Le musée archéologique de Dax
Notice
Découverts lors des fouilles de 1979 à Dax, les vestiges de ce que l'on interprète alors comme un temple gallo-romains édifié au IIe siècle de notre ère, depuis recouverts par un complexe HLM, ont donné lieu à la création d'un musée archéologique ouvert depuis le début de l'été 1986.
Éclairage
Les origines de Dax sont gallo-romaines. Sa fondation a été décidée sous l'empereur Auguste, probablement vers 16-13 av J.-C. Les eaux thermales de Dax, déjà appréciées dans l'Antiquité, sont fréquemment données comme raison du choix de ce lieu par le pouvoir romain pour en faire une cité. Il s'agit cependant plus vraisemblablement de raisons stratégiques, comme la position de Dax sur les voies de circulation vers l'Espagne et l'intérêt que le site offre pour le franchissement de l'Adour, facilité par le resserrement de la barthe à cet endroit [1]. La cité d'Aquae Tarbellicae [2] est donc fondée autour d'une peuplade principale, les Tarbelles, installés dans la région avant l'arrivée des romains [3]. Le nom ethnique disparaît très vite de la dénomination courante, laissant place à la mention de cité des Aquenses, la référence thermale constituant un marqueur identitaire suffisant [4].
Malgré la précocité de cette décision impériale, les vestiges architecturaux gallo-romains les plus anciens retrouvés à Dax ne datent que du Ier ou IIe siècle de notre ère, ce qui constitue un délai tout à fait normal entre la décision politique de créer une ville et l'apparition d'une urbanisation à la romaine. Depuis le XXe siècle surgissent régulièrement des vestiges de cette ville gallo-romaine, au gré des diagnostics et fouilles archéologiques précédant les grands chantiers urbains. C'est ainsi qu'en mars 1978, des vestiges importants sont mis au jour lors d'une fouille archéologique dans le secteur de l'Ilot central, où était prévue la construction d'un complexe HLM. Les contours du bâtiment sont bien visibles sur la photographie aérienne prise vers la fin de la fouille. Cette vue depuis le ciel dévoile l'ampleur du monument, dont la moitié orientale est enfouie sous la rue Cazade et un îlot de bâtiments.
Prenant en compte l'importance du monument, la municipalité décide dès 1979 de sauvegarder ces vestiges gallo-romains en modifiant le projet immobilier initial et en les intégrant dans le sous-sol du bâtiment d'habitation. L'emprise initiale du parking est réduite, pour laisser la place à une crypte archéologique dans laquelle les fondations du monument sont conservées. Le site archéologique ouvre au public à l'été 1986. On y découvre les fondations en moellon du bâtiment, très bien conservées. Le mur extérieur est bâti en grand appareil, c'est-à-dire en blocs de grandes dimensions. L'élévation du monument a presque entièrement disparu, sauf en de très rares endroits. La nature du terrain d'implantation étant marécageuse, d'impressionnantes constructions semi-cylindriques accolées aux fondations servent de contreforts.
Après des hésitations, Brigitte Watier, l'archéologue en charge du chantier en 1978-1979, interprète ce monument comme un temple [5]. Erigé sur un haut podium, le monument de 31 mètres de long et 15 mètres de large correspondrait au modèle italique [6]. À l'arrière de l'édifice, à l'ouest, une esplanade aurait été aménagée sur une terrasse artificielle de terre rapportée, qui correspondrait à peu près à l'essentiel des fondations de la crypte.
Cependant, une nouvelle hypothèse archéologique développée par Alain Bouet, professeur d'archéologie à l'Université Toulouse II-Le Mirail, modifie complètement depuis 2010 la lecture du site et l'identification du bâtiment [7]. Du point de vue architectural, le dispositif de contreforts semble démesuré pour soutenir une simple terrasse et correspondrait plutôt à une construction en élévation. Alain Bouet décrit donc à l'ouest une pièce annexe accolée à un bâtiment principal, au lieu d'une terrasse aménagée sur de puissantes fondations. Dans cette nouvelle lecture du plan du monument, les vestiges correspondent à une basilique à déambulatoire périphérique de 43 m de long et 27 m de large, avec une colonnade interne. Deux pièces annexes rectangulaires [8], de 14 m de large, encadrent le bâtiment principal. Dans ce secteur de l'Ilot central, qui correspond au forum [8] de la cité d'Aquae Tarbellicae, se trouvait une basilique civile romaine, où se déroulaient de nombreuses activités de la vie civique de la cité, notamment judiciaires.
Aujourd'hui, la crypte archéologique est accessible au public en visite guidée. Le billet se retire au musée de Borda, au 11 bis rue des Carmes. Un parcours d'exposition permet de replacer le monument dans son contexte et les pièces archéologiques les plus importantes du musée y sont présentées [10].
[1] Une barthe est une prairie inondable.
[2] En latin, les "Eaux des Tarbelles".
[3] Sur les Tarbelles, voir BOST, Jean-Pierre, "Dax et les Tarbelles", L'Adour maritime de Dax à Bayonne, [Actes du 53e congrès d'études régionales de la Fédération historique du sud-ouest, Dax-Bayonne, 27 et 28 mai 2000], Pessac, p. 21-44.
[4] Sur l'histoire de Dax gallo-romaine, voir BOST, Jean-Pierre, "Dax, cité gallo-romaine (Ier-VIe siècles après J.-C.)", Bulletin de la Société de Borda, 2001, n° 464, 4, p. 437-458.
[5] Sur le monument de l'Ilot central, voir WATIER, Brigitte, Dax, les ruines de l'Ilot central, Dax, 1987, 18 p.
[6] Le temple de type italique se trouve sur un podium, une plateforme accessible par un escalier monumental, comme la Maison Carrée de Nîmes.
[7] Voir JEAN-COURRET, Ezechiel, CAVALIER, Laurence et BOUET, Alain, "À la recherche du forum perdu d'Aquae Tarbellicae (Dax)", Gallia, 2011, 68, 2, p. 155-193.
[8] Il faut restituer une pièce annexe à l'est par symétrie, sous la rue Cazade et l'îlot de bâtiments.
[9] Le coeur de la cité à l'époque romaine, où se trouvent les principales institutions civiques et religieuses.