L'Illusion comique de Corneille, mis en scène par Georges Wilson au TNP de Chaillot
Notice
Interview du metteur en scène Georges Wilson qui évoque sa fascination pour cette pièce de jeunesse, ce « monstre » alors peu joué de Corneille : auteur visionnaire, Corneille propose ici une réflexion sur le spectacle vivant et ses moyens, réflexion que la concurrence du cinéma rend de nouveau actuelle. Extraits du début de la pièce, acte I et premières scènes de l'acte II.
Éclairage
Né à Rouen en 1606, Corneille est le premier dramaturge français de métier que la postérité retiendra. Sa carrière commence à l'époque où le théâtre à Paris, financièrement encouragé par le pouvoir royal, devient une activité professionnelle à part entière : inspirés par l'exemple des Italiens, dont plusieurs séjours dans la capitale française ont séduit le public, les comédiens gagnent en virtuosité et leur métier se structure sur le modèle de celui des artisans. Pierre Corneille, issu d'une famille bourgeoise, est d'abord tenté par le métier d'avocat avant se lancer dans la littérature. Ses premières pièces, à commencer par Mélite en 1629, sont des comédies.
Corneille est encore un jeune auteur lorsqu'il fait représenter L'Illusion comique en 1636 au Théâtre du Marais, la jeune troupe en plein essor qui fait alors concurrence à celle du Roi à l'Hôtel de Bourgogne. Comme plusieurs pièces de la même époque (Célinde de Baro en 1629, La Comédie des comédiens de Gougenot en 1633), c'est une comédie écrite à la gloire du théâtre, mettant en scène les aventures d'un jeune couple de comédiens en jouant sur l'illusion théâtrale. Afin de mettre en valeur une nouvelle recrue de la troupe, un comédien spécialisé dans les rôles de capitans, Corneille y intègre le rôle fantaisiste de Matamore.
La mise en scène proposée par Georges Wilson à Chaillot en 1966 s'inscrit dans la tradition du Théâtre National Populaire et de Jean Vilar : il s'agit avant tout pour lui de mettre un grand classique à la disposition du plus grand nombre. Pour cela, il a recours à des costumes historiques qui permettent aux spectateurs d'identifier la pièce comme une œuvre ancienne, mais il fait appel au compositeur Georges Delerue, associé au cinéma de la Nouvelle Vague, pour donner au spectacle une atmosphère de modernité. Quant à la « tragédie » du cinquième acte, Wilson choisit de la démasquer comme illusion en la plaçant sur des tréteaux de théâtre, la désignant ainsi comme un numéro à part, au même titre que les bouffonneries de Matamore, dont il assume lui-même le rôle.