Lutte contre les incendies de forêt : étude du feu et vidéo-surveillance

08 septembre 1999
04m 58s
Réf. 00075

Notice

Résumé :

En collaboration avec l'INRA, les sapeurs-pompiers forestiers des Landes étudient, lors d'exercices grandeur nature, les mécanismes d'éclosion et de propagation des incendies dans la pinède. Parallèlement, un système de vidéo-surveillance du massif forestier, depuis les pylônes d'observation, est testé.

Type de média :
Date de diffusion :
08 septembre 1999
Source :

Éclairage

La lutte contre les incendies de forêt dans le massif landais s'appuie sur une observation de plusieurs siècles et sur les recherches menées avec les moyens de l'époque.

Pour limiter les conséquences des incendies, l'expérience a conduit les forestiers aquitains à essayer d'organiser la forêt en damiers en alternant prairies, cultures et pignadars (parcelles de pins). Elle est aussi à l'origine des pare-feux, sorte de longs couloirs, souvent à sable nu, parfois transformés en route, séparant les parcelles de pins.

En 1893, l'ingénieur agent-voyer en chef, M. Clavel et le directeur de l'observatoire de Floirac font un travail de recherche pour le compte du Conseil général de la Gironde sur la sécheresse qui sévit cette année là, et l'évolution climatique. Ils retrouvent des documents qui permettent de suivre l'évolution des précipitations et des températures dans la région sur plusieurs siècles.

L'observation a permis à ces sylviculteurs de comprendre que le feu prend et se propage par le sous-bois. Et plus ce sous-bois est dense et haut, plus le feu est dangereux.

Dans les Landes des techniciens expérimentent du matériel pour nettoyer la forêt à moindre coût. Le rouleau landais, un tube en fer avec des lames qui coupent, écrasent et enterrent la végétation du sous-bois, est le produit de ces recherches. Tiré par un tracteur, il est très efficace mais contesté par les écologistes.

Ces forestiers cherchent à comprendre le mécanisme du feu, son démarrage et son évolution. Ils ont ainsi mis au point une technique de lutte particulière en attaquant par les flancs en remontant vers la pointe.

Dans les années 1940, le docteur Mathio observe le développement du feu lors des incendies et consigne ses observations dans des livres et articles de revues professionnelles.

En 1994, à l'initiative du SDIS, Service Départemental Incendie et Secours, débute une série d'expériences dans les Landes pour analyser et définir dans quelles conditions le feu peut se déclencher, se propager puis se développer. Cette recherche financée par le département, la région et l'État, réalisée par le SDIS des Landes, l'INRA et Météo France et les sylviculteurs avec l'Union Landaise de DFCI (Défense de la Forêt Contre l'Incendie), s'appuie sur des feux volontaires et contrôlés. Des petites parcelles de 100 mètres carrés servent à définir les conditions de déclenchement d'un incendie et sa propagation. En 1999, elles font deux hectares ; on y étudie la progression du feu, mais aussi l'utilisation des mouillants pour l'éteindre et éviter la reprise. Ainsi j'ai pu voir, lors d'une de ces expériences, le feu attaqué à l'eau pure reprendre immédiatement derrière le véhicule de lutte. Mais attaquées avec de l'eau et du mouillant, les flammes ne réapparaissent pas. Cela laisse aux pompiers le temps de circonscrire le feu avant de l'éteindre complètement.

Ces recherches sont à l'origine des indices de risque d'incendie et de propagation de feu dans les massifs forestiers, indices calculés tous les jours par Météo France et transmis aux Centres Opérationnels Départementaux Incendie et Secours des départements forestiers, les CODIS. Les 120 camions citerne forestiers landais sont équipés de cuve de mouillant et de doseur.

Autre expérience, 19 observatoires - tours métalliques hautes de 35 à 45 mètres – permettent la surveillance du massif de mars à octobre. Le premier réseau organisé et relié à des PC par téléphone est entré en service en 1942. Peu de choses avaient évolué dans ces tours de 1942 à 2000, date à laquelle la vidéo et l'informatique commencent à être performantes. Des recherches débutent alors, mais il faudra attendre 2007 pour la mise en place d'un système de vidéo surveillance de la forêt  : Prodalis. Plus de guetteurs dans les tours, un opérateur est au CODIS, à Mont-de-Marsan. Il surveille sur un écran l'ensemble du massif. Cette observation est organisée en fonction des indices de risque donnés par Météo France ; d'autres opérateurs peuvent venir en renfort lorsque les risques d'incendie sont élevés.

Jean-Paul Saint-Marc

Transcription

(Musique)
Journaliste
Bonsoir, Aquitaine Première dans le feu de l’action ce soir, avec cet exercice grandeur nature des sapeurs-pompiers forestiers landais, une semaine destinée à l’étude des incendies de forêt, pour une meilleure connaissance du feu et la formation des personnels d’intervention. Des pompiers les bras croisés devant la forêt en flamme, dans cette posture inhabituelle pour les soldats du feu, il s’agit d’étudier les mécanismes d’éclosion et de propagation des incendies dans la pinède. Ce matin-là, le combustible testé, une parcelle de 2ha de pins maritimes âgés de 10 ans.
Jean-Luc Dupuy
Là, je vais me positionner au jalon suivant, donc il y a 10m entre deux jalons, et je vais estimer quand le feu va passer au droit de ce jalon et je saurais qu’il a passé, qu’il a parcouru 10m en tant de minutes. Il faut que j’y aille.
(Bruit)
Jean-Yves Perez
On a la chance donc d’avoir à intervenir dans une forêt de production, une forêt cultivée, forêt accessible, forêt entretenue, donc forêt plus facile à protéger qu’une forêt laissée à l’abandon ou pas rentable. Ce n’est pas pour ça que tout est gagné. Il faut absolument se remettre en question et s’adapter donc à tous les types d’intervention parce que le feu de forêt est un phénomène complexe qui répond à plusieurs facteurs ; et à chaque fois c’est tout le temps différent donc il faut toujours s’adapter.
Journaliste
S’adapter pour les pompiers landais a consisté au cours de ces 10 dernières années à changer certaines méthodes. S’ils attaquent toujours le feu sur son front pour le stopper, spécificité bien régionale, ils utilisent désormais un additif chimique mélangé à 2/1000 dans l’eau comme pour les feux d’hydrocarbures. Une mousse très utile pour lutter contre les reprises d’incendie.
Richard Desbieys
On fabrique de la mousse en périphérie du feu, on fait un tapis de mousse de quelques centimètres, comme vous pouvez voir, qui permet là de limiter les reprises de feux ; parce qu’en fait la mousse qui est imbibée d’eau maintient le combustible en humidité, et évite donc les reprises.
Journaliste
Ajoncs, fougères, molinies et bruyères, c’est à partir de ce type de sous-bois que démarre les feux de forêts. Il convient donc de toujours mieux les connaître: aussi chaque relevé effectué sur l’incendie sera par la suite décrypté.
Jean-Luc Dupuy
Au sol, l’essentiel de la végétation a brûlé. On a vu de l’herbe, beaucoup là. Là par exemple où le feu n’est pas passé, cette herbe, ici, a complètement disparu y compris les parties vertes qui ont beaucoup d’eau. Ça, c’est un élément qui peut nous aider à comprendre comment s’est propagé le feu dans ce milieu. Et ensuite, ici ce qui est frappant, c’est que tout ce qui est strate arbustive, donc de l’ordre de 1m de haut, la partie sèche du végétal c’est-à-dire qui était jaune, a brûlé, et toutes les parties vertes, vous en voyez ici, ça c’est de l’ajonc épineux, toutes les parties vertes sont restées.
Inconnu
Au niveau température on a réussi à monter aux environs de 800°C, vitesse de propagation du feu, on a une moyenne de 3km/h avec des pointes de l’ordre de 10km/h dans la partie centrale du feu.
Journaliste
Grâce à ces travaux, uniques en Europe, un calendrier précis de prévision des feux pourra être établi en fonction de la saison, des conditions météo, du taux d’humidité de l’air et de la végétation. Autre expérience menée ces jours-ci dans les Landes, la vidéo surveillance du massif forestier. Un système qui pourrait venir renforcer la surveillance active effectuée par les pompiers au quotidien, des pompiers qui veillent sur le moindre départ de feu. Si le massif d’Aquitaine, le plus vaste en Europe reste préservé contrairement aux forêts du sud-est de la France, c’est sans doute aussi grâce à ces pompiers guetteurs.
Franck Nadal
Nous avons un pylône ici, il y en a un assez proche à Labouheyre, un peu plus loin à Escource, et en recoupant plusieurs visées, on arrive à avoir une précision de l’ordre de 200m environ. Donc pour les secours qui arrivent sur le feu, c’est vraiment très précis, oui.
Journaliste
Dans l’avenir, l’œil humain pourrait bien être secondé par ce système vidéo composé de caméras numériques braquées sur l’horizon et d’une unité de traitement informatique. Quel genre d’image fait déclencher l’alerte ?
Hervé Hoff
En fait c’est un feu précoce, c'est une fumée précoce donc ce qu’on appelle un pied de fumée, une petite fumée qui monte vers le ciel avec… qui est très caractéristique des départs de feu.
Journaliste
Un support image en plus de l’alerte donnée par le guetteur, devrait améliorer la prise de décision par le poste de commandement quant aux moyens nécessaires à chaque intervention. Alors qu’on célèbre avec beaucoup d’émotion le cinquantenaire des grands incendies de 1949 dans le sud-ouest, les pompiers forestiers peaufinent leur méthode pour le prochain millénaire. Voilà c’est la fin de cette Aquitaine première, dans un instant le journal régional, je vous souhaite une bonne soirée.