Décès de Louis Lachenal
Notice
L'alpiniste et guide de haute montagne Louis Lachenal a trouvé la mort lors d'une ascension sur l'Aiguille du Midi. Ses compagnons de la célèbre expédition de l'Annapurna sont venus le veiller à Chamonix.
Éclairage
Le 25 novembre 1955, l'alpiniste Louis Lachenal meurt accidentellement alors qu'il descend à ski la vallée blanche, à Chamonix, victime d'une crevasse sur un site qu'il connaissait pourtant très bien. Quatre jours plus tard, les Actualités Françaises s'arrêtent sur la veillée funèbre pour évoquer la mémoire de celui qui, le 3 juin 1950, était passé à la postérité avec Maurice Herzog, en faisant partie de la première cordée mondiale à vaincre l'Annapurna par la face nord. Dans des circonstances dramatiques, Lachenal avait alors du être amputé, ses pieds ayant gelé pendant le retour au camp de base. Plus d'un demi-siècle plus tard, les conditions exactes dans lesquelles cette expédition s'est déroulée ont cependant fait l'objet d'une controverse opposant les proches de Lachenal et de Herzog. Un an après le décès de Lachenal, en effet, le frère de Maurice Herzog, Gérard, lui consacre une biographie, Les carnets du vertige (1956), où il utilise largement, mais partiellement, les carnets de notes de Lachenal. Or la réédition de cet ouvrage en 2006 par un autre éditeur, sur la base des notes de Lachenal retrouvées en intégralité par ses enfants, fournit une vision moins idyllique des heures ayant précédé la conquête du sommet que celles proposées dans la version de 1956 et, surtout, dans le livre de Maurice Herzog, Annapurna, premier 8 000 (1951), vendu à plus de 30 millions d'exemplaires et qui a contribué à faire de son auteur un véritable héros.
Le reportage de 1955 choisit d'ailleurs de s'attarder sur celui qui a vaincu l'Annapurna avec Lachenal mais qui a su, plus que tout autre, en capter l'essentiel des retombées médiatiques et politiques : Maurice Herzog, figure de la France de l'après-guerre, deviendra bientôt Haut commissaire à la Jeunesse et aux Sports du Général de Gaulle et, ultérieurement, maire de Chamonix. La séquence passe plus rapidement sur d'autres gloires locales : le champion du monde de ski James Coutet, l'ancien maire de Chamonix et futur Commissaire au Tourisme, Jean Ravanel, le maire Paul Paillot, et cite « les compagnons de l'Annapurna », probablement Lionel Terray et Gaston Rébuffat.
Malgré la réputation internationale de Lachenal, le parti-pris des Actualités Françaises est d'enraciner son souvenir dans son environnement chamoniard, comme en témoignent les vues sur la vallée de Chamonix, l'Aiguille du Midi, le célèbre monument célébrant Horace De Saussure à Chamonix ou encore la face de l'Ecole Nationale de Ski et d'Alpinisme (ENSA), ce haut-lieu français de la formation des guides de haute-montagne et de moniteurs de ski, créée en 1943 avant de prendre son nom définitif en 1947. Lachenal, qui est né à Annecy en 1921, est en effet devenu membre de la Compagnie des Guides de Chamonix en 1948, après avoir fait ses preuves au sein du Club Alpin Français depuis 1937 et de l'Association Jeunesse et Montagne en 1941. Instructeur alpin, moniteur, guide, il multiplie les ascensions dans les massifs des Alpes puis du monde après 1945, mais revient à Chamonix après la conquête de l'Annapurna, où il prend la direction de l'équipe de France de ski de descente et de slalom. Ses exploits lui valent la Légion d'Honneur et le Prix Guy Wildenstein de l'Académie des Sports. Sa mort, violente et accidentelle, s'ajoute à celles, tout aussi tragiques, d'autres champions fauchés dans leur jeunesse à la même période, comme le boxeur Marcel Cerdan ou le nageur Georges Vallerey, en favorisant dans les médias une dramaturgie où le champion incarne la vulnérabilité de l'homme face à la nature ou la maladie.