassin de Thau, une star plutôt farouche qui ne se laisse photographier que pour la bonne cause.Car derrière chaque cliché, au-delà du spectacle pour les yeux, ces séances photos aquatiques ont surtout un enjeu scientifique.Patrick Louisy et son association recensent et mesurent tous les hippocampes qu’ils croisent dans la lagune.Difficile de savoir combien ils sont mais une chose est sûre, ceux qui y vivent sont uniques au monde.Il y a encore une vingtaine d’années sur le bassin de Thau, les professionnels en pêchaient sans compter.
Claudia Azaïs
À cette époque-là on avait des clients qui venaient et qui nous disaient, ouah c’est magnifique l’hippocampe et tout, on peut en avoir.Et on se prêtait au jeu en disant oui, il y a pas de souci, on en a, on peut les faire sécher, on peut les vernir, on peut vous les vendre et repartir avec un souvenir du bassin de Thau.Et au jour d’aujourd’hui, on a vraiment conscience qu’on a fait une énorme bêtise.
Anne Domy
Depuis, quand elle relève des hippocampes dans ses filets, ses habitudes ont radicalement changé.
Claudia Azaïs
Pour le préserver, la différence avec avant c’est que, au jour d’aujourd’hui, quand on pêche les hippocampes on les rejette aussitôt, plus question d’aller piocher dans cette ressource, c’est hors de question.
Anne Domy
20 millions d’hippocampes sont encore commercialisés chaque année dans le monde, ils porteraient bonheur à leur propriétaire.Sur le bassin de Thau, le vrai bonheur c’est qu’on commence enfin à ne plus croire à ces légendes.
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