Portrait de Suzanne Lenglen

24 mai 1987
02m 41s
Réf. 00100

Notice

Résumé :

Un spectacle consacré à la première championne de tennis Suzanne Lenglen Suzanne Lenglen la diva du tennis est donné au Carré Sylvia Montfort, mis en scène par Rachel Salik. Sur des images du spectacle et d'archives de l'époque, est évoquée la vie et la carrière de la tenniswoman picarde. A Wimbledon en 1919, elle bat Dorothy Lambert Chambers et devient championne du monde. Elle devient une star adulée, elle lance la mode sur les cours, habillée par Jean Patou, elle est la première à ne pas porter de corset. Dans ces Années folles, elle côtoie les plus grands artistes.

Date de diffusion :
24 mai 1987
Source :
FR3 (Collection: Soir 3 )

Éclairage

Suzanne Lenglen demeure l'une des figures les plus emblématiques du sport féminin français. Née en 1899 à Compiègne dans une famille de la haute société, elle se familiarise très tôt avec la pratique du tennis. Son aisance technique combinée à des qualités physiques peu communes vont lui permettre de mener une carrière exceptionnelle, dont l'apogée se situe dans les années 1920. Elle remporte à plusieurs reprises, en simple et en double, les Championnats du monde sur terre battue, les Internationaux de France, le tournoi de Wimbledon et conquiert par ailleurs l'or olympique à deux reprises. Elle surprend notamment ses adversaires par sa mobilité, ses fréquentes avancées au filet et son jeu de volée.

Accumulant les victoires dans les tournois les plus prestigieux, Suzanne Lenglen incarne aussi une certaine vision de la femme des années folles, qui refuse d'avoir un rôle secondaire dans la société française. Ce mouvement de revendications, initié dans les milieux culturels, a en effet une résonance particulière dans la sphère du tennis. D'une part, à l'instar d'autres activités élitistes comme le ski ou le patinage, pratiquants et pratiquantes se côtoient et s'exercent parfois ensemble. Dès lors, si l'univers tennistique n'échappe pas à la division sexuelle des rôles, il autorise le partage de goûts communs, comme le raffinement des gestes et l'élégance des tenues. D'autre part, les clubs de tennis sont des hauts lieux de la sociabilité mondaine: on y vient autant pour pratiquer que pour se montrer, converser et entretenir son réseau de relations. Les femmes prennent entièrement part à ces activités extra-sportives. Suzanne Lenglen côtoie ainsi la haute société au cours des nombreux diners et réceptions auxquels elle prend part.

En même temps, la joueuse compiégnoise, par ses extravagances, rompt avec les conceptions traditionnelles du corps féminin. En arborant des tenues audacieuses (bras et jambes dénudés, décolleté) dessinées par le couturier Jean Patou et en consommant de l'alcool, elle s'affranchit des "vieux tabous de la société guindée et corsetée" (selon l'expression de Jean-Jacques Becker et Serge Berstein). En se débarrassant de son corset, elle passe outre les préoccupations eugénistes qui hantent les décideurs politiques de l'entre-deux-guerres (préserver la femme de toute malformation afin qu'elle puisse procréer dans les meilleures conditions). Enfin, en ayant une activité physique soutenue, elle va à l'encontre des discours moralisateurs arguant de la nécessité de "protéger" les femmes des dangers physiques (la surmusculation qui nuirait à la reproduction) et moraux (la course à la performance qui serait nuisible) du sport .

Ainsi, par son attitude, Suzanne Lenglen va remettre en cause, tout au long de sa carrière, la posture traditionnelle de la femme d'apparat (caractérisée par la soumission et l'immobilité). Elle va servir de modèle à de nombreuses joueuses de tennis, aussi bien étrangères que françaises.

Sébastien Stumpp

Transcription

Jacques Paugam
Mais ce soir, en cette veillée d’arme, je vous propose de remonter quelques décennies en arrière, à la rencontre de la première femme joueuse professionnelle. C’était une française, une femme tout à fait exceptionnelle, l’une des grandes figures féminines des années 20, Suzanne Lenglen à laquelle est actuellement consacré un spectacle, à Paris, au Carré Sylvia Montfort. Caroline Sinz.
Rachel Salik
La reine Mary, George V, la princesse Mary.
Inconnu
Ready ?
(Bruit)
Rachel Salik
Chaliapine, Stravinski, les barons, les marquis. Papa, ready ?
Inconnu
Ready ? Ready ? Ready ? Service, mademoiselle Lenglen.
(Musique)
Sinz§Caroline
Wimbledon 1919, Suzanne Lenglen a 20 ans et elle est championne du monde. Elle vient de battre la reine incontestée du tennis, l’anglaise Lambert Chambers. La supériorité britannique est ébranlée par une french girl provocante.
(Musique)
Sinz§Caroline
Véritable star adulée, femme fatale des cours, elle lance la mode Lenglen : bandeau de soie dans les cheveux, décolleté profond. Jean Patou l’habille. Elle est la première à montrer ses jambes, ses bras nus et à ne plus porter de corset. Elle boit du cognac entre les sets, choquant le public royal. Mais elle abat ses adversaires avec des scores bicyclette.
Rachel Salik
Elle vivait une vie de folie. Elle n’avait aucune discipline du genre des joueuses d’aujourd'hui. Elle buvait du champagne des nuits entières, faisait la fête. C’était les années folles. Il ne faut pas oublier que Stravinski grimpait sur son piano et cassait les pianos après le concert. Il y avait tous ces… Sarah Bernhardt, sur la côte d’Azur, c’était la riviera. Il y avait toutes ces personnalités de l’époque qui vivaient une vie très très accélérée et très folle. Et c’était le champagne qui coulait à flot. Je parle des milieux, évidemment, où Suzanne Lenglen évoluait. Les pères d’Angleterre, les barons, les marquis, la reine Mary, Chaliapine, Stravinski, les barons, les marquis.
Inconnu
Ready ? Ready ? Ready ? Service, mademoiselle Lenglen.