Tartuffe de Molière, mis en scène par Roger Planchon

03 juillet 1977
03m 48s
Réf. 00262

Notice

Résumé :

Créée en 1973 avec le TNP, la mise en scène de Tartuffe par Planchon est reprise au Théâtre de la Porte Saint-Martin à Paris. Extrait des scènes 5 à 7 de l'acte IV, où Elmire prend Tartuffe au piège en faisant semblant de céder à ses avances afin de le démasquer devant Orgon.

Date de diffusion :
03 juillet 1977
Source :
Compagnie :
Fiche CNT :

Éclairage

Si Molière avait suscité des réactions vives avec L'Ecole des femmes en 1662, c'est cependant avec Tartuffe qu'il soulève le plus gros scandale de sa carrière. Sa troupe joue une première version de la pièce, les trois premiers actes seulement, devant le Roi et la Cour en 1664. Mais cette comédie, qui moque le parti dévot en la personne de Tartuffe, s'attire immédiatement l'hostilité de la Compagnie du Saint-Sacrement, un groupe religieux puissant, qui parvient à la faire interdire. Le chef de troupe est accusé d'impiété et de blasphème, et l'archevêque de Paris excommunie d'avance les fidèles qui se risqueront à aller voir la pièce. Malgré l'appui du Roi, il faudra à Molière cinq années de lutte et d'importantes modifications de son texte pour obtenir l'autorisation de le faire jouer : représenté en 1669, Tartuffe connaît alors un triomphe sans précédent, à la mesure de son scandale.

Après avoir mis en scène la pièce une première fois en 1962, Roger Planchon s'en empare de nouveau en 1973 et la présente tous les ans en tournée jusqu'en 1977. Saluée par la critique mais controversée pour son propos provocateur, sa mise en scène donne à voir en Tartuffe un séduisant jeune homme libertin qui suscite de la part d'Orgon un amour homosexuel éperdu. Planchon assume lui-même le rôle, comme pour réaffirmer son importance face à celui d'Orgon, qu'endossait Molière en son temps. L'action se tient dans une maison en travaux, ce qui figure les changements sociaux et politiques profonds qui surviennent à la fin de la pièce, avec l'affirmation du pouvoir absolu du Prince.

Voir Tartuffe mis en scène par Ariane Mnouchkine

Céline Candiard

Transcription

Présentateur
A la porte Saint-Martin, il y a un petit chef-d’œuvre de théâtre qu’on reprend comme ça de temps en temps, quand le TNP en a peut-être besoin au fond, c’est un peu le Harold et Maud de chez Jean-Louis Barrault, c’est Tartuffe de Planchon. Alors Tartuffe de Planchon c'est une... même pas une adaptation, c’est le chef-d'œuvre de Molière, joué, mis en scène par Planchon et ses comédiens, il y a Nelly Borgeaud dans Elmire, il y a Jacques Debary dans Orgon.
Roger Planchon
Votre scrupule est facile à détruire. Vous êtes assurée ici d’un plein secret, et le mal n’est jamais que dans l’éclat qu’on fait. Le scandale du monde est ce qui fait l’offense, et ce n’est pas pécher que pécher en silence.
Nelly Borgeaud
Enfin, je vois qu’il faut se résoudre à céder, qu’il faut que je consente à vous tout accorder, et qu’à moins de cela, je ne dois point prétendre qu’on puisse être content et qu’on veuille se rendre. Sans doute, il est fâcheux d’en venir jusque-là et c’est bien malgré moi que je franchis cela, puisque l’on s’obstine à m’y vouloir réduire, puisqu’on ne veut point croire à tout ce qu’on peut dire et qu’on veut des témoins, qui soient plus convaincants. Il faut bien s’y résoudre et contenter les gens, si ce consentement porte en soi quelques offenses, tant pis pour qu’il me force à cette violence, la faute assurément n’en doit pas être à moi.
Roger Planchon
Ah oui madame, on s’en charge. Et la chose de soi…
Nelly Borgeaud
Ouvrez un peu la porte, et voyez, je vous prie, si mon mari n’est pas dans cette galerie.
Roger Planchon
Qu’est-il besoin pour lui du soin que vous prenez ? C’est un homme entre nous à mener par le nez. De tous nos entretiens, il est pour faire gloire, et je l'ai mis au point de tout voir sans rien croire.
Nelly Borgeaud
Il n’importe. Sortez, je vous prie, un moment. Et partout là-dehors voyez exactement.
(Silence)
Jacques Debary
Voilà, je vous l’avoue, un abominable homme, je n'en puis revenir. Et tout ceci, m’assomme.
Nelly Borgeaud
Quoi, vous sortez si tôt ? Vous vous moquez des gens, rentrez sous le tapis, il n’est pas encore temps. Attendez jusqu’au bout pour voir les choses sûres, et ne vous fiez pas aux simples conjectures.
Jacques Debary
Non, rien de plus méchant n'est sorti de l’enfer.
Nelly Borgeaud
Mon Dieu ! l'on ne doit rien croire trop de léger. Laissez-vous bien convaincre, avant que de vous rendre, et ne vous hâtez point, de peur de vous méprendre.
(Silence)
Jacques Debary
Tout conspire, madame, à mon contentement. J’ai visité de l’œil tout cet appartement, personne ne s’y trouve, et mon âme…