Les Précieuses ridicules, mises en scène par Jérôme Deschamps et Macha Makaïeff au Théâtre National de Bretagne
Notice
Les comédiens François Morel et Bruno Lochet conversent avec des passants pour mieux observer leurs contemporains, comme le faisait Molière. Extraits du spectacle, scènes 4, 7 et 9. Interview de Jérôme Deschamps qui revendique pour la pièce un propos actuel, ancré dans une société où les gens peinent à s'inscrire.
Éclairage
Lorsque la troupe de Molière crée Les Précieuses ridicules en 1659, la petite pièce en un acte est conçue comme une « farce », une courte comédie légère jouée à la suite d'une pièce longue pour compléter la soirée théâtrale. Présentée à la suite d'une reprise de Cinna de Corneille, la pièce connaît un vif succès et offre de belles recettes à la troupe. En l'écrivant, Molière reprend un sujet d'actualité déjà traité par d'autres, particulièrement les Italiens, qui avaient joué en 1656 une Précieuse au Théâtre du Petit-Bourbon : le snobisme et les originalités de langage inspirés par les salons de Mme de Rambouillet et de Mme de Scudéry donnaient matière à de riches effets comiques. Pour autant, Molière se défend d'avoir voulu attaquer ce que la démarche précieuse comporte de révolte et de recherche littéraire ; les cibles de sa comédie seraient plutôt les lectrices provinciales et naïves des romans précieux, sortes de Mme Bovary avant la lettre.
Pour cette pièce, où il reprend son rôle de Mascarille déjà applaudi dans L'Etourdi et Le Dépit amoureux, Molière s'offre un duo de choix avec le farceur Jodelet, vedette vieillissante qu'il est parvenu à débaucher de la troupe du Marais. Le texte garde quelques traces des marges d'improvisation ménagées par Molière pour son illustre camarade.
Devenue célèbre par la diffusion télévisée des Deschiens au cours des années 1990, la troupe de Deschamps et Makaïeff s'approprie la comédie de Molière avec naturel, revendiquant un statut théâtral comparable à celui d'un farceur comme Jodelet. Jérôme Deschamps se réjouit de proposer un théâtre d'acteurs, où les plages d'improvisation sont exploitées et où le public est heureux de retrouver des comédiens qu'il a aimés dans d'autres spectacles. Pour autant, le plaisir du jeu n'empêche pas la violence sociale qui se joue dans la pièce de Molière, bien loin de la conversation de salon que l'on y voit trop souvent.