Valéry Giscard d'Estaing à Ploërmel

Avec ce discours prononcé à Ploërmel le 9 février 1977, le président de la République Valéry Giscard d'Estaing annonce un tournant dans la politique de l'Etat à l'égard de la reconnaissance des langues et des cultures régionales. A cette occasion, en affirmant que "l'unité française n'a aucune raison d'être l'uniformité française", il annonce aux élus bretons la création de chartes culturelles régionales.

Suite au discours du président de la République, une Charte Culturelle de Bretagne fut préparée et négociée, afin d'entrer en application le 1er janvier 1978. Cette charte concerne les quatre départements bretons ainsi que la Loire-Atlantique. Cette charte signée entre les départements bretons, la région et l'Etat afin de préserver et promouvoir la culture bretonne, veut permettre à la culture et aux langues régionales - le breton et la gallo - de sortir de la marginalité dans laquelle elles se sont longtemps trouvées. En effet la charte établit que la langue et les différents éléments de la culture bretonne ne constituent pas simplement un patrimoine populaire et rural à conserver, mais qu'il s'agit de faire vivre une culture bretonne "ouverte sur l'extérieur et l'avenir", pour reprendre les termes de la charte.

Dans ce texte, la question de la langue bretonne est essentielle : la volonté de la diffuser plus largement au moyen de l'enseignement, de la radio et de la télévision est affirmée. La charte est aussi à l'origine de la création de trois instances mises au service d'une nouvelle ambition culturelle pour la Bretagne, le Conseil culturel de Bretagne, l'Agence technique régionale, et l'Institut culturel de Bretagne. Créés en 1978, le Conseil culturel permet de rassembler les principaux acteurs de la promotion culturelle de la Bretagne, et l'Agence technique, qui devient un an plus tard l'Agence culturelle de Bretagne, a pour mission la gestion et la maintenance d'un parc de matériel mis à la disposition des collectivités locales, des associations et organismes à vocation culturelle. Enfin l'Institut culturel, crée plus tard en 1981, est voué à mener des études et à faire des propositions sur l'identité bretonne.

La charte culturelle prévue initialement pour une durée de cinq ans a pris fin le 31 décembre 1982 et n'a pas été reconduite, le gouvernement ayant préféré mener une politique de conventions de développement culturel. Cependant son inaluence positive s'est poursuivie aux travers des trois instances qui en sont nées.

Ce discours a donc représenté un grand pas en avant pour les différentes cultures régionales en France, et notamment pour la Bretagne, qui tentait de mettre sur pied un Institut Culturel de Bretagne depuis de nombreuses années.On peut rappeler une première tentative de créer un Institut National de Bretagne en 1911 ou encore la création d'un Institut Celtique de Bretagne en 1941. Le projet de création d'un Institut culturel breton avait d'ailleurs été rejeté par l'État en 1974. Le discours de 1977 participe donc de la promotion de la culture et de l'identité bretonne. Par exemple, le Conseil Culturel de 2009 est le porte parole de 55 associations ou fédérations culturelles dans les domaines de la musique, de la danse, des jeux traditionnel bretons ou encore de la langue bretonne, tels que Diwan ou Div yezh par exemple. De son côté l'Institut Culturel se livre à de nombreuses opérations de promotion de l'identité bretonne avec l'organisation de colloques et de manifestations comme "Les veillées contées de la Bretagne", la publication de magazines comme Lizher'Minig et Sterenn ou encore la remise de récompenses telle que la décoration de l'Ordre de l'Hermine, récompensant les personnalités qui jouent un rôle dans le rayonnement de la culture bretonne. Ces instances continuent à évoluer comme en témoigne le nouveau conseil culturel de Bretagne qui est passé du statut d'association à celui d'institution consultative auprès du Conseil Régional le 26 mars 2009, le conseil culturel devant être maintenant consulté "sur toutes les questions traitant de l'identité culturelle de la Bretagne". A l'occasion de sa première réunion à Rennes le 4 juillet 2009, ce nouveau conseil culturel a formulé le projet de "faire que la Bretagne puisse disposer d'un véritable outil numérique sur la matière bretonne" : objectif qui se situe dans la droite ligne de la charte de 1978 mais qui s'adapte aux évolutions de la société.

Ce discours du président de la République en 1977 marque donc une véritable rupture dans la reconnaissance des identités culturelles régionales, et fait écho au dynamisme culturel breton des années 70.