Le train à vapeur du Vivarais
Notice
Il y a quelques jours, le petit train du Vivarais s'est remis en marche. Monsieur Guy Ducou le Pointe, préfet de l'Ardèche, présent pour l'événement, a effectué le trajet de 30 km dans ce véritable petit train à vapeur.
Éclairage
En ce mois d'avril 1970, après moins de deux ans d'arrêt, le chemin de fer du Vivarais reprend du service entre Tournon et Lamastre, en traversant la vallée du Doux (en Ardèche). Le Mastrou, comme on le surnomme depuis 1891, parcourt à nouveau sa trentaine de kilomètres de voie métrique à une allure de sénateur.
Déclarée d'intérêt publique le 28 juillet 1886 avec deux autres lignes du Vivarais (Lavoûte-sur-Loire – Yssingeaux et La Voulte-sur-Rhône – Le Cheylard), la ligne Tournon - Lamastre nécessita de gros travaux : un millier d'ouvriers, armés seulement de pelles, de pioches et de quelques bâtons de dynamite, fut à pied d'œuvre pendant quatre ans pour effectuer les terrassements et construire les murs de soutènement, les trois viaducs ainsi que le tunnel nécessaires au franchissement de la vallée. Le premier tronçon de 2,2 km, entre Tournon et Saint-Jean-de-Muzols, construit en 1879, appartenait à la société PLM (puis, à partir de 1938, au réseau SNCF). Les 30,4 km restant allaient être à la charge de la compagnie des Chemins de fer départementaux (CFD).
Le Mastrou effectuait quotidiennement trois voyages aller et retour, avec des voitures de 1res, 2e et 3e classes. Il fallait alors 1 h 25 pour effectuer le trajet au rythme de 23 km/h, ce qui était déjà un exploit vu les nombreux arrêts (dans les gares, pour les approvisionnements en eau) et les ralentissements.
Les rames du chemin de fer du Vivarais étaient tractées par des Mallet, des locomotives, construites entre 1902 et 1932, particulièrement adaptées aux voies étroites de montagne grâce à leur double châssis articulé (une partie avant mobile, une partie arrière fixe). Aussi gourmandes en charbon qu'en eau, elles réclamaient, à la montée, 1 200 kg de charbon et 6 à 8 000 litres d'eau (contre 200 kg de charbon seulement à la descente et 3 à 4 000 litres d'eau).
Mais le 21 mars 1968, malgré de vives protestations locales, le ministère des Transports décrétait la « cessation de l'exploitation par voie ferrée », qui coûtait 30 millions de francs par an à l'État. Il faut dire également que les réseaux secondaires disparaissent les uns après les autres, devant le développement des transports en autocars et de l'automobile. La ligne était suspendue le 1er novembre de la même année. Un groupe d'amateurs décidait alors de sauvegarder les infrastructures et le matériel, dont 35 véhicules classés aux Monuments historiques, et de se battre pour faire vivre un petit train touristique.
Le 18 avril 1970, c'était donc la renaissance du chemin de fer du Vivarais, mais sans les CFD. Pavoisée, la locomotive Mallet 403 entrait en gare de Lamastre au son de la fanfare, en présence du préfet de l'Ardèche – auquel était dédié le traditionnel message de bienvenue – et des caméras du journal télévisé. Et la comtesse, dont il est question dans le reportage, qui s'était battue pour le retour du train en envoyant des pétitions aux autorités put enfin rouvrir les volets de son château. Elle les avait en effet tenus fermés depuis le 31 octobre 1968 en signe de protestation.
Le petit train s'arrêtera une nouvelle fois en avril 2008 au grand dam des 65 000 touristes qui l'empruntaient chaque année... On devrait bientôt revoir le panache de fumée de la Mallet dans la vallée du Doux grâce au travail des bénévoles de l'Association de soutien au chemin de fer du Vivarais, qui continuent d'entretenir les voies et le matériel roulant.