Avec Jan Fabre, une fresque médiévale au festival d'Avignon

05 juillet 2001
02m 51s
Réf. 00740

Notice

Résumé :

Provocation, scandale ? En 2001, Bernard Faivre d'Arcier livre la Cour d'honneur du festival d'Avignon au flamand Jan Fabre, dont les spectacles suscitent souvent la polémique. Présenté comme un « conte de fées médiéval », Je suis sang évoque le sombre Moyen Age et les atrocités commises au nom du catholicisme.

Date de diffusion :
05 juillet 2001
Source :
Artistes et personnalités :

Éclairage

Quatre ans avant d'être « artiste associé » du festival d'Avignon, le metteur en scène et chorégraphe flamand Jan Fabre y occupe déjà, en 2001, la Cour d'honneur du Palais des Papes, avec Je suis sang, à l'invitation de Bernard Faivre d'Arcier. Depuis Maurice Béjart en 1967, les plus grands noms de la danse contemporaine (Pina Bausch, Merce Cunningham, Martha Graham, William Forsythe), sont passés par le festival d'Avignon jusqu'y compris dans le saint des saints, cette fameuse Cour d'Honneur, lieu de consécration et parfois de dispute. En 2001, Jan Fabre est déjà adoubé, depuis longtemps, par les plus grandes scènes internationales (notamment le Théâtre de la Ville à Paris), même si la polémique accompagne le plus souvent ses créations. Mais Avignon, c'est autre chose... Au journal d'Antenne 2, dans son introduction au reportage de Michel Strulovici, Claude Sérillon parle de « provocation » et de « scandale ». Dans ce spectacle qui puise son inspiration dans la fureur du Moyen Age, « c'est sans tabou que le chorégraphe exprime l'atrocité », commente Michel Strulovici. En fait, contre toute attente, et à l'opposé de 2005 où sa ligne artistique suscitera une intense controverse (voir ce document), la présence de Jan Fabre en 2001 n'occasionnera pas de remous majeurs, et Je suis sang, présenté comme un « conte de fées médiéval » et spécialement conçu pour l'espace de la Cour d'honneur du Palais des Papes, est plutôt bien accueilli, par le public comme par la critique.

En « guerrier de la beauté », Jan Fabre définit son travail comme « une recherche de la beauté en tant qu'hommage à l'absence et à l'indicible ». Dans ses mises en scène, il oscille de l'attraction à la répulsion, de la discipline au chaos dans une sorte de cynisme métaphysique. Traversé de réminiscences médiévales, et faisant allusion au « sombre » univers du Moyen Age comme aux atrocités commises au nom du catholicisme, dont le Palais des Papes serait l'effigie, Je suis sang manifeste pour Jan Fabre une sorte de mysticisme organique. Pour lui, malgré l'évolution de sa conscience, les progrès de la raison et de la science, la globalisation et la mondialisation, aucune nouvelle image mentale et physique de l'homme n'a véritablement fait surface depuis le Moyen Age...

Jean-Marc Adolphe

Transcription

Présentateur 1
Michel on connaît le talent de Bernard Faivre d'Arcier, le directeur du festival, on sait qu’il aime le classique mais je sais aussi qu’il ne répugne pas à la provocation voire au scandale et du scandale il risque d'y en avoir, non ?
Présentateur 2
Alors là comme on dit populairement, il y est allé très, très fort. Alors d’abord il faut comprendre et savoir qui est le personnage au centre de cette provocation formidable. C’est Jan Fabre. D’abord Jan Fabre est flamand, il est un des plasticiens les plus connus de la planète et des grands musées. Il est spécialiste des petites bestioles à cordes, des scarabées avec lesquels il fait des tableaux. Et il est aussi chorégraphe et c’est pour ça qu’il est là. Durant 4 soirées, uniquement 4 soirées et uniquement ici à Avignon, il monte un ballet. Un ballet sanglant, terrible, violent au coeur du moyen âge. Michel Strulovici et Patrick Voix ont pu assister aux premières représentations de cet évènement de cette véritable transgression. Ils n’en sont pas revenus et ne savent toujours pas comme on dirait chocking en flamant.
Journaliste
C’est à la nuit tombée que les contes les plus fantastiques prennent chair et sang.
Comédien
Nous sommes en 2001 après Jésus Christ, et nous vivons toujours au moyen âge.
Journaliste
C’est cette barbarie et cette stagnation, ces temps obscurs que nous danse la compagnie du flamand Jan Fabre.
(Bruit)
Journaliste
Dans ce monde, même les jeunes filles s’adonnent à la curée. Couleur de bataille et de torture, de souffrance et d’agression, l’univers des hommes copule avec la tragédie.
Jan Fabre
Je pose des questions sur comment nous nous comportons dans ce siècle. Notre monde a changé. Nous vivons à l’époque de l’informatique, de l’e-mail, mais notre esprit et notre coeur vivent toujours à l’époque du moyen âge.
Journaliste
Et c’est sans tabou que le chorégraphe exprime l’atrocité.
Comédien
Dans la vie, deux choses sont sûres et peut être n’en font-elles qu’une, nous allons mourir et nous transgresserons des limites.
Comédienne
[inaudible]
Journaliste
Dans ce palais des papes où se jouent depuis 50 ans des drames universels jamais la cruauté des faits ne s’était autant alliée à la crudité des corps ; les rois sont nus.