La maison de la culture de Grenoble
Notice
La maison de la culture de Grenoble, rebaptisée MC2, réouvre ses portes après 6 ans de travaux. Inaugurée par André Malraux en 1968, elle a été créée au moment où la ville de Grenoble était désignée ville organisatrice des Jeux Olympiques.
- Rhône-Alpes > Isère > Grenoble
Éclairage
À l'occasion de la réouverture après rénovation de la Maison de la Culture de Grenoble, rebaptisée MC2 en 2004, un bilan est fait de l'histoire de cette institution depuis son ouverture en 1968. Construite par l'architecte André Vogenscky, disciple du Corbusier, à l'occasion des Jeux Olympiques d'hiver, elle fut inaugurée le 13 février 1968 en présence du ministre des Affaires culturelles, André Malraux qui, dans un discours enflammé, exalte le contraste entre Grenoble, désert culturel avant l'âge d'or de la culture advenu avec l'ouverture de cette « moderne cathédrale» (expression du ministre le 27 octobre 1966). Le trait est un peu forcé, même si une nouvelle politique culturelle est mise en œuvre par le célèbre écrivain qui devient en 1959 et, pour une décennie, le premier titulaire du nouveau ministère des Affaires Culturelles.
L'association Peuple et Culture avait été la matrice d'une politique municipale de la culture. Créée à Grenoble en décembre 1944 par d'anciens résistants sous la houlette de Joffre Dumazedier, l'association-phare de l'éducation populaire s'est transformée en laboratoire d'idées et en lieu de formation où subsistait un idéal d'égalité culturelle et la conviction qu'un progrès était possible vers la démocratisation par l'accès à une culture universaliste. En novembre 1958, se crée, l'Association culturelle pour le théâtre et pour les arts qui veut promouvoir des spectacles autres que le théâtre de boulevard ou les opérettes. Deux comédiens de la Comédie de Saint-Étienne, René Lesage et Bernard Floriet, fondent la Comédie des Alpes en octobre 1960, malgré l'opposition du maire UNR de la ville. Cette troupe permanente propose aux Grenoblois des spectacles de qualité : Becket, Ionesco, Brecht ou Camus sont ainsi à l'affiche dès les premières années. Les chiffres sont là pour prouver le succès de l'initiative dans une ville où les besoins culturels des couches moyennes, de plus en plus nombreuses, sont importants : la première saison, 68 représentations et 19 643 spectateurs ; en 1967-1968, 173 représentations et 84 000 spectateurs. La culture devient ainsi le lieu d'un consensus local en dehors des partis politiques.
Contrairement à ce qui est dit dans le reportage, Grenoble n'est pas la première maison de la culture. La conception et les buts des maisons de la culture seront rapidement mis en cause à la fois par les gestionnaires municipaux à cause de leur programmation considérée comme trop élitiste, puis par les créateurs et par les sociologues qui souligneront en 1968 les limites de la démocratisation à l'aide d'une analyse du public qui n'est pas le public populaire visé par le projet, mais un public cultivé de classes moyennes, auxquelles s'ajoutent les cohortes enseignantes. Et, surtout, les moyens financiers ne suivent pas : le budget du ministère n'atteint jamais les 0,50% du budget de l'État.
Connue sous le nom du Cargo au début des années 1980, la maison de la culture de Grenoble s'est illustrée dans l'expérimentation théâtrale autour de Georges Lavaudant. Elle a aussi servi à forger le mythe grenoblois de la modernité et de la culture. Jean-Pierre Saez, directeur de l'Observatoire des pratiques culturelles, tempère cependant le commentaire quelque peu hagiographique du reportage en soulignant que pendant les six ans de fermeture (1998-2004), d'autres salles et d'autres équipes théâtrales se sont affirmées à Grenoble et que la nouvelle MC2 devra en tenir compte dans l'avenir. La programmation de la MC2 est désormais consacrée à la danse, à la musique et au théâtre.