La cité médiévale de Pérouges
Notice
Cette année la cité médiévale fête le centenaire du sauvetage de son site. Au début du XXème siècle la ville tombe en ruine. Grâce aux notables lyonnais, le site est protégé et restauré d'après de vieux plans de la cité.
- Rhône-Alpes > Ain > Pérouges
Éclairage
Ce village a pour lointaine origine une tour de guet qui signalait à la garnison romaine de Lugdunum d'éventuels envahisseurs. Rattaché au Dauphiné en 1300, il entre dans les possessions de la couronne de France en 1601. Le démantèlement de la forteresse date de cette époque, mais le village est toujours prospère grâce à l'activité de tissage. A partir du XIXe siècle cependant, le métier Jacquard recentre l'industrie de la soie à Lyon. La population de Pérouges passe de mille habitants environ en 1800 à moitié moins en 1900. A l'écart de grandes voies de circulation, le village périclite et les maisons inoccupées commencent à menacer ruine.
Préoccupé par le sort de son village, François (dit Francisque) Thibaut (1838-1907), un artisan de Pérouges, prend alors la plume pour en écrire l'histoire et chanter ses louanges en poète. Il est à l'origine d'une mobilisation exemplaire et consensuelle. Aidé par son fils Anthelme, professeur au Lycée La Martinière de Lyon, il parvient à rallier les médias à sa cause. En 1909, une campagne de presse d'une ampleur inégalée attire l'attention du public sur les nombreux effondrements qui touchent le patrimoine bâti. Un Comité de défense et de conservation du Vieux Pérouges est créé le 15 avril 1911 au palais du Commerce de Lyon. Ses adhérents comptent parmi les élites industrielles et culturelles lyonnaises. Édouard Herriot, le nouveau maire de Lyon, en fait également partie et il apporte tout son soutien à la cause des défenseurs. Il est d'ailleurs à l'origine de l'idée de créer une société civile immobilière afin d'acquérir et de préserver les maisons menacées.
En 1913 paraissent les premiers arrêtés de classement au titre des Monuments historiques pour la barbacane et l'église. Un avis favorable de classement est rendu pour l'ensemble du site en 1921, mais seules trente parcelles environ sont finalement protégées, avant qu'en 1926 un arrêté interdise toute modification des édifices. Le comité de défense est déclaré d'utilité publique en 1928. La loi sur les ensembles classés de 1962 achève de protéger l'ensemble du site qui en 1988 figure parmi les quatre-vingt quinze plus beaux villages de France.
Parallèlement, les particuliers ont joué un grand rôle en se mobilisant au sein d'un Comité de défense. De nombreuses fêtes sont organisées. Elles focalisent l'attention du grand public pour qui Pérouges devient l'archétype du village médiéval. De nombreux films de cape et d'épée y sont tournés et ils accroissent encore la célébrité du lieu. Tout est fait pour créer l'illusion d'un retour au Moyen Âge. Dans l'hôtellerie, les visiteurs peuvent prendre connaissance des objets de la vie quotidienne de la tradition bressane. Des expositions d'art contemporain et des concerts sont organisés afin de donner une image culturelle à la cité.
L'histoire de Pérouges est tout à fait représentative de l'évolution des idées en matière de patrimoine. Au tournant des XIXe et XXe siècles, on considère qu'il n'est pas seulement constitué d'édifices isolés, mais d'ensembles beaucoup plus étendus. La création de la Commission du Vieux Paris en 1897 est caractéristique de ce phénomène. Des associations et bientôt des organismes officiels s'attachent à préserver les paysages naturels. L'attention portée aux objets de la vie quotidienne apparaît avec les musées ethnographiques, à commencer par le Museon Arlaten de Frédéric Mistral créé en 1904. Le village de Pérouges cristallise ces nouvelles aspirations patrimoniales auxquelles s'ajoute le souci d'assurer par le tourisme la viabilité économique d'un village aujourd'hui repeuplé et prospère.