Restructuration d'un coron à Auchel

06 juin 1970
05m 36s
Réf. 00090

Notice

Résumé :

Un premier essai de restructuration urbaine à partir d'un coron a été entrepris à Auchel. Fernand Degrugillier, son maire fait la description de sa ville sur des images des cités minières ainsi que des travaux de réhabilitation des corons. Il évoque la fin de l'activité minière et les tentatives de réindustrialisation. C'est suite à la décision du ministre de l'équipement d'entreprendre des opérations de réhabilitation dans le Bassin que la cité Rimbert a été choisie pour effectuer un test. La partie technique a été confiée à deux architectes dont Monsieur Evard qui présente le projet sur une maquette.

Type de média :
Date de diffusion :
06 juin 1970
Source :
ORTF (Collection: SPECIAL NORD )
Personnalité(s) :

Éclairage

L'extrait concerne la cité Rimbert d'Auchel, construite par la Compagnie des mines de Marles entre la fin du XIXe et le début du XXe siècles après le forçage en 1867 et 1889 des fosses n°4 et n°4 bis de Marles. Cette cité, de type coron, est assez isolée. Elle se situe à 1 km au nord du centre d'Auchel. De ce fait, elle dispose d'un équipement assez complet avec une église et deux écoles, une maternelle et une primaire. Cette cité est incluse dans le périmètre classé au Patrimoine mondial par l'Unesco en 2012.

La restructuration de la cité est effectuée au tournant des années 1960-1970, soit 20 ans après la fermeture des puits 4 et 4bis, fermetures qui avaient motivé la restructuration. Cette opération est liée à la vétusté de cette cité, particulièrement prononcée dans un secteur qui n'a pas été touché par les combats de la Première Guerre mondiale et qui n'a donc pas connu de reconstruction. Parallèlement, son bon équipement, évoqué ci-dessus, et l'absence de risque d'affaissement minier, la sauvent de la destruction.

Le reportage commence par des vues aériennes de la cité, où l'encombrement des jardins par les appendices habituels (toilettes, pigeonniers, poulaillers, cabanes à outils, etc.) est particulièrement visible. Il se poursuit ensuite par l'interview du maire d'Auchel, qui insiste sur les phases de transformation de sa commune : de village-rural en ville-mine, puis en ville à reconvertir. Les images placées sur l'interview sont particulièrement révélatrices de la transformation récente d'Auchel et insistent sur sa modernité. Elles montrent en effet des pavillons dans une zone boisée ; des collectifs en forme de blocs et barres classiques des années 1960 ; puis, des zones industrielles fraîchement construites, rassemblant des hangars fonctionnalistes caractéristiques de l'architecture industrielle depuis l'Après Seconde Guerre mondiale et contrastant avec un terril visible au loin, symbole de l'économie minière passée.

La seconde partie du reportage est directement consacrée à la restructuration de la cité. Le terme évoque non seulement la réhabilitation des logements, mais aussi le travail plus large sur l'organisation de la cité minière elle-même. Il s'agit en effet de la rendre plus attractive face à de nouveaux logements dont la construction est toujours plus coûteuse que la réhabilitation d'anciennes habitations. Ainsi, dans un contexte de plein emploi durant les Trente Glorieuses, les raisons de cette opération de restructuration sont essentiellement économiques et pragmatiques, absolument pas identitaires ou patrimoniales comme cela pourrait être le cas aujourd'hui.

Le travail concret est enfin présenté à partir d'un jeu très pédagogique de maquettes et les canons de la restructuration se retrouvent ici comme dans d'autres opérations du même type : les longues barres de corons sont éclaircies pour rompre un peu l'alignement, la monotonie et "la longue perspective des corons", les petits logements de mineurs sont agrandis et des pavillons jointifs sont construits à la place de quelques barres de corons entièrement détruites. Enfin, les espaces verts et les cheminements sont pris en compte, à une époque où le développement de l'automobile, évidemment absente à la naissance de la cité, complique la circulation. En effet les longues lignes droites longeant les corons incitent à la vitesse et il s'agit donc de les briser par la restructuration.

Simon Edelblutte

Transcription

Jacky Davin
Restructuration urbaine à partir d’un coron, une opération de grande envergure entreprise dans des cités minières qui se reconvertissent. Premier essai à Auchel, ville du Pas-de-Calais que je vous propose de découvrir. Auchel, dans le Pas-de-Calais, un petit village il y a cent ans, une grande ville en 1970. Monsieur le maire, pouvez-vous nous présenter votre ville ?
Fernand Degrugillier
Oui, Auchel est une ville de 14091 habitants, située à l’extrême ouest du bassin minier, dans une agglomération de 60000 habitants. C’est une ville bien équipée, un équipement urbain complet. En 1947, j’avais encore ici quatre puits en activité qui occupaient plus de 4000 ouvriers mineurs. Et à ce jour, et bien, les puits ont été fermés, les 4000 ouvriers mineurs ont quitté Auchel ou travaillent ailleurs et en définitive, il a fallu que nous organisions d’autres façons. C’est ainsi que nous avons créé des zones industrielles où nous avons essayé d’amener des industries de remplacement pour maintenir l’activité économique. Ma foi, nous y avons réussi, pas complètement, je n’ai pas encore récupéré mes 4000 ouvriers mineurs, mais enfin, nous sommes en voie. Mais alors, un problème de logements s’est posé. Comme vous avez pu le constater, il y a des vieilles maisons des Houillères qui n’étaient pas du tout confortables et qui rendaient à notre ville un aspect triste. Et comme les Houillères avaient malgré tout un gros patrimoine de maisons, un gros patrimoine immobilier, alors à ce moment-là, nous leur avons demandé de faire quelque chose pour rendre notre ville un peu plus aguichante.
Jacky Davin
Déjà, le cinquième plan préconisait une politique d’amélioration de l’habitat. Et dans cet esprit, Monsieur David, alors sous-préfet de Béthune, avait établi un rapport sur les problèmes que posent la restructuration, l’aménagement, la modernisation et l’équipement du bassin minier du Pas-de-Calais. Monsieur David avait attiré l’attention des Houillères sur les possibilités de rénovation de certaines cités que des travaux d’un montant relativement modéré pourraient améliorer. De telles opérations devraient se révéler plus économiques que la construction d’ensembles de logements neufs et profiteraient à la fois au personnel des Houillères au personnel des industries nouvelles venant s’implanter pour prendre le relais de la mine. Faisant suite à ces démarches de Monsieur David, le ministre de l’Equipement donnait son accord au principe d’une opération test d’amélioration et de modernisation d’une cité minière. L’accord de principe ayant été donné sur l’opération test, les recherches d’une cité susceptible de se prêter à l’expérience se sont orientées vers Auchel-Bruay pour aboutir au choix définitif de la cité Rimbert à Auchel en raison notamment,
Intervenant 1
L’administration a choisi cette cité d’abord parce que dans la zone d’Auchel, il y a des zones d’emplois qui existent et d’autre part, d’autres zones d’emplois doivent être créées récemment, donc il y aura certainement un besoin d’habitats. D’autre part, le choix de cette cité était toujours guidé par une dépense limitée, dans ces conditions, nous avons choisi une cité qui avait des équipements valables. Et en particulier dans cette cité, deux écoles primaires existent, une école maternelle ainsi qu’une église. L’infrastructure, d’autre part, était facilement aménageable, en outre, cette cité n’est pas sujette à un affaissement minier ultérieur.
Jacky Davin
Il fallait de façon impérative que le coût total de l’opération demeure dans les limites des prix plafonds autorisés par la réglementation HLM. La partie technique fut confiée à deux architectes, Messieurs Evard et Martin. Monsieur Evard, dans quel esprit avez-vous conçu cet ensemble ?
Evard
Et bien, voici la maquette de l’état de la cité de Rimbert-les-Auchel telle qu’elle se présentait avant l’opération de rénovation. 272 logements répartis sur 55 hectares, sur 55000 m2 avec une densité de 50 logements à l’hectare. Nous avons décidé, plutôt que de démolir la totalité de la cité, de la reconstruire, de mixter l’opération avec un curetage de l’habitat qui était un mauvais état et une opération de rénovation de l’habitat qui avait une meilleure qualité. Voilà comment se présente l’opération, suppression de ces logements, nous gardons les logements qui restent sur cette maquette, création de logements neufs. Nous gardons la maternelle qui a été débarrassée de sa gang de logements ainsi que les écoles primaires, l’église. Et pour éviter la longue perspective des corons, nous avons supprimé un certain nombre de logements pour créer des places qui sont plantées de telle façon que la perspective soit coupée sur au moins la moitié de la longueur de la rue.
Jacky Davin
Il y a énormément d’espaces verts aussi, d’après la maquette ?
Evard
Il y a un assez grand nombre d’espaces verts, de telle sorte que nous avons ramené la densité de 50 logements à l’hectare à 37 logements à l’hectare.
Jacky Davin
Et beaucoup de surfaces pour les enfants ?
Evard
Toutes ces places-là, qui sont en dehors des circulations de voitures, sont réservées aux enfants. Les piétonniers ici, permettant aux enfants de se rendre dans les espaces verts sans emprunter les routes réservées aux automobiles.