Fragments forains par le Théâtre du Radeau
Notice
En 1990 est reprise l'adaptation et la mise en scène par François Tanguy de Woyzeck de Büchner, sous le titre Woyzeck – Büchner – Fragments forains. Le Théâtre du Radeau propose une traversée originale de cette écriture fragmentaire. Extraits du spectacle et interview de François Tanguy.
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Éclairage
En 1837, Büchner travaille à la composition de sa dernière pièce, Woyzeck. Celle-ci s'inspire d'un fait divers qui vit le soldat Woyzeck assassiner sa compagne à Leipzig en 1821. Le jeune homme fut exécuté en 1824. Pour son projet, Büchner lit notamment l'expertise médicale du criminel. Dans la pièce, Woyzeck subvient aux besoins de sa famille en se livrant aux expériences d'un médecin et en assistant un capitaine de garnison. Les mauvais traitements qu'il reçoit le font tomber dans la folie. Jaloux, Woyzeck tue Marie, sa femme, qu'il soupçonne d'avoir une liaison avec le tambour-major. L'œuvre est demeurée inachevée. Nous ne la connaissons aujourd'hui que sous la forme de quatre manuscrits qui sont autant d'étapes du travail d'écriture du dramaturge. Cette forme fragmentaire a grandement influencé l'écriture dramatique moderne contemporaine et nomment le théâtre épique conçu par Bertolt Brecht. La discontinuité des scènes et l'autonomie des différents tableaux vont à l'encontre du modèle aristotélicien de la fable. Répartie en vingt-cinq scènes, l'action se passe en vingt-et-un lieu différents. Par ailleurs, plusieurs points de vue sur le monde sont proposés sans qu'aucun ne soit privilégié. Max Reinhardt fut le premier à adapter l'œuvre et à la mettre en scène en 1913. De cette version, Alban Berg s'inspira pour composer en 1925 son opéra, Wozzeck. Werner Herzog adaptera quant à lui la pièce pour le cinéma (Woyzeck, 1979).
En 1989, François Tanguy adapte et met en scène la pièce, sous le titre Woyzeck – Büchner – Fragments forains lors du Festival d'Automne au Théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis. Le texte français a été établi par Mady Tanguy. A l'occasion de la reprise du spectacle à Toulouse, le journal « 12-13 » (FR3) du 5 janvier 1990 réalise, au Théâtre de la Fonderie du Mans, un reportage sur la dernière création du Théâtre du Radeau. A celle-ci huit comédiens, dont François Tanguy, participent. Lors d'un entretien, François Tanguy souligne l'analyse sociale, philosophique et politique qui traverse l'ensemble de la pièce. Le metteur en scène ne souhaite pas proposer une reconstitution de la fable de Woyzeck mais cherche bien plutôt à montrer « le processus d'une écriture en mouvement ». Jouant avec la forme fragmentaire de l'œuvre, explorant les manques, les ratures et les jointures du texte, la compagnie enquête sur le langage de l'œuvre résonnant dans l'espace théâtral. Le dialogue permanent entre les corps des comédiens, les éclairages, la réalisation sonore et les éléments de décor (palissade, chaises et tables en bois) participe à ouvrir le sens du drame. Le va-et-vient de la matière et la traversée des mots font se rejoindre le concret et l'abstrait en une écriture scénique originale.