Landes, Lussagnet : le plus grand stockage de gaz naturel
Notice
Présentation du réservoir de gaz le plus important en France. Il est situé à Lussagnet dans les Landes.
Éclairage
Entre Bas-Armagnac et Tursan, le nom du modeste village de Lussagnet (1) demeurerait inconnu du grand public si, à partir de 1957, le gaz naturel du gisement de Lacq, mis en exploitation la même année, n'y était pas stocké dans un aquifère (2) de 2,4 milliards de m3 de capacité.
Le stockage souterrain de gaz constitue en effet un maillon essentiel de la chaîne gazière car il faut moduler les écarts entre les approvisionnements relativement constants au cours de l'année et les besoins, variables suivant les saisons, la consommation domestique et les usages industriels.
Le gaz est injecté dans le sous-sol par un ensemble de puits d'exploitation, entre une zone de couverture étanche et un aquifère bien identifié. Selon les besoins et les paramètres météorologiques, on soutire donc, de fin octobre jusqu'aux beaux jours d'avril. Cette technique présente en effet toutes les garanties de sécurité publique et environnementale à condition, bien sûr, de ne pas perturber les utilisations multiples des eaux souterraines (thermalisme, géothermie, eaux minérales et potables ou irrigation) (3).
En cette fin d'année 1980, sept ans après le premier choc pétrolier et la fin des « Trente Glorieuses », la France cherche à augmenter son indépendance énergétique. Le développement du nucléaire civil est à son apogée mais le premier incident grave, qui se produit à Saint-Laurent-des-Eaux, dans le Loir-et-Cher (4), commence à poser le problème du « tout nucléaire ». Face à l'électricité, encore bon marché, le gaz, énergie « propre », devient concurrentiel et la demande s'accroît ; d'où l'extension du centre de stockage le plus important de France vers un second pôle, à Izaute, à quelques kilomètres de là.
Les projets évoqués ont bien été réalisés puisque, si la production de gaz de Lacq n'a cessé de décliner au cours des décennies suivantes (5), les deux sites aquitains contribuent toujours, en 2013, à alimenter les réseaux de transport et de distribution du Grand Sud-Ouest, d'une partie de l'Espagne et du reste de la France.
Symbolisant l'importance stratégique de ce lieu, le doublement du gazoduc entre Lussagnet et Captieux, en Gironde, annoncé fin 2012, confirme bien la place de ce centre qui représente encore 22% des capacités nationales de stockage souterrain de gaz naturel. Exploitant encore pour une trentaine d'années les 3 % du gisement restant, Total continuera de distribuer le gaz de Lacq aux seuls industriels de la région. D'où la mise en place de ces infrastructures, malgré le tarissement de la source en amont.
(1) Comme son homonyme béarnais (Lucenhet, XIIe s.), Lussagnet s'explique par le nom patronymique latin Lucianius, associé au suffixe diminutif -et, indiquant une occupation à haute époque.
(2) Formation géologique contenant de façon temporaire ou permanente de l'eau mobilisable, constituée de roches perméables et capable de la restituer naturellement et/ou par exploitation
(3) Avant de rejoindre le réseau de transport, le gaz soutiré subit trois opérations : la déshydratation qui consiste à extraire du gaz l'eau qui l'a saturé pendant sa période de stockage, la désulfuration qui permet d'extraire les traces d'Hydrogène sulfuré (H2S) présentes dans le gaz stocké et enfin l'odorisation par l'ajout de THT (TétraHydroThiophène) qui permet la détection olfactive du gaz par les usagers.
Après traitement, le gaz soutiré et comprimé à une pression suffisante pour être distribué dans le réseau de transport.
(4) Le 13 mars 1980, un accident conduisit à la fusion de 20 kg de dioxyde d'uranium du réacteur graphite-gaz no 2. Gravement endommagé, le réacteur fut indisponible pendant trois ans et demi environ. Cet accident nucléaire, porté au niveau 4 de l'échelle INES, est le plus grave jamais répertorié sur un réacteur en France
(5) Dans les années 1970, la France produit un tiers de sa consommation de gaz naturel, qui est distribué par gazoducs dans toute la France, à partir de 1965. Le gisement de Lacq, contribue alors grandement à l'essor industriel national, remplaçant le gaz de ville domestique qui était produit à partir du charbon dans des usines à gaz. Mais les réserves s'épuisent : assurant 15 % de l'approvisionnement gazier du pays dans ces années-là mais seulement 1 % en 2010.