Le musée de la mine-école à Auchel
Notice
Reportage au musée de la mine d'Auchel. Dix ans après la fermeture du dernier puits de mine, une association, formée d'anciens mineurs a restauré une ancienne mine-école des Houillères. Charles Lagache et Jacques Dournel (36 ans de mine), Jacques Deramaux (34 ans de mine) et Daniel Vos (20 ans de mine) nous font découvrir ce musée et ses activités.
Éclairage
Le musée de la mine d'Auchel ouvre ses portes en décembre 1987. Cette ouverture s'inscrit dans le sillage d'une première vague d'initiatives patrimoniales concernant les mines, à partir des années 1970 (1). À côté de projets de grande envergure, le futur Centre Historique Minier de Lewarde en particulier, se déploient en effet durant cette période toute une série de mobilisations locales, qui ont un certain nombre de points communs. Elles s'enracinent dans la même époque de fermeture des puits de l'Ouest du bassin. Face à la volonté des Houillères, mais aussi d'un certain nombre d'élus, d'effacer toutes les traces de l'exploitation minière, ces mobilisations, souvent le fruit d'anciens mineurs, visent à défendre au contraire certaines de ces traces et à tenter au moins de pérenniser les cadres de la mémoire des "gueules noires".
Le cas d'Auchel est dans cette perspective tout à fait symptomatique. L'idée du musée remonte à la fermeture du dernier puits dans les environs (1975) et provient d'un petit groupe, majoritairement d'anciens employés et ouvriers des Houillères, emmenés par Jacques Deramaux, ancien chef-géomètre-géologue et lui-même fils de mineur. Celui-ci obtient le soutien des Houillères, qui s'apprêtent alors à quitter le territoire, et surtout de la municipalité d'Auchel. Comme un certain nombre de ses semblables (à Marles, à Noeux-les-Mines), le musée, grâce à ses soutiens, a pu être installé dans une ancienne mine-école, c'est-à-dire un centre d'apprentissage dédié auparavant à l'instruction pratique des jeunes mineurs ; il a également bénéficié de dons de matériels par les Houillères. Mais ce qui caractérise avant tout le projet auchellois, et les musées similaires dans la région, c'est l'action de bénévoles passionnés, liés d'une manière ou d'une autre à l'univers de la mine et soucieux de montrer aux gens de la surface ce que pouvaient être les conditions de vie et de travail du fond. Les "mines-images" ou "mines-écoles" se révèlent dans ces conditions particulièrement précieuses : leurs fonctions pédagogiques, réaménagées pour un nouveau public (le musée d'Auchel, en plus des techniques, inclus des sections sur l'habitat ou la géologie), aident à faire saisir aux plus jeunes le contenu du métier de mineur.
A l'aube des années 2000, ce genre de musée se heurte néanmoins à un certain nombre d'interrogations. Il n'échappe pas toujours au mythe et à l'idéalisation : la référence demeure la mine du temps de Germinal, alors que le matériel et les techniques montrés sont issus plutôt de la mine de plus en plus technicisée du second XXe siècle. Par ailleurs, le musée d'Auchel, comme tant d'autres, repose beaucoup sur les qualités et les compétences professionnelles d'initiateurs et d'animateurs qui ont eux-mêmes baigné dans l'univers minier. Comment repenser ces musées quand ces anciens mineurs commencent à s'effacer ? Comment transmettre l'expérience de la mine à des générations pour qui elle ne signifie plus rien ? Il y a là autant de questions qui continuent aujourd'hui d'être posées.
(1) Olivier Kourchid, Hélène Melin, "Mobilisations et mémoire du travail dans une grande région : le Nord-Pas-de-Calais et son patrimoine industriel", Le Mouvement social, n°199, 2002, p. 37-59.